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Critique d'album

Interpol


El Pintor


(08/09/2014 - Matador - néo cold wave - Genre : Rock)
Produit par

1- All the Rage Back Home / 2- My Desire / 3- Anywhere / 4- Same Town, New Story / 5- My Blue Supreme / 6- Everything Is Wrong / 7- Breaker 1 / 8- Ancient Ways / 9- Tidal Wave / 10- Twice As Hard
Note de 4/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Un cinquième album qui divise profondément la rédaction."
Nicolas, le 15/09/2014
( mots)

Dix ans. Cela faisait dix ans qu’Interpol n’avait pas véritablement flirté avec l'excellence. A tel point que rares étaient ceux qui croyaient encore à un retour en grâce des new-yorkais. Sans sombrer dans les dithyrambes à outrances, on ne pourra néanmoins pas cacher un vrai enthousiasme à l’écoute d’El Pintor, un retour au source comme peu de groupes en ont été capables.


Pourtant, les augures ne semblaient pas franchement favorables de prime abord. Les espoirs placés successivement en Our Love To Admire et Interpol avaient été rapidement douchés par des incohérences dérangeantes dans certains morceaux, l’artwork éclaté de l’éponyme laissant même envisager un ultime baroud d’honneur alors même que Carlos Dengler annonçait qu’il quittait le groupe peu avant la sortie du disque. Privé d’un bassiste plébiscité par ses pairs, en proie à une crise d’identité donnant naissance aux atypies sus-nommées tout comme aux émancipations solo de Paul Banks / Julian Plenti, Interpol menaçait de ne jamais survivre au hiatus décrété par ses trois membres restants en 2011. Pourtant, les voilà bel et bien de retour. Pas question de se risquer à corrompre la bonne entente entre Banks, Kessler et Fogarino, décision a donc été prise de ne pas engager de nouveau bassiste, et c’est donc le baryton anglais lui-même qui s’est mis à la quatre cordes, un rôle qu’il endosse avec sérieux et application tout en parvenant parfois à faire oublier Dengler, lui qui, pourtant, était la caution et la référence culturelle es Cold Wave de l’ex quatuor. Et c’est donc dos au mur, condamnés à l’exploit, que les brooklynois ont réussi leur pari.


Interpol n’est jamais aussi bon que lorsqu’il ne cherche pas l’esbroufe, qu’il n’essaye pas de tutoyer l’efficacité superficielle de "The Heinrich Maneuver" ou de "Barricade", qu’il ne renie pas sa sensibilité dans l’idée de séduire les masses et de tourner avec U2. On se rappelle encore avec une certaine émotion des incroyables réussites qu’étaient "Pioneer To The Falls" ou "Light", des titres lancinants, enivrants qui, loin de taper dans l’oeil, savaient séduire au fil des écoutes. Pour autant, El Pintor prend un parti pris presque opposé en proposant dix morceaux ramassés, relativement rythmés, tendus, noirs, des morceaux qui ne font pas preuve de sidération mélodique mais qui réalisent une osmose, un mariage doux-amer entre tous les instruments. Terminées les divagations des deux albums précédents, Interpol se retranche derrière ses fondamentaux, l’alliage guitare-basse saupoudré de quelques nappes de synthés urbaines pluvieuses, les merveilles d’arpèges de Daniel Kessler, la batterie tonique omniprésente de Sam Fogarino et la voix crépusculaire et granuleuse de Paul Banks qui ne cesse de s’améliorer au fil des disques. Mais El Pintor est surtout un album cohérent et particulièrement constant, un disque qui emporte l’auditeur dans ses sombres sphères, qui captive sans coup férir.


A ce prix-là, peu importe si on ne retrouve pas de fulgurances aussi inoubliables que par le passé, peu importe si aucun morceau ne semble se démarquer qualitativement des autres, et peu importe, surtout, si "All The Rage Back Home", entrée en matière classique sur deux tempos, n’égale pas tout à fait les entames précédentes et aurait gagné à se voir soulagé de quelques choeurs bramés envahissants. Car au-delà, la magie opère sans partage. Interpol peut plus que jamais compter sur Daniel Kessler pour apporter une patte personnelle aux compositions. Ses arpèges, tantôt acides et fiévreux ("My Desire"), tantôt oniriques et angoissants ("Same Town, New Story", tout entier porté par les envolées aiguillonnantes du guitariste en costard), ravissent et convainquent en toute occasion. D’autres titres plus immédiats risquent de faire un malheur en live : "Anywhere", entêtant autant qu’haletant, "Ancient Ways", lancé à fond de train sur une highway américaine par une nuit sans lune, mais surtout "Everything Is Wrong", véritable leçon de cold wave transportée par la frappe galopante de Fogarino et l’exaltation triste de Banks. Mais là où El Pintor se démarque de la masse, c’est lorsque ces titres fédérateurs entraînent à leur suite des pièces atypiques, comme ce "Breaker 1" (sensé rompre l’"Obstacle 1" de Turn On The Bright Lights ?) tout en flux et reflux glaçants calmés par des suspensions en apnée, "Tidal Wave", contraste saisissant entre la noirceur tendue des instruments et la voix en haute altitude de Banks - enfin un morceau d’Interpol chanté en aigu qui apparaît vraiment réussi - ou encore "My Blue Supreme" qui prend un peu le même parti pris que le "Untitled" inaugural de leur album séminal tout en flagellant les lignes mélodiques à grands coups de médiators et de baguettes. Arrivé en fin de course, "Twice As Hard" n’a plus grand chose à ajouter pour convaincre les plus récalcitrants, mis à part sa lancinante redondance en apesanteur et ses incessants vibratos de guitare. Le bien est déjà fait.


Non, El Pintor n’égale pas Turn On The Bright Lights ni Antics. Oui, il surpasse Our Love To Admire et Interpol. Non, on ne s’attendait pas à un tel sursaut d’orgueil de la part d’un groupe qui semblait voué à une tranquille carrière commerciale en roue libre. Oui, il s’agit d’un retour aux sources parfaitement réussi. Et oui, on peut encore se laisser à espérer que l’un des plus grands groupes de rock des années 2000 accouche d’autres grands albums à l’avenir. En attendant, il nous reste à savourer un excellent disque de rock surfant sur la vague froide. Welcome back, Interpol.


Note de 2.0/5 pour cet album
Kevin, le 15/09/2014

On a tendance à l'oublier, mais Interpol est avant tout le groupe de son guitariste, Daniel Kessler. Il l'a fondé -avec l'ex bassiste Carlos Dengler-, il en compose la grande majorité de la musique et ne laisse au chanteur Paul Banks que l'unique opportunité de claquer sa poésie de petit garçon du bout des lèvres. Dengler parti, Kessler est définitivement la dernière âme créatrice du combo et il a fait de ce cinquième album, sa chose, son showroom. Il a allègrement drainé toute la place laissée vacante par son ancien compère dans le but d'en foutre partout. Et ça tâche, ça colle, même ça gâche. Des riffs ciselés, piquants, acides, mais qui mis bout à bout se transforment en une vraie coulée de lave qui emporte tout sur son passage. Et derrière ? Une morne plaine brûlée, exit la noirceur, exit la délicatesse, exit ou presque le songrwiting pataud mais imagé des trois premiers albums, il ne reste que des amas de guitares avec un gros projo dessus.

 

Le départ de Carlos D. et son remplacement par Banks, qui malgré tout son talent n'est pas un bassiste, est en réalité bien plus qu'un simple changement d'homme. C'est l'aboutissement d'une évolution structurelle dans la musique d'Interpol qui a commencé avec la parution d'Antics et qui s'est largement amplifié avec Interpol, en 2010. C'est, au final, réduire l'ampleur de la palette du groupe pour sonner plus précis, plus direct. Pour masquer, surtout, les failles d'un groupe incapable de se réinventer, incapable de produire de la matière neuve. Les ambiances enveloppantes se sont donc faites de plus en plus maigres pour arriver, en 2010, à un album aussi pointu qu'une flèche et relativement barbant. Un album U2-esque, des guitares tranchantes, des mélodies qui oscillent entre le vaillant et le mou du genou et puis basta. El Pintor, outre d'anagrammer -aussi- son grand frère, reprend les choses là où elles se sont arrêtées. Kessler a méticuleusement couvert le vide de guitares comme on couvre la poussière d'un tapis. Sauf que la poussière reste toujours et fait des petits. Alors Kessler a rajouté un tapis par-dessus.

 

Ici, tous les morceaux suivent le même pattern. Des guitares torturées qui se superposent et pour marquer une évolution on en rajoute encore. Où sont donc les "NYC", les "Next Exit" ou encore les "Wrecking Ball" ? Des titres profonds, de vraies chansons avec de gros bouts d'émotions dedans ? Broyés sous la machine, passés à la moulinette. Où est l'identité du groupe ? Probablement, avec le recul, quelque part entre Antics et Our Love To Admire. Dans une noirceur forcée mais éminemment confortable, dans une peur de la mort essuyée d'un revers de la main par des textes qui puaient le sexe. Dans des fantasmes d'adolescents taillés par des orfèvres. Il n'en reste que des fragments. Qui plus est, l'avènement criminel du up-tempo, outre la fatigue physique et mentale qu'il cause, détruit sans ménagement les embryons de climats humides.

 

Symptôme parmi les symptômes, la tradition du premier morceau de chaque album du groupe. Une porte d'entrée immersive, chiadée, un morceau généralement à part. Rien à foutre sur El Pintor. On tranche dans le lard dès le début, et si "All The Rage Back Home" s'avère au final être le morceau le plus convaincant par sa fougue légère, il n'empêche qu'on aurait aimé une introduction digne de ce nom. La suite est une équation presque ininterrompue où le bourrin croise le fer avec le muscle. Le vertige n'est plus dans le cortex, mais dans l'estomac. "Breaker 1" aurait pu être une bouée de sauvetage, mais l'élégance de sa première minute est assommée, déchiquetée par un maelström vomitif de guitares et le chant tellement trop haut de Banks. Finalement, quasiment tous les titres adhèrent à cette définition. "Anywhere", "Ancient Ways", "Tidal Waves", des titres aussi grossiers que balourds, artificiellement gonflés, monomaniaques, uniquement concentrés sur une course aveugle vers l'immédiat et le surplus.

 

Si Banks fut la caution humaine d'Interpol, il est aujourd'hui, malgré son rôle élargi, relégué en figurant, comme un avant-centre à qui on ne demande que de défendre. Car El Pintor n'est ni un retour aux sources, il en est même la négation, ni un retour en forme. Le groupe n'a gardé qu'une seule et unique facette de sa musique. Celle qui a persisté à travers les âges et qui ne consiste qu'en une rapide et appuyée salve de riffs déstructurée. Le reste ? Allez, un échantillon de sincérité dans les couplets de "Twice As Hard" et un ultime relent d'érotisme dans "My Desire". Autant dire une goutte d'eau. 

Avis de première écoute
Note de 3/5
Une bonne synthèse de ce qu'Interpol sait faire de meilleur.
Commentaires
Hocede, le 26/01/2018 à 11:37
Je trouve la deuxieme critique plus juste et spontanée, même si on sent qu'elle est le fruit de la déception. C'est un album très passable qui par ses défauts (plutot bien rendus ici) n'a plus rien à voir avec Interpol.