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Compte-rendu de concert

Ghost


Date : 11/04/2017
Salle : Olympia (Paris)
Première partie :

Salut c'est Ghoul.

Antonia, le 14/04/2017
( mots)

Évidemment que vous connaissez Ghost. Vous en avez forcément entendu parler au cours des quatre dernières années après leurs passages au Download Festival, à Rock en Seine ou au Hellfest. Vous avez bien dû entendre vos collègues ou vos amis parler de cette curieuse usine à tubes qui a raflé un Grammy Award en 2016 dans la catégorie “Meilleure performance metal”. Vous avez dû tomber sur une photo du chanteur à peine flippant avec son maquillage et sa tenue ecclésiastique, et vous avez peut-être même écouté leurs odes à la gloire de Satan, à l’orgasme féminin et aux plaisirs de la chair. Non ? Bon, reprenons pour les trois pélos qui n’ont pas suivi le phénomène :

Ghost est un groupe suédois de pop metal, quoi que ça veuille dire. Mélangeant les genres comme personne, mixant avec aisance le doom, le heavy metal et le pop rock, le groupe existe depuis 2008 et fait un carton à chacun de ses concerts et à chaque album sorti. Anonymes, les membres de Ghost portent chacun un masque représentant une sorte de démon et se font appeler les Nameless Ghouls (les goules sans nom en français). Le chanteur, anonyme lui aussi, incarne une figure papale venue apporter la parole damnée de Satan sur Terre et, fidèle à son personnage, arbore une longue toge souvent noire, une mitre et un maquillage représentant un crâne. Connu sous le nom de Papa Emeritus (il y en a eu trois en tout mais il s’agit toujours du même chanteur, vous suivez encore ?), il est le leader charismatique d’un groupe à qui tout sourit depuis neuf ans.

Tout ? Non ! Car une bande d’irréductibles Ghouls ont poursuivi Papa Emeritus en justice il y a de cela quelques jours dans une sombre affaire d’impayés et de détournement d’argent. Ils révèlent ainsi non seulement leur identité mais aussi celle du chanteur, désormais connu sous le nom de Tobias Forge, et avouent avoir quitté le groupe après que Tobias leur a proposé un contrat qui ne leur convenait tout simplement pas. C’est donc au beau milieu de cette affaire que je me suis retrouvée à l’Olympia face à un Papa Emeritus entouré de musiciens engagés au pied levé. Et croyez-moi, on y a vu que du feu.

Je passerai très rapidement sur la première partie soutenue par Zombi (on reste dans le thème, qu’est-ce que vous voulez que je vous dise), un duo américain originaire de Pennsylvanie qui, entre claviers, batterie et basse, dégage du rock prog vénère qui n’est pas sans rappeler les films de John Carpenter et qui caresse doucement des éléments de synthwave. La musique est plaisante, la présence des deux comparses l’est beaucoup moins. On a même l’impression de les emmerder, d’autant qu’ils ont le charisme d’une rampe d’escalier. On se serait laissé aisément porter par la pesanteur hypnotique des deux hommes s’ils montraient un peu plus d’enthousiasme à être présents. Le set terminé, la chaleur se fait sentir d’un coup et on commence à trépigner.

Imaginez un peu : soudain plongé dans une obscurité absolue vous distinguez au loin, comme provenant du fond des âges, un organe vocal baryton qui entonne une sorte de prière chamanique sur fond d’orgue. La voix est réverbérée, le son de l’orgue est lourd, puissant, grandiose. Ce que vous entendez n’est en réalité que le morceau d’intro de chaque concert de Ghost, Masked Ball de Jocelyn Pook. Niveau ambiance ça fonctionne du tonnerre, on se croirait dans un confessionnal. Les musiciens s’installent dans l’obscurité et commencent le concert par leur dernier tube en date alors que les projecteurs s’allument : Square Hammer. Folie furieuse dans la salle. Papa arrive alors dans sa toge habituelle et salue la foule avec de grands gestes, tout en majesté.

Ghost ne s’est jamais résolu à faire de simples concerts. On assiste toujours à une véritable performance artistique, qu’elle se déroule en salle ou au sein d’un festival. Un concert de Ghost est le gage d’un vrai show comprenant jets de fumée et confettis colorés. Le batteur et le claviériste, perchés sur des estrades, surplombent les autres musiciens qui changent de place tout le long du set dans une chorégraphie improvisée. Au fond de la scène on discerne un décor clérical fait de faux vitraux représentant le Malin. C’est dans cette ambiance toute particulière que la grosse ligne de basse du début de From The Pinnacle To The Pit résonne. L’Olympia chante alors à l’unisson "You are cast out from the heavens to the ground" et ça fait frissonner les avant-bras.

Les trente premières minutes passent plutôt rapidement, rythmées par des morceaux venant de chaque album du groupe. Secular Haze, Con Clavi Con Dio et Per Aspera ad Inferi, tout autant de prières rock’n’roll qui en appellent à Lucifer et qui donneraient presque envie de finir dans les entrailles brûlantes des enfers. Il faut dire que Ghost nous vend sacrément bien le truc. Avant d’entamer Body And Blood, chanson quasi-mignonne s’il en est, deux nonnes font leur apparition sur scène et distribuent des hosties aux premiers rangs. A ce stade-là du concert, la messe est définitivement prononcée. Profitant de l’interlude instrumental Devil Church, Papa change de look et revient habillé d’un costard en queue-de-pie ma foi pas trop laid. Et on est reparti de plus belle avec LE morceau de Ghost, la bande-son des plus funestes nouvelles, le tonnerre annonciateur de l’Apocalypse : Cirice. La moitié du public fait un black-out de béatitude et sur scène, le groupe tient toujours un spectacle parfaitement calibré et millimétré.

Il y a cependant de l’électricité dans l’air chaque fois que Papa s’adresse directement au public entre deux morceaux. On entend très distinctement plusieurs “Rends l’argent Tobias !” fuser de part et d’autre de la salle. Mais le concerné n’y prête aucune attention, d’autant qu’il ne doit pas piger un broc de français, et continue sur sa lancée. Year Zero prend le relai, suivi par la ballade transcendantale He Is. On l’écoute religieusement, bercé par la fabuleuse voix de Papa Emeritus (c’est qu’il a beau ne pas savoir gérer les revenus de ses musiciens, il chante quand même divinement bien) et on se balance d’un pied sur l’autre, porté par la délicatesse et la subtilité du morceau. Cet état de grâce ne durera qu’un temps puisque suit Absolution, un morceau pas choupi pour un sou qui nous rappelle que la mort est proche et qu’on pleurera très fort un jour pour absoudre nos péchés. Super programme en perspective. Viennent ensuite Mummy Dust et son mini solo de guitare synthé, Guleh qui se démarque par sa longueur et son incroyable crescendo, très agréable à voir enfin en live, et Ritual, premier succès du groupe qu’on retrouvait sur leur premier album Opus Eponymous. Cette dernière chanson terminée, le groupe nous salue et quitte la scène.

"Vous pensiez vraiment qu’on allait vous laisser sur une fin aussi pourrie ?" Évidemment non. Car un concert de Ghost se termine toujours de la même façon : par un hymne à la jouissance, à la volupté et à l’orgasme féminin. C’est donc Monstrance Clock et ses "Come together, together as one" d’une ferveur sans égal qui vient clore ce rapport sensuel d’une heure et demie. C’est alors qu’il faut se rendre à l’évidence : aussi ignoble que soit le comportement de Tobias Forge / Papa Emeritus envers ses anciens comparses, s’il compte faire de Ghost un projet solo accompagné de musiciens chopés par-ci, par-là, il y a de grandes chances pour qu’il y arrive. Car cet homme réussit non seulement à créer un nombre indécent de tubes, mais également à offrir des prestations live à la hauteur de nos espérances. Ce soir en était indubitablement la preuve.

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