Eths

Forts de deux EP prometteurs, dont le fameux Samantha, les marseillais de Eths (prononcez "etse") ont acquis leur notoriété en pratiquant un métal-core sombre et malsain, sublimé par la présence originale d'une chanteuse-hurleuse prénommée Candice. Nouvellement arrivé dans l'équipe de Sriracha Sauce (Watcha, Lofofora), Eths a pu profiter de moyens conséquents pour enregistrer et produire ce premier véritable album, Sôma, qui devait les élever au rang de nouveaux poids lourd du métal français. Or, il ne suffit pas de bénéficier d'une production solide et d'un son énorme pour sortir un album exceptionnel, encore faut-il avoir des idées (si ce n'est des mélodies) originales, ce qui manque peut-être à Eths.

Une chose est sûre cependant : Sôma pourrait être qualifié d'efficace. D'ailleurs il vous saute à la gueule d'entrée, avec "Méléna", titre speed que ne renieriait pas Slipknot ou Slayer (d'autres grands poètes). La voix gutturale de Candice est remarquablement mixée et terriblement aggressive, et se rapproche plus du Death que du hardcore. Passée la suprise, ses hurlements deviennent un peu saôulants, et dans l'ensemble on aimerait qu'elle joue plus souvent l'alternance avec sa voix claire, comme dans "Crucifère".

Les instrumentistes ne sont pas mauvais, loin de là (mention spéciale au batteur) : ils nous gratifient ça et là de quelques polyrythmes à la Meshuggah ("détruis-moi", "je vous hais"), de quelques parties speed-thrash comme évoquée au début, mais globalement Sôma est dominé par un groove à la Watcha, groupe qui semble être une grosse influence pour Eths. Mais alors que Watcha s'est orientée vers une forme de métal plus mélodique, Eths a choisi de rester dans le bourrin. Ainsi les mélodies sont plutôt sommaires, et les tourneries des guitares virent souvent à une caricature de néo-métal Slip-kornien. Un titre ressort particulièrement de l'ensemble de cet album : il s'agit de "Ailleurs c'est ici" avec Reuno de Lofofora, où Candice nous montre qu'elle a une bien jolie voix claire, quand elle veut.

Quant aux paroles, elles sont incompréhensibles quand la miss les hurlent, à moins de consulter le livret, auquel cas on découvre des textes emplis d'une touchante poésie : "Une jupe éponge de sang, méléna aime. J'aime boire l'eau chaude et rance de méléna. Une pulpe de fond mangée, méléna aime. Phlegmon rectal, jouet de méléna. Lit d'insultes abyssales, méléna aime." Bref, que du bonheur ! Cela a au moins le mérite de coller à la musique du groupe, noire et violente.

Au final, Sôma n'est pas décevant, mais pas transcendant non plus, la grosse claque promise reste donc à venir. Impressionnant scéniquement, Eths demeure un groupe à suivre, car Sôma n'est après tout que leur premier LP...