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Critique d'album

Abrahma


Through The Dusty Paths Of Our Lives


(24/07/2012 - Small Stone Records - Stoner rock - Genre : Hard / Métal)
Produit par

1- Alpha / 2- Neptune of Sorrow / 3- Tears of the Sun / 4- Danelion Dust / 5- Honkin' Water Roof / 6- Loa's Awakening (Prelude) / 7- Vodun - Pt. 1: Samedi's Awakening / 8- Big Black Cloud / 9- Headless Horse / 10- Vodun - Pt. 2: I, Zombie / 11- Oceans on Sand / 12- ... Here Sleep Ghosts / 13- Vodun - Pt. 3: Final Asagwe / 14- The Maze / 15- Omega
Note de 4.5/5
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Note de 3.0/5 pour cet album
"Entre doom cosmique et heavy blues, la renaissance musclée d'Alcohsonic."
Maxime, le 05/03/2013
( mots)

On jubile en assenant cet orgastique constat sans prendre le risque de se prendre une sévère volée de sarcasmes en retour  : oui, la France abrite de très bons groupes de stoner, qui n'ont rien à envier à leurs voisins européens. Il était temps, entend-on persifler, le mouvement étant aussi vieux que le grunge. Certes, mais l'important reste que l'on trouve matière à se réjouir. Depuis deux bonnes années, les disques se multiplient, consistants, puissants, fringuants, et obtiennent un écho par-delà nos frontières. Les rendez-vous scéniques défilent à un rythme de plus en plus régulier, les fidèles s'organisent, convertissent tranquillement de nouveaux adeptes. Qu'on réfrène de suite toute tentation de délire critique. Cachez ce magnum de champagne que l'on ne saurait voir  : pas de raz-de-marée à l'horizon, ni même l'esquisse d'une écume de hype. La chose reste affaire d'initiés. Mais quand même. On a de moins en moins de mal à dénicher du riff plombé administré avec hargne et dextérité par nos hagards compatriotes. On était loin de partager cet avis, lorsque huit ans plus tôt nous nous proposions de sonder pour la première fois pour ce webzine la scène heavy psych hexagonale.

On ne trouvera pas meilleure illustration de cette montée en puissance qu'en jetant oeil et oreilles sur le parcours de ce quartette francilien, formé à l'origine par Sébastien Bismuth, chanteur à l'organe élastique à la Whitfield Crane, et Pierre Monjoin, tricoteur doué d'obédience aerosmithienne. Les compères joignent leurs forces sous le blason Alcohsonic. Alors qu'au milieu des années 2000 les figures tutélaires du genre publient leurs derniers testaments, le groupe fourbit ses premières armes, baguenaudant d'EPs en divers tremplins, prenant d'assaut le moindre rade passant à leur portée. Déjà leur activisme les pousse à fédérer une scène à peine embryonnaire. La structure Arachnorock montre le bout de ses pattes, rassemblant les légions souterraines sous le drapeau des soirées Roadrockin. La formation se stabilise avec l'arrivée des frangins Colin à la section rythmique et Alcohsonic boucle un premier album à la DIY sur une petite structure (Songs From The Delirium Tremens World, 2009), livrant une collision entre le rock cartoonesque d'Ugly Kid Joe et le hard vintage des premiers Spiritual Beggars, rehaussé par une obédience assumée au blues le plus rustique. Les musiciens mènent leur petite barque, se risquant dans les pays voisins au détour de quelques dates, accrochant à leur tableau de chasse une affiche partagée avec Cactus, sans doute l'un des pics de leur jeune carrière.

Puis vient le temps des doutes. Le fossé entre le guitariste, résolu à demeurer dans l'orthodoxie classic rock, et le reste des troupes, décidé à en découdre pour de bon, devient abyssal. Pierre Monjoin quitte le navire. Les trois autres réalisent un 45t pour le moins costaud ("Vodun"/"Honkin' Water Roof"), qui les voit entériner pour de bon leur passage vers le côté heavy de la force. Un bretteur (Nicolas Heller) est réquisitionné pour alourdir le propos. Changement d'identité sonore, changement de nom. Alcohsonic devient Abrahma. Dès lors les lascars ne sont plus là pour rigoler, suffit de comparer les mines affichées sur les clichés des débuts et celles figurant sur les visuels actuels. Silhouette trapue et crâne rasé posé sur un cou de taureau, Nicolas Heller a l'allure d'un équarisseur texan, le genre à trancher ses riffs dans la couenne d'un éléphant. Avec sa tignasse ondulée, Sébastien Bismuth évoque un Chris Cornell des bas-fonds, empoignant sa guitare, délaissée du temps d'Alcohonic, impitoyablement greffée à une fuzz obèse. Son chant a muté en râle rocailleux. Pendant de longs mois, les gaillards bétonnent leur son, terrés dans leur bunker de Romainville. Les cheveux s'allongent, les barbes fleurissent, les biceps s'affermissent, les tatouages poussent inexorablement le long du corps. Les labels sont démarchés pour accueillir la comète. Small Stone Records (Five Horse Johnson, Dixie Witch, House Of Broken Promises) répond à l'appel, et Abrahma de rejoindre le roster du leader mondial en matière de heavy rock. Alors que Glowun s'ébat aujourd'hui chez Napalm Records (Karma To Burn, Monster Magnet), Blaak Heat Shujaa chez Tee Pee (The Atomic Bitchwax, Kadavar) et que le dernier Loading Data a été enfanté sous la houlette de Alain Johannes (Queens Of The Stone Age, Them Crooked Vultures, Mark Lanegan), cette percée confirme la maturité du stoner hexagonal, désormais paré d'une envergure internationale.

Il faut ainsi considérer ce Through The Dusty Paths Of Our Lives comme une véritable renaissance, ainsi qu'une farouche déclaration d'intention au moment de se lancer dans la compétition. C'est sous le haut patronage de Monster Magnet, élevé au rang de divinité, que le groupe s'élance sur la piste, une influence qui les travaillait déjà souterrainement à l'époque d'Alcohsonic et qu'ils peuvent désormais étaler au grand jour sans complexe, et ce dès la pochette, exécutée par Alexander Von Wieding, celui-là même qui a oeuvré sur nombre des réalisations du commando de Red Bank. Une filiation que les musiciens martèlent sur l'entame, le long d'un "Neptune Of Sorrow" déployant ses poinçonnages lysergiques dans la droite lignée du méphistophélique Dopes To Infinity, tout en guitares intersidérales et effets spéciaux stéréoscopiques, jusqu'à ce lancinant "Big Black Cloud" lézardé par les soli bouillonnants d'Ed Mundell, venu bénir sa progéniture par delà les continents.

Abrahma est pourtant loin de verser dans l'hommage mimétique, nourrissant son psychédélisme massif loin des obsessions hawkwidiennes du père Wyndorf. Sa signature sur Small Stone apparaît à ce titre on ne plus logique, tant la formation épouse les canons du culte label. "Dandelion Dust", "Honkin' Water Roof" et "Headless Horse" s'ébrouent ainsi lentement sous des atmosphères brumeuses, tout en tempos pachydermiques et riffs enroués, esquissant ce doom spatial qui reste l'apanage de l'écurie de Scott Hamilton (Sons Of Otis, Acid King ou Hackman ne sont jamais loin), jusque dans l'exercice du morceau de bravoure terminal ("The Maze", plus de dix minutes de stoner claustrophobique) quand vient l'heure de larguer les Marshall aux confins de l'univers. Ailleurs, le quartette joue la carte de la concision avec la même cruauté décibélique que Dozer, comme sur l'intraitable "Tears Of The Sun", le genre à pousser les titans à une séance de headbanging tellurique à en faire péter la croûte terrestre, ou bien réaffirme son allégeance au blues en conviant guitare slide et dobro pour porter "Oceans On Sand" sur des rivages moins arides mais tout aussi caniculaires.

Aussi probant que brillant sur les terrains sur lesquels il s'aventure, Through The Dusty Paths Of Our Lives démontre puissamment avec quelle aisance ses géniteurs sont parvenus à trouver écho hors de nos frontières. Reste qu'il conserve les défauts des qualités d'un premier album, au premier rang desquels sa trop grande générosité. 15 titres pour plus de 70 minutes de musique, même découpées en plusieurs interludes, voilà qui est un peu trop roboratif pour une entrée en matière, et seuls quelques téméraires pourront se vanter de dompter la bête, même après plusieurs écoutes. On regrettera surtout l'appétence prononcée des musiciens pour les rythmiques apathiques du doom, fusse-t'il moins glauque que celui pratiqué par un Electric Wizard. Les "Vodun" s'emploient à relancer gaillardement la machine, mais retombent rapidement sur de longs breaks psychédéliques, un brin systématiques sur l'ensemble. On aimerait que le groupe retrouve un peu de l'énergie rock'n roll de son ancienne entité ou qu'il s'approprie le groove d'un Clutch, bref qu'il tire un peu moins la gueule. Si quelques menus recalibrages semblent ainsi nécessaires, on ne peut que s'incliner face à la masse d'arguments que nous exhibe ici Abrahma, un combo qui nous menace à la force de ce premier opus qu'il risque de faire mal. Très mal.

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