Alice Cooper
Lace and Whiskey
Produit par Bob Ezrin
1- It's Hot Tonight / 2- Lace and Whiskey / 3- Road Rats / 4- Damned If You Do / 5- You And Me / 6- King of the Silver Screen / 7- Ubangi Stomp / 8- (No More) Love at Your Convenience / 9- I Never Wrote Those Songs / 10- My God
Si vous goûtez peu au jeu de rôle dans le rock, à l’incarnation de personnages grotesques et terrifiants comme Alice Cooper, qu’avez-vous pensé de Maurice Escargot ? Comment vous ne connaissez pas le célèbre détective ? Pourtant la pochette devrait vous diriger vers lui : un roman noir, un pistolet, du whisky … Non, ça ne vous dit rien ? Regardez derrière, il est en photo, avec son regard de dandy et son style de policier des années 1950, la clope au bec. C’est le nouvel avatar de Vincent Furnier ? Mais où est le maquillage, l’horreur gothique ? Alice Cooper n’est plus ?
Vous l’avez compris, sur Lace and Whiskey, Alice Cooper change provisoirement d’identité le temps d’un album désincarné où il devient Maurice Escargot, détective de son état. La photographie susmentionnée est significative de cette transformation puisque le personnage que l’on connait a disparu au profit d’un pâle agent de la loi. L’abandon d’Alice Cooper est le fil rouge de l’album puisque ce sont Bob Ezrin et ses fidèles compagnons (Wagner, Hunter, Levin) qui se sont occupés de tout, Furnier sombrant toujours plus dans l’alcoolisme et semblant incapable de tenir la barre.
L’album est unanimement brocardé, d’une part parce qu’il est typique de ce qu’on appelle le "pilote automatique" d’autant plus que le pilote en question est désinvesti. Ainsi, on a le droit à du rock’n’roll boogie au style assez cooperien ("Damned If You Do") ou d’un classicisme insignifiant ("Ubangi Stomp"), du Cooper dans sa version dégradée et lassant "I Never Wrote Those Songs". Mais quand le pilote automatique tombe en panne, l’appareil risque le crash … C’est la mièvrerie indigeste et emmerdante de "You and Me" ou les orchestrations kitsch pré-Toto sur "(No More) Love at Your Convenience" (sans rire, les percussions et les mélodies, caricaturales à souhait, font penser que "Africa" n’est pas loin) ou, peut-être moins pire mais à nouveau soporifique, "My God".
Pour autant, quelques bonnes idées peuvent être dénichées et l’opus ne commençait pas si mal avec un "It’s Hot Tonight", un hard-rock cadencé et sombre (les interventions de guitare criante à l’arrière nous entraînent dans une ville sombre pleine de gangsters), puis "Lace and Whiskey" qui installe l’histoire dans une dynamique cabaret-rock intéressante et prenante, qu’on retrouve sur le heavy "Road Rats". Ce très bon départ paradoxal cache la forêt dont on vous a montré la triste étendue, et si ce ne sont les passages sympathiques de "King of the Silver Queen", notamment les ponts qui ajoutent une belle densité au titre lorgnant du côté des deux précédents, la fadeur est trop envahissante.
Finalement, si le disque est relativement moyen, il n’est pas la catastrophe souvent déplorée, notamment au regard de Goes to Hell. Juste un album dont on retiendra un ou deux titres à l’écoute, et qui tombera vite dans l’oubli.
A écouter : "It’s Hot Tonight", "Road Rats"