C'est à l'occasion de la sortie de son nouvel album Peu importe, que nous avons pu rencontrer Phillipe Prohom, leader du groupe du même nom.
C'est dans les locaux de Polydor et par une belle journée printanière que celui-ci nous à reçu en toute simplicité, autour d'une table, pour répondre sans réserve à toutes nos questions.

Qu'est-ce que tu retiens des retombées du premier album et de la précédente tournée ?

Philippe Prohom : En fait on a commencé la tournée avant le premier album. Donc ce n'était pas vraiment une tournée d'album. On aquand même eu un petit changement en fin de tournée à l'automne : on a eu plus de monde en concert, et des gens qui connaissaient, alors qu'avant c'était un public qui découvrait. Sinon ça s'est toujours bien passé. Au niveau de l'album, je pense qu'on s'en est plutôt pas mal tiré dans le milieu de la scène française Mais on ne sait pas vraiment si on est plus connu qu'avant ou pas. Les journalistes nous disent qu'on l'est.

L'album a plutôt bien marché et il y a eu aussi des diffusions radio …

PP : Les tubes radio c'est pareil, c'est des radios que tout le monde n'écoute pas. C'est Ferarock, Le Mouv', Oüi FM. Mais pas d'Europe 2 ou de RTL 2. Le Mouv' pour nous, c'est vraiment la radio qui nous a supporté, c'est vraiment super, mais c'est pas cette radio là qui t'ouvre au grand public. La majorité de la population ne s'intéresse pas vraiment à la culture, c'est TF1 ou NRJ voir Europe 2 ou RTL2 pour les autres. Mais c'est pas une plainte, nous ça nous va très bien.

Comment s'est déroulé l'enregistrement du nouvel album ?

PP : Très bien. On l'a enregistré en trois fois et c'était très agréable. Comme pour le premier, on s'est laissé porter, sans volonté particulière si ce n'est celle de bien faire, pas de direction ou de concept. On a partagé beaucoup plus d'arrangements que prévus avec Fabrice [ndlr : Leyni]. Par exemple "Départ", c'est lui qui l'a faite à 100%. Ça s'est fait sereinement, mais ça reste quand même un travail éprouvant.

On avait déjà pu entendre certains titres sur la tournée …

PP : "Compte pas sur moi" et "Amer', ça fait très longtemps qu'on les joue alors que "Né à la place d'un autre", "Humain" et "Tu es tuée" ont été composé dans les deux dernières années. On ne les a pas intégré souvent à la playlist avant la tournée de l'automne où ils ont définitivement prient leurs places dans le set. "Tu es tuée" a été intégré assez rapidement car il fonctionnait assez bien en fin de set.

Musicalement, vous semblez avoir mis l'accent sur le groupe plutôt que sur ta personnalité ?

PP : Non en fait c'est l'inverse. Le deuxième album est beaucoup plus personnel que le premier. Sur le premier album, on a choisi les chansons selon ce que l'on faisait sur scène, à trois. Sur cet album là, je ne leur ai pas demandé leur avis, sans quoi cela aurait duré dix plombes. Parce qu'on n'écoute pas les mêmes choses. Yann est quand même batteur de Doppler, un groupe de Noise Core que je vous conseille d'aller voir, alors que Manu est plutôt brancher vieux trucs genre King Crimson ou du Hard Rock. Donc tu vois bien que "Restons les mêmes" ou "D'accord", c'est des titres qu'ils ne voulaient pas mettre. Donc je me suis dit, Prohom, c'est quand même mon nom de famille, donc c'est moi qui choisi. Après ça, il y des arrangements de guitares trouvés par Yann, d'autres petites touches de Manu, mais dans les choix, je n'ai demandé l'avis de personne, si ce n'est de Fabrice Leyni, qui est extérieur au projet. C'est plus évident de travailler avec quelqu'un qui est hors du projet, car pour nous il est très chargé humainement et sentimentalement, et je n'ai pas envie de mettre en péril cet équilibre pour une histoire de ligne de guitare.

Pourquoi avoir choisi Fabrice Leyni , tu avais aimé ses travaux avec Pleymo ou encore NTM ?

PP : Avec NTM ! Je suis un dingue de l'album de 98 avec "Ma benz", "Laisse pas traîner ton fils" [ndlr : Suprême NTM]. C'est pour moi une référence en Hip-hop, d'une part pour le travail de Kool Shen et Joey Starr, et d'autre part pour le son que Fabrice Leyni a obtenu. Je le trouve extraordinaire cet album au niveau du son. Mais il a fait beaucoup d'autres trucs aussi comme le dernier de la Ruda Salska. Et c'est un mec qui pouvait jouer des instruments : guitare et clavier; qui pouvait programmer, qui est un excellent ingénieur du son, et qui sait réaliser un album. Pour moi c'était parfait comme je n'avais pas les compétences pour le faire tout seul.

Au moment de la création, les morceaux sont réfléchis pour la scène ?

PP : Justement je n'ai pas voulu. J'ai voulu vraiment dissocier les deux. On trouve trois grattes sur "Des millions de forêts" parce que cela s'est fait comme ça. Sur scène cela devrait être bien plus électro par contre. On fait ce que l'on fait sur l'album et après on verra pour la scène. Et je vais palier à ça, avec de la prog électro. Je veux retrouver ce côté béton électro sur scène qu'on a un peu perdu dans notre évolution.

Le ton de cet album est plus grave que dans le premier !

PP : Oui, mais c'est pas une volonté, ça s'est fait comme ça. J'ai pas cherché à faire un truc plus sombre et je ne m'en suis pas rendu compte du tout d'ailleurs parce que je voulais un album beaucoup plus accessible et mélodique. Et c'est vrai qu'une fois que j'ai vu les 12 titres je me suis dit: "P'tain … c'est pas la rigolade". Mais je l'ai pas fait exprès.

Pourtant à te voir tu m'a l'air de quelqu'un de plutôt positif ?

PP : Toute la colère se dégage dans les textes. Chez moi c'est comme ça que ça marche, faut que ça sorte. J'ai du mal à chanter le bonheur, je préfère le vivre. Et le malheur, je m'en sort en écrivant.

Tu sembles assez touché par les problèmes des enfants ?

PP : Oui. Je suis papa depuis 4 ans et demi donc c'est un truc qui me cause beaucoup de soucis au niveau psychologique. Et cela me hante parce que je me dis que le salut de l'être humain passe par nos enfants. Les gens font des gamins pour eux, en n'ayant pas la conscience de ce que cela va apporter. Alors je me dis autant acheter un chien. La démographie est un vrai problème sur cette planète, alors arrêtons de faire des gamins sans réfléchir.

Tu peux nous parler de ton projet avec Laurent Bouhnik ?

PP : On voulait faire un DVD pour essayer d'attirer les gens vers le disque, mais j'avais pas envie d'un making off d'album. J'ai rencontré ce mec là avec qui je m'était très bien entendu et dont j'avais adoré "Select Hotel" et "Zonzon" et lui avait adoré les mises à plat. Donc on s'est super bien entendu et on est parti sur un cours métrage autour de l'album. Moi je voulais développer l'idée d'un personnage difficile à juger. Un mec pas tout noir et pas tout blanc. Victime ou enfoiré. A partir de là, c'est Laurent qui a fait le scénario. Et on est arrivé à ce que l'on voulait car il y a plusieurs réactions. Certain se diront du personnage, "Mais quel enfoiré !" alors que d'autres penserons que le pauvre à eu une dure journée. L'ambiguïté est de pouvoir juger cet homme. Je fait parti des gens qui pensent que c'est un enculé. C'est mon opinion. Il y a des gens qui ont plus pitié. On afait ça à l'arrache, tourné en DV sur 5 jours avec le budget d'un clip. J'en suis super fier. Je suis vraiment très content de cette collaboration.

Etre acteur comme ça, c'est quelque chose que tu veux continuer à faire ?

PP : Ouais ouais, je voulais m'y remettre car j'ai fais du théâtre il y a quelques années. Ça s'est mal terminé car j'ai eu un rôle qui était trop important pour moi, que je n'avais pas pu assumer sereinement. Et ça fait un an que je disait à mon manager que je voulait faire des castings pour faire de la figuration ou des petits rôles. La rencontre avec Laurent en tout cas c'est une bonne carte de visite, et j'espère que cela me permettra de faire des courts métrage ou des petits rôles, plutôt que des rôles de long métrage qui demande sûrement un travail monstrueux. On verra plus tard...

par Lilian


Merci à Phillipe Prohom et à Polydor.