Déjà trois ans sans nouvelles discographiques de Lavilliers. Trois années de compilations et autres rétrospectives qui sont venus nourrir notre impatience. "Carnet de bord", son nouvel album, vient remettre du baume entre nos oreilles, en attendant le concert, rencontre avec un grand voyageur.


Qu'avez-vous fabriqué pendant ce temps ?

J'ai tourné un maximum autour du monde. J'ai même tourné avec un groupe en Amérique Centrale, Caraïbe et Etats-unis pendant la guerre du Golfe. C'était d'ailleurs assez sportif. J'avais dit aux journalistes américains que j'étais contre le conflit. On s'attendait au pire. On a débarqué à Miami le jour de la déclaration de guerre.

De quelle manière est connu Lavilliers aux USA ?

Je suis surtout connu par les latinos, le milieu black et tous ce qu'il y a d'immigrés, c'est assez marrant d'ailleurs.

Il semble y avoir un nouveau souffle avec cet album.

J'ai joué tout l'été en duo avec le percussionniste Mino Cinelu. Le fait d'avoir travaillé avec lui et des musiciens comme Sly and Robbie en Jamaïque, ça m'a redonné la précision de la production et le fait d'élaguer un maximum, de retrouver une certaine pureté dans le son. J'en suis resté à des sons très naturels, je ne me suis pas encombré de trop d'arrangements avec un minimum d'intervention de l'électronique.

La Jamaïque c'est un peu votre deuxième maison ?

On va dire ça. C'est la où je suis le plus heureux, où je trouve le meilleur son. Il y a bien quelques studios à Paris ou à Toulouse, mais là-bas il y a un son particulier. C'est comme ça depuis 1979. Ce qui est intéressant, c'est qu'ils ont gardé leur côté roots tout en se mettant aux normes internationales.

Puisque l'on parle de reggae, vous faites un duo avec Tiken Jah Fakoli.

C'est un jeune artiste reggae. Il est un peu sur les traces d'Alpha Blondy puisqu'il est Ivoirien. Il m'avait demandé de lui écrire une chanson qui est devenue finalement un duo, "Question de peau". C'est un texte politique sur l'immigration clandestine qui est de plus en plus fréquente en Europe. Vu que tous les pays autour de nous crèvent la dalle, on va être confronté de plus en plus à ce genre de cas, qu'ils viennent d'Afrique ou qu'ils viennent de l'Est.

Il y a aussi une belle rencontre avec Césaria Evora

C'est un vrai cadeau. J'ai été invité à Cuba par le groupe Afro Cuban All Stars pour chanter sur leur nouvel album. J'étais avec un ami photographe qui a trouvé ce morceau magnifique. Il connaissait très bien son producteur, José Da Silva, et lui a fait écouté. Je suis allé voir Césaria en concert au Grand Rex (Paris) pour lui filer la chanson. Elle a trouvé ça très beau et m'a rappelé. Ça s'est fait très rapidement. Tout comme Da Silva, je suis producteur indépendant. Ça a fait moins d'avocats à convaincre. C'est de plus en plus compliqué de faire des duos avec des artistes

Troisième et dernier duo de l'album, Marin

C'est Rita Macedo, je la connais depuis longtemps. C'est la chanteuse des Femmouzes T. Elle fait partie de ce mouvement des insurgés toulousains. Je les ai souvent eu avec moi en studio et lors de mes premières parties. Là c'est carrément un duo. Cette chanson-là convient parfaitement à cette espèce de voix de rue un peu voilée, je trouve ça complètement génial. J'adore cette voix

On trouve aussi sur ce disque de vieux complices comme Pascal Arroyo

Je le connais depuis 29 ans. On a toujours composé ensemble. Par contre il ne joue pas avec moi pour l'instant. J'ai d'ailleurs totalement changé de groupe pour faire sonner l'album. J'ai fait passer beaucoup d'auditions pour trouver ces cinq musiciens. Il a bien fallu deux mois pour créer le groupe et mettre en place le set list. On va jouer pas mal du dernier album et beaucoup de choses complètement retravaillées dans le même esprit, avec des arrangements semblables au disque.

Peut-être un DVD live à la clé ?

C'est fait. C'est un cours de montage et de réalisation. La captation du concert, on l'a fait au Grand Rex. Tout est gravé en SACD, en 5.1. Il y a aura même une piste DTS. Pour les bonus, j'ai énormément le choix, j'ai tellement d'images. Je vais ressortir de vielles interviews, des tas de choses que les gens n'ont jamais vu, des instants d'écriture. À mon avis, ça sortira à la rentrée.

par Yannick