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Critique d'album

Dave Gahan & The Soulsavers


Imposter


(12/11/2021 - Columbia - Rock électro feutré - Genre : Rock)
Produit par Rich Machin, Dave Gahan

1- The Dark End of The Street / 2- Strange Religion / 3- Lilac Wine / 4- I Held my Baby Last Night / 5- A Man needs a Maid / 6- Metal Heart / 7- Shut Me Down / 8- Where my Love Lies Asleep / 9- Smile / 10- The Desperate Kingdom of Love / 11- Not Dark yet
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"L'hommage du grand Dave aux voix qui l'ont bercé et influencé. Un hommage intègre, classieux et rutilant, et qui dépasse très largement les frontières du clan Depeche Mode."
Maxime L, le 29/11/2021
( mots)

Il semblerait que les albums de reprises reviennent à la mode ces derniers temps. Après le succès cette année de Delta Kream des Black Keys dont on a loué les mérites ici, la sortie récente de Turning To Crime de Deep Purple, la pantagruélique Black List de Metallica sortie en septembre dernier, c'est au tour de l'immense Dave Gahan de s'essayer à cet exercice de style(s).


Petit rappel pour les deux du fond qui dorment, Dave Gahan est le chanteur de Depeche Mode, formation adorée ici (d’ailleurs si quelqu'un n'aime pas le groupe, qu'il le dise ici ou qu'il se taise à jamais) ; et il est accompagné par les Soulsavers, duo anglo-américain assez inclassable et qui aime à mélanger sons électro, rock, soul, gospel et à peu près tout ce qui leur passe par les oreilles, avec beaucoup de soin et un sens aigu de l'esthétisme. Ça n'est pas la première fois que Dave Gahan s'associe à Ian Glover et Rich Machin (à quand un duo avec Derek Trucks...vous l'avez ?), et en ce sens, leur discographie "commune" peut paraitre difficile à lire. Petit retour en arrière.


A la suite de la tournée européenne de 2009 (pour l'excellent Sounds of The Universe), où les Soulsavers ouvraient pour le trio de Basildon, nait une idée de collaboration entre Gahan, Glover et Machin. S'en suivra l'album The Light The dead See en 2012, avec Gahan au chant (et derrière l'intégralité des textes), sorti sous le seul nom de Soulsavers. 3 ans plus tard, c'est Angel & Ghosts qui voit le jour, cette fois, sous le nom de Dave Gahan & The Soulsavers, à l'instar de ce tout nouveau Imposter.


C'est Gahan qui est l'instigateur de ce nouveau projet, comme il l'explique dans Rolling Stone. L’idée date d'avant la pandémie, où par un bel après-midi de 2019, Dave Gahan appelle Machin en lui disant "J'ai envie de faire un album de reprises", aussi simplement que ça. Ce qui permet d'emblée d'évacuer l'idée de l'opportunisme post covid, où l'on pourrait voir d'un mauvais oeil l'idée de sortir du matériel pas complètement inédit à moindre investissement. Pour ce qui est des chansons revisitées, Gahan raconte "avoir voulu rendre hommage à des artistes avec lesquels il a tissé des liens particuliers, ou a des voix qui lui ont parlé d'une manière ou d'une autre au cours de ses 40 années de carrière".


Et c'est ce qui est intéressant lorsque s'on se penche sur la setlist : elle brasse large, sans toutefois tomber dans la facilité : Neil Young, Elvis Presley, Pj Harvey, Mark Lanegan, Nina Simone, Jeff Buckley. Des artistes assez différents mais avec une noirceur et une sensibilité conjointe en dépit d'univers parfois très éloignés.


Imposter s'ouvre sur "The Dark End of The Street", vieux standard soul de 1967 de James Carr et ses 2'35 de pure efficacité : l'ensemble est feutré, produit avec des étoiles dans les yeux et de l'or dans les mains. Gahan chante divinement bien et les choeurs Gospel (auxquels vous êtes habitués si vous connaissez les Soulsavers) amènent énormément de profondeur à cette piste inaugurale. Deuxième titre, et là, on change de galaxie, avec "Strange Religion", complainte folk désabusée que l'on doit à l'extraordinaire Mark Lanegan (vous a-t-on dit qu'on aimait passionnément Lanegan chez albumrock ?) et présente initialement sur son admirable Bubblegum. Si la voix de velours de Gahan est assez éloignée de celle rocailleuse et cabossée de Lanegan, là encore, c'est une réussite totale. La production des Soulsavers est parfaite, discrète, raffinée (toujours avec ces délicieux apports Gospel) et nos bricoleurs sont en terrain connu, puisque Lanegan fait partie du sérail, ayant collaboré avec eux sur l'album Broken (avec Mike Patton et Richard Hawley, autres voix assez magistrales du circuit).


Les versions sont ici fidèles, respectueuses et Dave Gahan ne prend pas forcément de gros risques (ceci étant, lorsqu'on est à la tête d'un des groupes les plus influents des 40 dernières années, a t-on encore quelque chose à prouver ?). Le premier vrai test, pour un public non initié, sera l'acoquinage avec "Lilac Wine", popularisé par Jeff Buckley, mais dont les premières moutures chantées remontent à 1953 avec Eartha Kitt, Judy Henske et surtout Nina Simone en 1966. Les arrangements sont ici faussement simples : en apparence deux lignes de guitares et quelques choeurs aux refrains, mais soutenus en réalité par une ligne de basse et des nappes de claviers, toutes en retenue, pour laisser la place au chant de Dave Gahan, inspiré, enveloppé et qui rend grâce aux différentes versions originales. Et l'enchainement avec "I Held my baby tonight" d'Elmore James n'en est que plus violent.


Non Dave. Pas ça Dave, pas toi, pas comme ça, pas après tout ce que tu as fait. Comment peux tu te fourvoyer dans un blues aussi raté et caricatural ?
Ne vous fiez pas à l'intro qui rappelle les belles heures de "Personal Jesus", la suite du morceau n'est que ratage. Que dis-je c'est un ratage, c'est une erreur grossière, une faute de goût malaisante, un nez avec un bouton purulent pour filer la métaphore avec la tirade de Cyrano. Si le titre est en lui même un blues très classique (pléonasme), le chant est tout bonnement insupportable, et nous rappelle les pires heures de cet oncle qu'on a tous eu, avec pantalon à franges, cravate texane et qui s'égosille à chanter le blues tel un mauvais sosie de Johnny Hallyday qui tente de nous faire croire ah que il vient de là, ah que il vient du blues. Une chanson qui ironiquement, corrobore le patronyme du disque.


La redescente est vertigineuse, et la gueule de bois carabinée. Heureusement, il ne s'agit que d'un accident de parcours (mais au ralenti,sur l'autoroute, et à contre-sens), et la suite de l'album est bien plus reluisante.


Pour celles et ceux (dont je fais partie) qui peuvent aimer les compos de Neil Young mais qui auraient un peu de mal avec sa voix disons au mieux, un peu nasillarde, la relecture du classique "A Man Needs A Maid" arrive a point nommé, et est n'ayons pas peur des mots, bien supérieure à l'original. La petite reverb sur la voix, le piano solennel, et la production aux petits oignons, en font une des belles réussites du disque, au même titre que la ballade folk de Gene Clark "Where my Love is Asleep", amputée de son harmonica un peu désuet aujourd'hui.


Mais le vrai grand moment d'Imposter, c'est sans conteste "Metal Heart", dont l'originale de Cat Power (dont on attend l'album de reprises annoncé avec impatience) est déjà fantastique. Si les versions d'Imposter sont jusque là dans la lignée des originales, Gahan et les Soulsavers parviennent cette fois à emmener la relecture très loin, tout au long d'une progression, d'une gradation d'une intensité folle. Que ce soit le chant, encore une fois très inspiré, mais surtout par le biais d'arrangements et de textures lumineuses : choeurs gospels incandescents, solo de guitare enflammé, chaque seconde est imparable. "Metal Heart" est un de ces titres qui marquent l'écoute au fer rouge, et l'équipe autour de Gahan ne s'y est pas trompé en en faisant son premier single. Voilà qui rattrape avantageusement la malheureuse tentative blues citée précédemment. Certains titres apparaissent relativement anodins (sans être mauvais pour autant), c'est le cas des reprises d'Elvis Presley, "Always on my mind" ou "The Desperate Kingdom of Love", morceau dépouillé à l'extrême de Pj Harvey, ici pimpé et dopé aux textures façon Soulsavers mais qui peine à dégager un réel interêt, en dépit une nouvelle fois d'un chant impeccable.


Mais on peut louer la volonté de Dave Gahan de se frotter à un répertoire très éloigné du sien, on pense à "Smile", chanson de Charlie Chaplin popularisée par Nat King Cole et qui résonne comme une vraie chanson de Noël, comme les anglo-saxons savent exactement le faire, et où Gahan y est plus que crédible. Et comme nous le disions plus tôt, l'exercice des reprises est l'occasion de rendre hommage aux voix qui l'ont accompagné, notamment celle de Rowland S Howard, artiste australien disparu en 2009, le temps d'un "Shut me Down", blues sépulcral quelque part entre Nick Cave (compagnon de route d'Howard au sein de The Birthday Party) et Johnny Cash.


Pour conclure, Imposter est une vraie bonne surprise, dans sa construction, dans sa production, avec une véritable cohérence très classieuse dans les ambiances malgré des influences très différentes. Le disque est chaleureux, suave, parfois cotonneux et sa langueur sied parfaitement à une écoute au casque, sur une fin d'automne assommante, et où la voix magnétique de Dave Gahan permet de bénéficier d’une chaleur salvatrice. A condition de faire l'impasse sur le quatrième morceau.

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