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Critique d'album

David Bowie


Pin Ups


(01/10/1973 - - - Genre : Rock)
Produit par

1- Rosalyn / 2- Here Comes The Night / 3- I Wish You Would / 4- See Emily Play / 5- Everythings Alright / 6- I Can't Explain / 7- Friday On My Mind / 8- Sorrow / 9- Don't Bring Me Down / 10- Shapes of Things / 11- Anyway Anyhow Anywhere / 12- Where Have All The Good Times Gone
Note de 3/5
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Note de 2.0/5 pour cet album
"Les hommes font l'histoire, mais ils ne savent pas l'histoire qu'ils font - Raymond Aron (paraphrasant Karl Marx)"
Daniel, le 12/03/2023
( mots)

Cinquante années après le naufrage de Pin Ups, il reste encore difficile de démêler le vrai du faux quant aux causes du sinistre. Une seule chose est certaine : il n’y avait aucun iceberg dans le parc du Château d’Hérouville où a été enregistré l’album.

Tout artiste (et Bowie est un artiste) a évidemment le droit de jeter une œuvre indigne en pâture à ses fans. A sa sortie, et malgré des critiques très justement assassines, Pin Ups a été plébiscité dans les charts britanniques. Mais les ventes se sont tassées par la suite et l’opus reste une anecdote peu plaisante dans la discographie du Thin White Duke.

Le prétexte communicationnel de l’album a été que, du haut de sa splendeur, le jeune Maître souhaitait rendre hommage à des titres de la mouvance sixties qui auraient influencé son génie immanent.

La superficialité publicitaire ne peut masquer que tout sent ici la fin d’une époque : licenciement des Spiders From Mars, suicide public de Ziggy, gestation mal vécue du divorce musical annoncé d’avec Mick Ronson, bouderie avec RCA (qui avait refusé de financer une tournée américaine), fin de contrat avec Mainman (qui, à défaut de composition originale, ne touchera pas un kopek dans l’aventure), envie d’un moment de paix et de vacances dans un « endroit charmant » (1), paresse intellectuelle, inspiration en berne, revanche à prendre contre le public qui a commis un crime de lèse-majesté en confondant la star imbue d’elle-même et son encombrant avatar, …

Toutes les pièces du cold case sont là sur l’étagère, rangées dans une épaisse chemise en carton. Libre à chaque historien rocker en culottes courtes d’ouvrir le dossier et de tenter de l’élucider cinquante années plus tard.

C’est probablement l’élaboration de la pochette qui a nécessité le plus de travail sur Pin Ups. Rompu aux pochettes "iconiquement" laides (ça changera radicalement à partir de Station To Station), David Bowie, vêtu de son plus beau costume brun moyen à veste courte, adopte tout d’abord une pose déhanchée, un saxophone à la main, arboré comme un symbole des sixties…

Puis il change d’humeur et opte pour le noir en blanc. Mais il manque une étincelle, un concept.

L’équipe fait alors appel à la très étrange Lesley Hornby. "Twiggy The Wonderkid" est alors un mannequin célèbre, égérie (parmi d’autres) de la merveilleuse Mary Quant. David Bowie courtise la demoiselle dans l’objectif avoué de devenir le premier homme à figurer en couverture de Vogue (2). Problème : arborant d’ordinaire un teint cadavérique assez seyant, la Brindille revient toute bronzée d’une plage où elle a exposé ses 41 kilos (serviette de bain et bikini compris) à un soleil trop généreux. Pour sa part, le Duke est d’une pâleur à faire peur. Le mariage chromatique ne peut être consommé. Pierre La Roche (3), testeur des produits Elisabeth Arden, est appelé à la rescousse. Il a déjà maquillé Ziggy et s’apprête à donner vie aux personnages caricaturaux du Rocky Horror Picture Show. Coup de génie : La Roche éclaircit la frimousse de Twiggy et fonce celle de Ziggy ! Fasciné par le résultat, Bowie snobe Vogue et utilise le cliché pour son album.

Il suffira d’ajouter un laid fond bleu dégradé puis un titre dont le graphisme en escalier semble tout droit sorti d’une poubelle de Stan Lee.

Et la musique ? Ah oui, en cherchant un peu, il y a effectivement un disque à l’intérieur de la pochette. Était-ce vraiment nécessaire ?  

Aynsley Dunbar joue les intérimaires à la batterie. Trevor J. Bolder, licencié puis, faute de mieux (4), réintégré comme employé de seconde zone, enregistre à la va-vite des lignes de basse minimalistes. Seul dans son coin, lorsque les autres sont absents (5). Mick Ronson réussit le prodige de se rendre invisible (le terme "inaudible" serait plus adéquat). David Bowie chante (bien), prend des photos, soufflote dans son saxophone et répond à des interviews.

Le vrai prodige dans cette affaire (bien avant les jolies sorcelleries de J.K. Rowling) est que tous les titres, interprétés sans aucune âme, sont moins intéressants que les originaux. A l’exception peut-être de "See Emily Play" qui rend un hommage, psychédélique sans être exaltant, à son auteur original. Ce seront les seules notes qui imprimeront un vague souvenir sur les murs du Strawberry Studio niché au cœur du Honky Château. Peut-être les entend-on encore aujourd’hui, à peine perceptibles, parmi celles, bien plus inspirées, qui avaient été jouées précédemment par d’autres célèbres évadés fiscaux (Pink Floyd, Elton John, Marc Bolan, …).

Les onze autres titres oscillent entre le cover-band de village ("Friday On my Mind", "Sorrow", …) et la contrefaçon de fort bas étage ("Rosalyn", "Everything’s Alright", "I Can’t Explain", …). Inutile de s’attarder.

Le mardi 31 juillet 1973, après vingt et un jours de récréation, David Bowie quitte Hérouville, rentre en Angleterre et reprend le chemin du bureau pour préparer l’écriture de Diamond Dogs.

Pin Ups restera dans les tiroirs de certains collectionneurs comme une carte postale de vacances dont l’encre du texte s’efface doucement. Avec un peu d’imagination, on devine encore quelques mots tracés à la hâte : "Un grand bonjour de France où il fait bien bon. Oncle Davey"

(1) En français dans le texte.

(2) C’est Harry Styles qui s’y collera 47 ans plus tard.

(3) Le maquilleur qui a littéralement « fabriqué » Bowie est assez injustement négligé dans le biopic Moonage Daydream.

(4) Un moment sollicité, le grand Jack Bruce avait refusé le poste.

(5) Ca s’entend très fort sur un titre comme "Here Comes The Night" où la basse – assez volubile, au demeurant – semble vraiment désincarnée par rapport au reste des instruments. 

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