Editors
In This Light And On This Evening
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1- In This Light And On This Evening / 2- Bricks and Mortar / 3- Papillon / 4- You Don't Know Love / 5- The Big Exit / 6- The Boxer / 7- Like Treasure / 8- Eat Raw Meat = Blood Drool / 9- Walk the Fleet Road
Bon, ça y est, c'est fini. La comparaison est morte, Tom Smith est en paix, avec In This Light And On This Evening, on va ENFIN arrêter de le souler avec Interpol. Là, c'est sûr. Parce que les claviers 80's et les rythmiques électro, Paul Banks ne s'y est jamais risqué. Tom tient le moyen d'enfin imposer son identité. Reste à savoir si le virage, risqué, radical, presque en épingle à cheveux, ne va pas être suivi d'une sortie de route... de celle où on finit sur le toit dans un sale état.
A première vue, la conduite de Tom semble sûre et maîtrisée. En ouvrant sur le sombre et intriguant "In This Light And On This Evening", Mr Smith semble se poser en guide rassurant. "Oui, le son est différent, oui, les guitares sont délaissées au profit des claviers, mais regardez, ma voix est toujours aussi belle et grave, toujours plus tenue et magistrale. Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer." Et à la fin du titre, on le croit corps et âmes. Aussi, même si le tout début d'intro de "Bricks and Mortar" fait penser aux Strokes, même si l'arrivée des synthés nous fait reculer de 20 ans, on arrive à se laisser porter. Malgré la perte de repères et malgré l'absence de ces basses si magistrales dans An End as A Start, la magie fonctionne, parce qu'Editors sait manier la mélodie et la rythmique avec n'importe quoi.
Ce qui frappe à l'écoute de ITLAOTE (oui, c'est ça l'abréviation), c'est que malgré le déluge de claviers, les titres sont d'une sobriété surprenante. Loin des arrangements subtils des deux albums précédents. Editors a choisi le minimalisme, des compositions simples où le chant est juste soutenu par les claviers, avec un contre-chant électro en fond, et une rythmique basique à la batterie. Un choix qui s'explique (peut être) par le côté très envahissant des synthés eighties, dont la résonance et la longueur sonore impose d'oublier les petits instruments qu'on ajoute habituellement pour étoffer le son. Le résultat est alors paradoxal, donnant l'impression simultanée d'un trop-plein permanent, et d'un vide indéfinissable.
Et malgré cela, Editors parvient à sortir l'émotion d'un son pourtant plus habituellement associé aux vieux dancefloors des années 80. Les synthés étant au piano ce que le kazoo est à la flûte traversière, parvenir à transcender son côté festif et daté pour l'allier à des compositions sombres était un challenge de taille. Le groupe le relève avec talent sur des titres comme "Papillon" et surtout le superbe "Eat Raw Meat = Blood Drool", même si sur ce dernier, les guitares reviennent en soutien de manière très judicieuse. Par contre, l'alchimie fonctionne moins bien sur "You Don't Know Love " et son refrain aux airs de déjà-vu, ou lorsqu'on frôle l'overdose sur "Like Treasure". On zappera "The Big Exit" et son refrain un peu agaçant pour le très beau "The Boxer", où les claviers se font plus discrets pour soutenir en douceur, comme la guitare, le chant tout en sobriété. Une ambiance qu'on retrouve sur le final "Walk The Fleet Road", porté par des choeurs et une petite litanie dans les graves.
C'est certain, In This Light... ne fera pas que des heureux. Editors a décidé de changer de cap, avec un grand coup de volant, au risque de balancer violemment certains par la portière ouverte. Ceux qui se seront accrochés ne le regretteront pourtant pas, car ce troisième album s'apprécie sur la durée. Une fois habitué aux claviers, on retrouve l'émotion des textes de Tom Smith et l'intensité qui se dégageait déjà des précédents opus. Le fond n'a pas changé, seule la forme évolue, on appelle ça vieillir.