Grateful Dead
Workingman's Dead
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1- Uncle John's Band (Remastered Version) / 2- High Time (Remastered LP Version) / 3- Dire Wolf (Remastered LP Version) / 4- New Speedway Boogie (Remastered LP Version) / 5- Cumberland Blues (Remastered LP Version) / 6- Black Peter (Remastered LP Version) / 7- Easy Wind (Remastered LP Version) / 8- Casey Jones (Remastered Version)
Les années 1970 commencent et c’est une époque qui se referme. Le rêve hippie et sa retranscription musicale s’éteignent lentement dans les derniers échos de Woodstock, tandis que les groupes ayant animé la période doivent se réinventer. Fini les longues improvisations sous acide, les titres d’une demi-heure et les couleurs chatoyantes, le rock psychédélique décline et les formations du genre sont à la croisée du chemin : il va falloir muer ou péricliter, et Grateful Dead profite de Workingman’s Dead pour établir une nouvelle formule. A moins que ce ne soit les changements stylistiques empruntés par Grateful Dead sur ce quatrième album qui expliquent le destin du rock psychédélique : quand un groupe est à ce point dominant dans un courant musical, ce dernier peut être bousculé par les évolutions d’un combo-leader.
Peu importe au fond, l’essentiel est de comprendre que sur Workingman’s Dead et ce pour deux albums, Grateful Dead abandonne le rock psychédélique au profit d’un folk rock rural, aux racines enfouies dans les musiques traditionnelles américaines (blues et country surtout). Il est vrai que le courant hippie avait pu, dans son goût pour l’univers folk, promouvoir et adopter cela : rappelons que le public de Woodstock avait été enflammé par Country Joe, Canned Heat, Creedence Clearwater Revival ou Crosby, Still, Nash & Young. D’ailleurs, la pochette de l’album renvoie davantage à Willy and the Poor Boy ou au far West qu’aux iridescences du Flower Power.
Ce sont bien sûr les membres de CSN&Y qui figurent au sommet de leur inspiration, en particulier Stills et Crosby avec lesquels ils avaient noué une amitié et dont ils admiraient les premiers ouvrages. Il est difficile de ne pas y être sensible dès le sympathique "Uncle John’s Band" où les harmonies vocales ne trompent pas, mais la maîtrise du registre n’est pas encore complètement en place au niveau rythmique comme dans la justesse du chant (c’est pire sur "High Time", et mieux sur le picking "Cumberland Blues").
Les choses sérieuses arrivent avec "Dire Wolf", sa pedal-steel et son refrain mémorable, le mélange de country et de blues de "New Speedway Boogie", "Easy Wind" avec son harmonica et ses riches interventions à la guitare (vers 0.50’’ y’a comme un air de "Crossroads" de Cream en beaucoup plus lent non ?). L’hymne à la consommation de psychotropes qu’est "Casey Jones" brille par son chant flegmatique, tout à fait raccord avec le thème de la chanson.
Il y a donc de belles pièces sur cet album de transition, une richesse instrumentale qui est à noter, même si le groupe ne brille pas par son originalité dans le style (Déjà-Vu est bien plus exemplaire, sans parler de l’intégralité du répertoire de Creedence) et manque parfois de rigueur. Poursuivant cette direction stylistique par la publication la même année d’American Beauty, ils parvinrent, de l’avis de tous, à aborder ce tournant esthétique avec une plus grande pertinence.
A écouter : "Casey Jones", "Dire Wolf", "Easy Wind"