Patti Smith
Salle : La Coopérative de Mai (Clermont-Ferrand)
Première partie :
Sur un air de Rock'n'roll, Patti s'assoit sur les escaliers et remet en place ses chaussettes.
Patti chante, danse et joue de la guitare.
Patti se balade entre ses musiciens, rigole et raconte des histoires.
Patti est chez elle sur scène, et nous, on n’arrive pas à en détacher nos yeux.
La « Grande Patti » est de retour à Clermont-Ferrand, après son dernier passage il y a 4 ans, c'était déjà à La Coop de Mai.
La salle est pleine à craquer, impossible de traverser la fosse ou d'essayer d'atteindre les gradins tellement la foule est compacte.
20h45 tapante, la prêtresse punk fait son entrée, souriante, décontractée, elle salue son public et entame son set en douceur avec "Dancing Barefoot".
Flash-back. Veste et pantalon noirs, chemise blanche sous un gilet de costume, visage anguleux et expressif sous une cascade de cheveux long, le charisme de Patti Smith est toujours aussi absolu.
Avec sa démarche détendue, sereine, la chanteuse se déplace sur la scène, se balance au rythme de ses chansons, danse au milieu des guitares. La voix est grave, chaude et profonde, et de toute sa personne se dégage des émotions intenses : on passe du sourire à la rage, de la quiétude à la colère, de la mélancolie à l'impatience...
Patti Smith va nous offrir des titres de plusieurs albums : Radio Ethiopia, Easter, Trampin, Horses, le très beau et mélancolique Gone Again...
Elle est accompagnée par quatre musiciens, line-up de choix en parfaite symbiose avec leur front-woman. La complicité est perceptible, on a même l'impression que Patti et ses acolytes décident du choix des morceaux au feeling, en fonction de ce qu'ils ressentent venant de la salle. Les fidèles Lenny Kaye à la guitare et Jay Dee Daugherty à la batterie sont là, comme ils étaient déjà auprès d’elle au temps du « Patti Smith Group ».
La diva maîtrise le tempo et nos émotions, nous faisant passer de la nostalgie ("My Blanken Year", "Beneath The Southern Cross") à l'exaltation avec l’intro au piano de "Because the night", en passant par l'envoûtement de "Ghost Dance" qu'elle renforce en nous exhortant par la voix et le geste à taper dans les mains. "Ain't it Strange" va nous couper le souffle, rythme saccadé, montée en puissance, la voix est de plus en plus forte jusqu'à s'enrager dans un spoken-word . Patti a les mains qui tremblent, sa voix est rauque, elle se plie en deux, puis soudain se calme, pose son pied sur un caisson de retour, remet ses cheveux en place.
Sa guitare autour du cou, elle nous rappelle que bientôt ( le 10 novembre) ce sera le 120ème anniversaire de la mort de Rimbaud. Entre chaque titre, elle parle à son auditoire . Elle raconte une anecdote, nous parle de courses de chevaux, avec des chevaux noirs qui gagnent. "Ils ont changé ma vie vous savez", nous confie-t-elle en se marrant. Et fidèle à ses valeurs, elle nous rappelle notre devoir d'insoumission : "We must stay clean, you will take the street together !" .
Les trois guitaristes et le batteur se lancent dans un morceau rock, hommage aux compilations Nuggets chères à Lenny Kaye, pendant que Patti s'assoit et ....remet ses chaussettes. "I have to change my shoes", nous explique-t-elle. Et profitant de sa récréation, elle descend de la scène et vient serrer les mains des admirateurs fiévreux du premier rang, la démarche flegmatique, ses yeux droits dans les nôtres, magnétique.
Remontée sur scène, et après un magnifique "We Three" et son accompagnement au piano, elle chausse ses lunettes pour nous lire un de ses textes, feuillet qu'elle jette ensuite rageusement à terre pendant la harangue finale. "Remember, You decide !"
La coopé s'enflamme pour le final : l'insurrectionnel "People Have The power" fait lever les poings et c'est un "Gloria" sauvage qui clôt le set. La lumière revient, Patti sourit, Patti salue, et s'en retourne.
Elle revient pour un rappel, et remercie chaleureusement le public de Clermont pour sa fantastique énergie, déclenchant des tonnerres d'applaudissements.
Un moment de grâce intemporelle pendant le solo de guitare de "Wing", un court phrasé sur le futur ("Vous êtes le futur et le futur c'est maintenant") et la rockeuse punk saisit sa guitare pour un furieux "Rock'n'roll Nigger". "Be proud, be strong, be healthy, be free !"
Phénoménale Patti Smith ... Comment fait-elle pour nous offrir deux heures de pur bonheur, d'une intensité sans faille ? Sans doute un philtre, fait de musique, de poésie, de tolérance , de leçons de vie... Un philtre d'amour...qu’il ne tient qu’à vous de venir goûter sur les autres dates de sa tournée française.