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Critique d'album

Eiffel


Foule Monstre


(03/09/2012 - PIAS - Rock poétique français - Genre : Rock)
Produit par

1- Place de mon coeur / 2- Le même train / 3- Chaos Of Myself / 4- Foule monstre / 5- Libre / 6- Frères ennemis / 7- Chanson trouée / 8- Milliardaire / Stuck Inside the Pussy / 9- Lust For Power / 10- Chamade / 11- Venus from Passiflore / 12- Puerta del angel / 13- Death's dance
Note de 4/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Eiffel fait sa mue et contre-attaque. Virage réussi."
Nicolas, le 23/11/2012
( mots)

On les attendait forcément au tournant, eux les pestiférés qui s’étaient fait dégager comme des malpropres de chez Virgin et qui ont pourtant réussi, envers et contre tous, à récolter leur premier disque d’or chez PIAS avec le solide A Tout Moment. Pour tout dire, on sentait que le précédent album était un disque de survie et de résistance, Romain Humeau s’étant retranché sur ses fondamentaux en un réflexe de subsistance pour offrir une vision optimale, réfléchie et fignolée de tout le savoir-faire Eiffel, tout en textes poétiques surréalistes, tension exaltée et guitares au cordeau, et il est un fait que, clairement, A Tout Moment n’avait pas le droit de se planter. Rassuré par le succès public confortable de l’entreprise, les bordelais peuvent désormais sortir leurs crocs et s’offrir un disque de contre-attaque, tel un immense pied de nez à tous les magnats du music system qui n’avaient pas cru en eux en 2007. Le résultat, c’est Foule Monstre, et ça a d'ores et déjà commencé à cartonner. A raison.

Avec ce cinquième album, le constat est clair : Eiffel ne s’interdit plus rien. Ni de blinder ses morceaux de textures synthétiques (parler d’électro serait tout de même un peu exagéré), ni de partager le micro avec de multiples invités (dont Phoebe Killdeer et le désormais habituel Bertrand Cantat), ni même d’abandonner sporadiquement la langue de Molière pour des refrains en anglais ou en espagnol. Tout ces éléments auraient pu effrayer au plus haut point les fidèles de la première heure, mais très clairement, "Place De Mon Coeur", premier extrait dévoilé par la bande, a très vite balayé les appréhensions. Le titre est à l’image de l’album : costaud, enflammé et impeccable de verve mélodique. Si les guitares se font nettement moins entendre, si la rythmique devient plus lourde et entêtante, si la texture du son se densifie sensiblement, aucun sacrifice n’a en revanche été consenti sur les airs ni les textes, au contraire : ici, Humeau n’a qu’à piocher parmi ses plus belles trouvailles musicales, des bijoux de morceaux pop-rock torturés juste ce qu’il faut, cinglants, prégnants, aux envolées lyriques parfaitement calibrées. On pense à "Place De Mon Coeur" mais surtout à un quatuor en haute altitude, "Le Même Train", rengaine altière et textes ciselés avec beaucoup d’intelligence (et gros single potentiel), "Chaos Of Myself", essai de refrain english plus que convainquant et largement emballé par l’apport de la pugnace Phoebe Killdeer qui bouscule le titre en un long épilogue des plus jouissifs, "Libre", aussi sautillant qu’inoubliable dès la première écoute (quel refrain, là encore), et bien sûr "Lust For Power", siège d’une joute verbale de haute volée entre les potes Romain Humeau et Bertrand Cantat, ce dernier ayant signé les répliques qu’il scande de sa propre main. Ce passage de témoin entre les deux bordelais est d’autant plus symbolique que désormais Noir Désir est définitivement hors service : il revient donc aux seuls Eiffel de continuer leur combat pour la défense d’un rock français littéral et littéraire, même si on sent que la plume de Humeau se trouve passablement démangée par des tirades anglo-saxonnes qui pourraient, pourquoi pas, ouvrir son univers bigarré à une foule bien plus universelle. Mais nous n’en sommes encore pas là.

Là où Foule Monstre se démarque nettement de la moyenne, en dehors des incontestables réussites ci-dessus, c’est dans l’intérêt constant que ses autres morceaux suscitent. Dans ce registre, Eiffel a le choix des armes, et tout d’abord le verbe illuminé de son maître à penser. C’est un régal de se plonger dans les textes de "Chanson Trouée", d’étoiles qui filent un mauvais coton en armes d’attraction massive, d’El Dorado des méduses en Golgotha scrutant le monde par un judas, autant de juxtapositions absconses que l’on se prend à rechercher avec fébrilité tandis que le chanteur termine son ode dans des torrents de colère déchirante. Plus loin, les emprunts espagnols irradient "Puerta Del Angel" d’une chaude quiétude, tandis qu’à l’inverse le tempo assassin de "Frères Ennemis" aère le coeur du disque en un tourbillon punk revigorant. Et peu importe les arrangements : si de simples arpèges acoustiques suffisent à accompagner le très joli "Milliardaire", la bande n’hésite pas à tenter des expériences osées mais assez saisissantes, comme cette alliance entre sifflotements, beats, scratchs et nappes de violons qui respirent pourtant l’évidence sur "Foule Monstre". Même son de cloche avec les beats, les envolées de cordes et le piano sibyllin de "Venus From Passiflore", retranchant une certaine dose de noirceur à cet hymne baudelairien des plus romantiques. On gardera néanmoins une petite réserve sur ces nouveaux accompagnements qui se font parfois envahissants, comme sur "Chamade" qui aurait certainement gagné à se trouver sérieusement allégé en claviers.

A ceux qui hurleront au scandale face à cette version synthétique et passablement plus grand public d’Eiffel, on rétorquera qu’un deuxième coup d’oreille leur serait certainement profitable. Peu importe la forme que l’on donne à un morceau, peu importe l’intention qui l’anime (et dans le cas présent on ne saurait nier une certaine volonté de séduction des masses), ce qui importe et qui importera toujours, c’est la qualité du songwriting, la richesse et la profondeur des textes, le sens de la mélodie, l’esprit de la composition. Avec Foule Monstre, Eiffel, malgré son lifting dans l’air du temps, réalise un album de très haute tenue à côté duquel il serait dommage de passer, car que les choses soient bien claires : si l’on pensait que le rock francophone était mort avec le trépas de Noir Désir, on n’a jamais été aussi loin du compte. Au fait, Eiffel est en tournée en ce moment dans l’hexagone : vous savez ce qu’il vous reste à faire pour terminer l’année 2012 en beauté.

 

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