
Blackfield
Welcome To My DNA
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1- House Of Glass / 2- Go To Hell / 3- Rising Of The Tide / 4- Waving / 5- Far Away / 6- Dissolving With The Night / 7- Blood / 8- On The Plane / 9- Oxygen / 10- Zigota / 11- DNA


Le retour inespéré de Blackfield, en cet an de grâce 2011, avait tout  pour susciter une immense vague de plaisir chez les adeptes de Steven  Wilson et de sa monstrueuse production discographique. Car de tous les  side projects initiés par le frontman de Porcupine Tree (et il y en a),  sa collaboration avec Aviv Geffen s'est payée le luxe d'accoucher en  2004 et en 2007 de deux albums à la fois beaux et accessibles, simples  mais d'une finition absolument irréprochable, redonnant au rock lyrique  et symphonique ses plus belles lettres de noblesse. C'est donc sans trop  de méfiance et avec une certaine jubilation que l'on s'est jeté sur ce  troisième album, sans forcément prendre le temps d'observer ce qui se  passe actuellement du côté de Mr Wilson. Or parfois, il vaut mieux  temporiser afin de savoir à quoi on va s'attaquer, faute de quoi la  déception risque de poindre le bout de son nez. 
Sans aller jusqu'à énoncer le terme "déception" - on parle de Blackfield, que diable - force est de constater que ce Welcome To My DNA  ne se révèle pas aussi inoubliable que cela. Pas la peine de faire  durer le suspens plus longtemps, la raison de cette petite baisse de  forme est à mettre sur le compte de Mr Wilson lui-même, ou plutôt de son  absence. En effet, l'homme est de plus en plus surbooké, devant  s'écarteler entre Porcupine Tree  - dont le succès grandissant a induit  une tournée mondiale de près de 18 mois ; des projets musicaux de plus en plus  pléthoriques - notamment son futur double album solo et la formation de  Storm Corrosion avec Mickael Ackerfeld (Opeth) ; des rééditions qu'il  chapeaute lui-même - dont la récente remasterisation du Ghost On  Magnetic Tapes de Bass Communion ; et enfin une liste d'attente de  travaux de production qui va en s'allongeant - récemment Anathema et  Memories Of Machine, le side project de son compère Tim Bowness. N'en  jetez plus : soit le type est un no-life de la pire espèce, soit c'est  un insomniaque incurable, mais un tel rythme de travail n'est pas  humainement soutenable. Pas étonnant donc que ce nouvel album de  Blackfield ait été initié à la demande express d'Aviv Geffen, et pas  étonnant non plus que 90 % des compositions émanent de ce dernier. De là  à affirmer que Welcome To My DNA est un album solo de Geffen  avec un gros featuring de Wilson, il n'y a qu'un pas... qu'on ne  franchira pas, même si on serait bien tenté de le faire.
Donc  voilà : ce troisième album de Blackfield est indéniablement de bonne  facture, mais on reste à des années lumières des deux autres. Ici,  l'alchimie incroyable qui animait les deux hommes semble s'être  atténuée, leurs rôles respectifs (tant au chant qu'au niveau des  instruments) sont bien plus reconnaissables qu'avant, et l'homogénéité  de style antérieure fait place à des morceaux tantôt dans le plus pur  style Blackfield ("Rising Of The Tide", "Far Away", "Dissolving With The  Night" et surtout "Daddy's On The Plane", superbe mélodie aérienne  enveloppée dans son cocon de cordes cajoleuses), tantôt très  inhabituels. Si "Go To Hell" se laisse capter sans trop de surprise (à  signaler au passage une petite pompe sur le joli "God Bless The Child"  de The Pineapple Thief), on est en revanche plutôt secoué par le  puissant "Blood" qui égrène ses riffs impérieux sur fond de cornemuse  orientale, un morceau particulièrement réussi mais qui, pourtant, ne  colle pas à la tonalité du duo. "Oxygen", quant à lui, est un titre pop  totalement imparable, rythmé à souhait, mais qui fait montre d'une  facilité assez inhabituelle dans ce décors. A l'inverse, quelques bonnes  surprises nous attendent, notamment "House Of Glass" qui tire le  meilleur parti des superbes arrangements symphoniques de l'album. Eh  oui, il y a eu de l'avancement : finis les synthés, c'est désormais le  London Session Orchestra qui se charge d'emballer les envolées lyriques  du duo, et mine de rien l'orchestre apporte une vraie plus value au  disque. N'oublions pas le seul titre composé par Steven Wilson,  "Waving", une pièce absolument inouïe, embarquée dans des riffs  acoustiques secs que transpercent des piques de violon, réalisant de  plus l'exploit d'alterner plusieurs ambiances et plusieurs rythmes  différents. C'est en écoutant un tel morceau que l'on ne peut que  regretter le manque d'implication du binoclard à mèche dans ce projet.
Ainsi,  Blackfield , c'était mieux avant, c'est comme ça et on n'y peut rien.  Terminons ces lignes par une petite anecdote amusante : s'il est  indéniable que le couple Geffen - Wilson tire en grande partie sa  notoriété du leader de Porcupine Tree , on reste quand même estomaqué de  constater que Welcome To My DNA a réussi à se faire chroniquer  par Metal Hammer (!) tandis que les médias rock traditionnels ont encore  une fois boudé le groupe. Voilà qui en dit long sur les réseaux  critiques et commerciaux tout comme sur la façon dont les projets  musicaux parviennent à trouver un écho dans la presse. Bref, lisez  albumrock, et n'oubliez pas de vous repasser Blackfield I et II ainsi que Lightbulb Sun et Stupid Dream, les deux opus pop-rock de l'arbre. En souvenir d'un temps qui semble à jamais révolu...

























