
Mirador
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Alors que le successeur de Starcatcher (2013), soit le futur quatrième album studio de Greta Van Fleet, tarde à venir, le guitariste Jake Kiszka dévoile cette année l’opus inaugural de son projet parallèle, Mirador – les mauvais esprits diront que ceci explique peut-être cela. Ne frissonnons pas d’angoisse en spéculant sur la menace que ferait planer Mirador sur l’avenir de Greta Van Fleet : depuis 2023, ce side project a pu se faire connaitre en assurant à plusieurs reprises la première partie des concerts du vaisseau mère, preuve que les relations entre les comparses se portent plutôt bien. Néanmoins, la qualité de la musique proposée par Jake Kiszka et Chris Turpin pourrait bien fragiliser la place du combo sur son trône du rock revival.
Chris Turpin est originellement chanteur du groupe Ida Mae qui ouvrait les concerts de Greta Van Fleet depuis 2018, autant d’occasions pour faire naître une amitié entre les deux musiciens. Son chant est certes moins impressionnant que celui de Josh Kiszka, mais il est bien plus maîtrisé, évoquant immédiatement Jay Buchanan de Rival Sons, comparaison d’autant plus aisée à faire que les compositions sont écrites dans un style très proche des fils rivaux.
En effet, les amateurs apprécieront les échos à cette autre formation phare de la scène revival, aussi bien sur des titres hard-rock comme "Raider" et plus encore sur "Blood and Custard" à la guitare slide et au rythme affirmé, que sur des ballades comme "Dream Seller". Le parallèle vient enfin à l’esprit dans les phases les plus folk de l’album, de l’approche roots mais saturée de "Roving Blade" à "Ten Thousand More to Ride" qui fleure bon le sud profond (les claviers analogiques en plus).
Évidemment, Mirador ne peut qu’évoquer Greta Van Fleet, au point de rappeler à quel point le jeu de guitare de Jake Kiszka est au moins aussi important que le chant de Josh Kiszka dans l’identité sonore du groupe : "Ashes to Earth" et plus encore "Feels Like Gold" en témoignent, même si l’introduction et le solo rappellent à nouveau Rival Sons. Finalement, la force de Mirador est de chercher une place équilibrée entre ces deux formations, avec un certain talent culminant sur l’épique "Fortune’s Fate", épopée magistrale et sommet de l’album dont le solo et les orchestrations puisent chez Led Zeppelin – leur modèle à tous.
Cette musique très référencée n’empêche pas de beaux moments forts en personnalité. "Must I Go Bound" émeut par ses réminiscences celtiques, ses beaux développements électro-acoustiques et son chorus intense, de même que la conclusion "Hymnal I" saisit par son côté intimiste. Mirador est aussi le produit de la volonté du guitariste d’investir ses racines blues-rock, par trop contenue au sein de Greta Van Fleet : il s’y adonne de façon très classique sur "Heels of the Hunt", avec de touches folk plus intenses sur "Skyway Drifter", une composition relevée par un splendide final Kashmir-i.
Loin d’être l’œuvre la plus originale de la scène revival actuelle, ce premier album de Mirador n’en est pas moins brillant, tant ses nombreuses compositions mémorables dévoilent un potentiel immense déjà en partie actualisé.
À écouter : "Feels Like Gold", "Must I Go Bound", "Fortune’s Fate"