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Critique d'album

Foo Fighters


But Here We Are


(02/06/2023 - Roswell - Rock alternatif - Genre : Rock)
Produit par Greg Kurstin

1- Rescued / 2- Under You / 3- Hearing Voices / 4- But Here We Are / 5- The Glass / 6- Nothing At All / 7- Show Me How / 8- Beyond Me / 9- The Teacher / 10- Rest
Note de 3.5/5
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Note de 3.0/5 pour cet album
"Le magnum opus des Foo Fighters, ça ? À d'autres."
Nicolas, le 07/11/2023
( mots)

Paradoxe des paradoxes, nous voilà confrontés, à la rédaction, à un phénomène étonnant : un groupe de rock majeur - les Foo Fighters - vient de sortir ce qui semble se définir comme son magnum opus, du moins si l’on se réfère aux avis dithyrambiques d’une presse musicale en extase, tout en suscitant un intérêt certain couplé à une sympathie évidente de la part de l’ensemble ou presque des membres d’Albumrock. Mais voilà, la critique n’a pas suivi. Y aurait-il anguille sous roche ? But Here We Are est-il réellement aussi bon qu’on l’entend crié partout ? Et l’auteur de ces lignes est-il le mieux placé pour rendre un verdict, attendu qu’il a osé encenser (toutes proportions gardées, of course) un Medecine at Midnight certes frais et fun mais totalement iconoclaste ?

Car il est un fait que But Here We Are constitue la quintessence du style Foo Fighters, une quintessence rendue à nouveau possible par le drame que vous n’ignorez sans doute pas. La mort de Taylor Hawkins le 25 mars 2022, particulièrement brutale, a ému l’ensemble de la planète rock. Clairement, les Foos ne méritaient pas ça, en particulier quant on sait la place que tenait le batteur au sein de la formation. On ne va pas vous faire l’affront de vous retracer l’histoire du groupe, mais comprenez bien qu’à l’époque de There Is Nothing Left To Lose, il s’en est fallu de très très peu pour que Dave Grohl ne jette l’éponge et aille s’épanouir définitivement en tant que cogneur à temps plein chez les Queens of the Stone Age (Songs For The Deaf, quelqu’un ?), le perfectionniste qu’il est ayant été contrarié de devoir réenregistrer les partitions de William Goldsmith sur The Color and the Shape car mécontent d’un rendu final jugé pas à la hauteur - comprendre : pas à sa hauteur à lui. Pas facile d’abandonner les fûts à un cogneur moins bon, voire nettement moins bon que soi, n’est-ce pas ? Or Hawkins avait deux qualités essentielles pour maintenir l’équilibre des Foos : c’était un excellent batteur, presque aussi bon que son frontman (j’insiste sur ce point), mais c’était aussi un homme plein d’entrain et de joie de vivre, une qualité indispensable pour un Grohl qui, aussi étonnant que cela puisse paraître pour une rock star, a davantage tendance à s’épanouir dans le bonheur que dans le marasme, prenant en cela le contrepied, au hasard, d’un Kurt Cobain notoirement tourmenté. Grohl considérait Hawkins comme son frère, dans tous les sens du terme, ce qui en dit long sur la tragédie qui s’est produite : vous pouvez être certain que la mort de ce dernier a failli sonner le glas des Foo Fighters, et que même s’il ne l’a jamais avoué aux journalistes, Dave Grohl a sans doute très sérieusement songé à jeter l’éponge une bonne fois pour toute. Le titre même de ce nouveau disque, But Here We Are, vaut tous les aveux du monde : on a été meurtris, blessés à en crever, on a souffert, on en a chié, mais on est (quand même) là. Tu m’étonnes.

Faisant écho au paragraphe précédant, But Here We Are constitue en soi un véritable événement puisque c’est le premier disque depuis le séminal Foo Fighters (1995) sur lequel Dave Grohl tient intégralement le poste de batteur - et non, ce n’était pas le cas sur Songs For The Deaf puisque la charge était assurée par Gene Trautmann sur "You Think I Ain't Worth a Dollar, But I Feel Like a Millionaire" et “Go With The Flow”. Presque trente ans, donc, et à l’époque il faut comprendre que Grohl était encore perçu comme “le batteur de Nirvana” et qu’il a ensuite mis toute son énergie pour s’affranchir de cet héritage trop lourd à porter, un héritage qui le faisait passer pour un petit connard arriviste trop prompt à se jeter sur le cadavre du groupe qui l’a fait connaître pour pouvoir attirer succès et dollars en cascade sur sa personne. De l’eau ayant depuis coulé sous les ponts, et puisque ce souci d’image d’un authentique frontman ne peut plus lui être renvoyé au visage eût égard au succès que connaissent les Foos, on comprend qu’il ait de nouveau voulu endosser son habit d’origine, comme une sorte de retour à son point de départ après une longue révolution de trente ans autour de la sphère rock. Ici, et maintenant que ses déboires initiaux appartiennent au passé, il peut tout à la fois s’affirmer en tant qu’auteur-compositeur-interprète et en tant que technicien de haut vol. C’est aussi pour lui une manière de revenir à ses fondamentaux et de redéfinir ce qui constitue l’essence même des Foo Fighters, tel qu’il l’a conçue dès son origine - et là pour le coup il ne s’en est pas caché en interview. Bref, un contexte aussi lourd de sens ne peut que susciter la sympathie, et c’est bien compréhensible. À ce titre, nous aurions envie, nous aussi, de rejoindre les laudateurs, de crier notre enthousiasme pour But Here We Are et de placer Dave Grohl sur un piédestal pour avoir ainsi su redresser la tête après un tel malheur. Nous aurions envie. Mais non.

Ce n’est pas que l'album soit mauvais, loin de là, mais il ne paraît pas constituer l’alpha et encore moins l’oméga du groupe, des balises qui, soit dit en passant, sont limitées depuis leur établissement. On va vous la refaire une dernière fois, histoire de bien appuyer là où ça fait mal : Dave Grohl est bourré de qualités, il mène sa barque de manière admirable, il chante bien, il joue bien, c’est un gros bosseur, c’est un batteur exceptionnel (qualité jusqu’ici peu mise en avant chez les Foos), c’est un harangueur de foules hors pair, mais ce n’est pas un très bon songwriter. Il faut bien lui reconnaître de belles réalisations - quand même, d’ailleurs les setlists regorgent de tubes aussi bêtas que jouissifs -, mais ça s’arrête là : globalement, ses chansons ne cassent pas trois pattes à un canard. C’est souvent efficace mais tout aussi souvent téléphoné, pas très relevé, pas très remarquable. Moyen moins, quoi. Après c’est du rock péchu, gouailleur, marrant, décomplexé, et ce sont surtout ces qualités que l’on apprécie chez les Foo Fighters. À partir de là, et même si le contexte émotionnel dans lequel Grohl se situe ne peut qu’influer favorablement sur sa plume, il nous est difficile de crier au génie… et c’est là que certaines critiques excessivement positives en deviennent gênantes, voire embarrassantes. Revue de détail.

“Rescued” ouvre le bal de manière très classique, servi donc par une batterie qui dépote (sans être spécialement mixée en avant, et c’est tout à l’honneur de Davy), mais l’ensemble se révèle vraiment sans génie. On peut même trouver cette entame plus que faiblarde, d’autant qu’elle met en avant un tic vocal assez insupportable chez Dave Grohl : il est incapable de nuancer ses hauteurs de note. Toujours à râler sur ses fins de phrase, soit sur la même note tenue. C’est pire encore sur “But Here We Are”, un morceau tout aussi bateau à gros moteur qui fait du boucan sans la moindre grâce. Sur le refrain, tonton Dave force à chaque coup sur son organe exactement au même moment dans la mélodie. Je suis désolé, mais c’est ultra nase, c’est typiquement le genre de gimmicks qui a le don de me faire sortir d’un disque. Comme en plus on a déjà eu le droit à un “Under You” pas brillant, brillant dans son genre (mode majeur guidé par GPS), autant dire que l’entame de But Here We Are nous fait faire de gros yeux : c’est ça, le chef d’œuvre des Foo Fighters ? Really, man? Oh gosh. Mais vous vous en doutez, il y a mieux et même bien mieux.

Parce que mine de rien, Grohl sait aussi se montrer moins bourrin et télécommandé que quand il s’efforce de flatter à tout prix son auditoire. De la nuance, il en injecte à un “Hearing Voices” aux petits oignons et qui, pour le coup, renvoie davantage à un Echoes, Silence, Patience & Grace qu’à un Foo Fighters. Progression mélodique futée et progressive, chaud et froid alterné, exubérance et pudeur tout à la fois, jusqu’à ce petit fade-out en gratte sèche très bien amené, c’est fort et ça donne le courage de pousser plus loin. Grand bien nous prend : “The Glass” convainc tout autant en mélange acoustique-électrique, avec de la puissance mais aussi de la délicatesse, de la nuance, sans se départir d’une force de bon aloi. Ça marche, et ça marche même très bien. Question équilibrage, Dave Grohl a soigné son bébé avec un “Nothing At All” qui verse dans ce que l’homme sait faire de mieux : le crescendo. On se souvient encore avec émotion d’un “Let It Die” qui constitue sans doute l’exemple le plus qualitatif qui soit (Echoes, … encore, comme quoi, c’est un sacré bon disque). Ici, l’exploit ne se répète pas totalement mais le morceau demeure réussi, passablement furibard dans ses derniers retranchements et c’est ça qui est bon. Un petit moins sur la ballade vaporeuse “Show Me How” entonnée avec la fille de tonton Dave, Violet Grohl de son petit nom, c’est beau mais juste beau, pas formidablement admirable. Le titre n’en reste pas moins réussi et on ne va pas bouder son plaisir non plus. Hélas, ça ne va pas durer…

Si “Beyond Me” passe encore, vraie-fausse power ballade aux refrains aussi subtils qu’une charge de panzers dans les Ardennes (et malgré une entame tout en délicatesse, allez comprendre), le point de non retour est atteint avec “The Teacher”, beaucoup, beaucoup, mais alors beaucoup trop long. Vous avez sans doute remarqué qu’à Albumrock nous aimons le rock progressif, et qu’à ce titre un morceau de dix minutes devrait nous mettre en joie. Encore faudrait-il qu’il y ait matière à allonger ainsi la sauce, et ce n’est pas le cas ici. Attention, l’entame s’avère plus que valable, les couplets dépotent et la prestation de batterie impressionne tout du long, mais déjà les refrains ennuient, et la situation ne s’arrange pas vraiment quand arrive une coda, on va dire “nulle” (voilà, les mots sont posés), mais vraiment nulle, à laquelle s'enchaîne un bruitisme inutile qui bascule sur le premier couplet… euh, quoi ? Si si, Grohl répète exactement la même chose, ni plus ni moins, alors que le cœur de la chanson se suffisait déjà bien à lui-même. Mais le pire est à venir sur la longue digression “psychédélique” (guillemets ouverts) qui n’a rigoureusement aucun intérêt - et qui surtout n’apporte absolument aucune matière, et voilà que le titre s’achève dans un déluge de crépitements si atroces qu’on est obligé de le zapper avant de se casser les tympans. Procédé horripilant répété sur la pourtant douce mélodie du triste “Rest Now” adressé à Hawkins qui se voit littéralement ravagée par ce choix de production affreux. Tu parles d’un point d’orgue.

Donc voilà, nous ne nous joindrons pas au concert de louanges ayant accueilli ce But Here We Are qui ne manque certes pas de qualités mais qui pêche par une entame plutôt faible, une inconstance dommageable et, pire que tout, certains choix de mise en forme et de production qui gâchent des compositions sinon plutôt au-dessus de la normale pour les Foo Fighters, avec cette fois-ci un disque qui ne s’embarrasse pas de remplissage mais qui au contraire, à trop avoir à raconter - à déverser, pourrait-on dire -  se prend les pieds dans le tapis. Cet avis ne sera pas majoritaire, on s’en doute, mais il fallait que cela soit dit. On veut bien ouvrir le débat, comme à chaque fois, en commentaires…


 


À écouter : "Hearing Voices", "The Glass", "Nothing At All", "Show Me How"
 

Avis de première écoute
Note de 3/5
N’ayant pas du tout aimé les trois disques précédents, But Here We Are apparaît au minimum comme une agréable surprise. On y trouve les quelques singles entrainants attendus pour chaque opus des Foo Fighters (“Under You” en tête), mais accompagnés de quelques expérimentations bienvenues (“Show Me How” qui donne avec élégance dans une dream pop légère) et de compositions un brin plus aventureuses et engageantes que d’habitude, particulièrement dans le dernier tiers du disque qui rend un très bel hommage au regretté Taylor Hawkins (mention spéciale aux distorsions insondables de “Rest”). Tout de même quelques longueurs et des limites structurelles qui perdurent, mais un album au-dessus de la moyenne pour la formation de Dave Grohl.
Commentaires
Vivi, le 09/11/2023 à 17:35
Je suis entièrement d’accord avec votre analyse. Le capital sympathie de Dave Grohl a tendance à gommer ses compos faiblardes. Soyons honnête, aucun des disques des Foo Fighters ne tient la distance sur la longueur. Quelques pépites émergent ici et là sur chaque disque (Stacked Actors, White Lemon, Low, Monkey Wreck par exemple) mais aucun album n’est entièrement « bon ». Il n’existe d’ailleurs pas vraiment d’album de référence se détachant des autres.
MaximeLar, le 07/11/2023 à 21:02
Je ne sais plus qui disait que dans les Foo Fighters, "le meilleur batteur était au chant, et le meilleur chanteur, derrière la batterie", mais j'aimais bien cette formule. En revanche, il me semble qu'il y eut un autre disque depuis le premier FF où Grohl joue sur un album entier, à savoir l'excellent "Four On The Floor" de Juliette and The Licks
afterthegoldsrush, le 07/11/2023 à 09:15
"Dave Grohl est bourré de qualités, il mène sa barque de manière admirable, il chante bien, il joue bien, c’est un gros bosseur, c’est un batteur exceptionnel (qualité jusqu’ici peu mise en avant chez les Foos), c’est un harangueur de foules hors pair, mais ce n’est pas un très bon songwriter. " Complètement d'accord...J'adore le bonhomme mais j'ai toujours trouvé ses compo assez faibles , le syndrome aussitôt écouté, aussitôt oublié...Il m'arrive d'écouter quelques titres ...mais rien ne me fait lever un sourcil et j'arrête souvent avant la fin de l'album...Bon j'y jetterai une oreille quand même pour me persuader que j'ai raison ;) !! Bon, entendons-nous bien, dave Grohl est quand même plus doué que moi !!