Good Charlotte
Youth Authority
Produit par
"I had a nightmare, but I wasn't dreaming I ran outside to see, it's not 2003"
Ça mon bon Joel, c’est toi qui le dit. Parce qu’avec les retours de Blink 182, Sum 41, Green Day et ta petite bande, on peut avoir des doutes sur la décennie dans laquelle nous nous trouvons.
Rassurez-vous, vous pouvez reposer vos cartables sur le sol et retourner vaquer à vos occupations de jeunes adultes, nous sommes bien en 2016. Pourtant, ce sont les Good Charlotte qui nous reviennent avec ce single "40 oz. Dream", single précédant de peu la sortie de leur nouvel album Youth Authority.
Un retour sur lequel on ne comptait pas vraiment, tant les frères Joel et Benji Madden semblaient à bout de souffle à l’issue de la tournée de Cardiology, mais qui coïncide (comme de par hasard…) avec celui de tous les groupes de pop punk de notre adolescence, My Chemical Romance étant le seul à manquer à l’appel (bien qu’on ait cru le contraire quelques secondes en ce début d’été).
Les Good Charlotte n’ont jamais été les plus populaires de ce pentacle à 5 têtes qui gouvernait les cœurs rebelles des cours d’école au début des années 2000, et leur retour laissera sans doute beaucoup de monde indifférent, au contraire de celui de Blink 182 un peu plus tôt cette année. Mais 2016 sera placé sous le signe du pop punk, et franchement ce serait dommage d’en perdre une miette.
Revenons alors sur ce premier single (deuxième en réalité, mais "Makeshift Love" est passé si inaperçu que ça en est insultant). Single plein de second degré dans lequel les membres du groupe ironisent sur leur âge, le temps qui a passé depuis leur dernier album et la façon dont le monde de la musique a évolué. "40 oz. Dream" est accompagné d’un clip dans le même ton, complètement décalé, dans lequel les Good Charlotte se retrouvent être le dernier groupe du monde après que l’humanité ait entièrement disparu. Le côté décalé de la chanson aide à prendre un peu de distance avec les paroles, notamment le premier couplet : "Turned on the radio, it's so confusing. Rappers were singing and rockers DJ'ing. There's no guitars on the songs that they're playing". Puisque soyons honnêtes, si le rock est mort à la radio, les Good Charlotte n’y changeront rien.
"40 oz. Dream" est un morceau assez léger musicalement, même pour les Good Charlotte. Les parties de guitare sont le plus souvent acoustiques, pour donner à la chanson un petit côté roots. "Life Changes" et "Makeshift Love", qui le précède dans l’album, ressemblent plus à ce qu’on attend des Good Charlotte. Cependant, on ne retrouve pas la patte sonore de Good Morning Revival (difficile de considérer que Cardiology avait une patte sonore). Youth Authority a plutôt le goût d’un album de Simple Plan, comme si quelqu’un s’était trompé au mixage et avait appuyé sur le mauvais bouton.
Et ça pose problème tout au long de l’écoute. Les Good Charlotte n’ont jamais brillé par leur capacité à écrire des textes profonds et complexes. Mais la vacuité de leurs chansons se dissimulait plutôt bien sous un son un peu sombre et acéré. Dans Youth Authority, tout sonne superficiel et creux.
On touche le paroxysme du vide avec "Life Can’t Get Much Better" et son jeu de batterie digne d’un titre de Shakira. Pourtant, les Good Charlotte vont parvenir à se rattraper par moments, notamment en faisant appel à des icônes plus jeunes et plus dans le coup qu’eux pour les épauler en featuring. Kellin Quinn (Sleeping With Sirens) vient donc en renfort sur "Keep Swingin’", et Simon Neil (Biffy Clyro) vient donner du relief à "Reason To Stay", pour en faire l’un des meilleurs titres de l’album. Ce n’est pas la première fois que les Good Charlotte font appel à des noms plus connus et à la mode qu’eux pour se sauver, quand bien même ils viennent de groupes assez différents du leur. C’est comme ça que Matt Shadows et Synyster Gates (Avenged Sevenfold) s’étaient eux aussi retrouvés en featuring sur Good Morning Revival.
Perdu au milieu d’une marée de titres mi-tristes, mi-pathétiques, "War" est le seul morceau de Youth Authority sur lequel le groupe semble retrouver un semblant d’identité, en prenant en plus le risque de se tourner vers le hardcore (légèrement hein, ça reste les Good Charlotte). Mais cet effort passe vite inaperçu au milieu des complaintes répétitives de Joel Madden et des mauvais arpèges ultra remixés qui lui servent de trames sonores.
Youth Authority se traverse comme un désert et ne contient finalement pas de vrai gros morceau qui permettra aux Good Charlotte de revenir vraiment sur le devant de la scène. Mais ce nouvel album d’un groupe qui n’a de toute façon jamais été pris au sérieux fait intervenir un phénomène particulier : l’envie de s’y replonger est quand même là. Pas de façon volontaire, pas comme on se ressert avec plaisir une part de gâteau après avoir dévoré la première. Plutôt comme on ouvre un paquet de chips quelconque au milieu de la journée pour se caler un creux, sans que cela ne soit un vrai repas. On écoute finalement les Good Charlotte en 2016 pour la même raison qu’en 2006. Parce qu’on aime cette vacuité. Finalement, peut-être que rien n’a changé.
A écouter par nostalgie : "40 oz. Dream" et "War"