Interpol
The Other Side of Make-Believe
Produit par
1- Toni / 2- Fables / 3- Into The Night / 4- Mr. Credit / 5- Something Changed / 6- Renegade Hearts / 7- Passenger / 8- Greenwich / 9- Gran Hotel / 10- Big Shot City / 11- Go Easy (Palermo)
Si Interpol n'avait qu'un seul talent, ça serait celui de faire pleurer dans les chaumière en construisant ses titres sous forme d'un envol d'émotions progressif. Méticuleusement, depuis le début des années 2000, ces apothicaires modernes de la cold-wave sont fortiches dans leurs mélanges, et savent tâter de la fiole. Il y a eu remaniement dans l'équipe de laborantins, avec le départ malheureux du bassiste Carlos Dengler après Interpol, cela ne les a pourtant pas laissés sur les rotules, au vu des masterpieces sorties par après: ""All The Rage Back Home", "If You Really Love Nothing" en tête. Marauder tutoyait régulièrement le génie de Wolf Parade, donc le niveau est posé (haut). TOSOMB a été entièrement écrit durant le covid, avec chacun des membres du groupe disséminé dans l'Europe. La réunion mélodique aura-t-elle alors lieu ? C'est pas comme si on les attendait depuis 2018.
Y a pas à dire, on se frotte un peu les mains (les gants en latex) avant de s'attaquer à ce The Other Side Of Make-Believe, qui arbore les couleurs redondantes blanc-gris-noir-rouge du groupe. On s'installe presque dans une routine qu'on s'attend à expérimenter encore, à savoir un décollage dès le premier titre. Eh bien il n'en sera rien. L'intro de "Toni" est légère au piano (sur trois notes) et soutenue par une discrète basse et batterie. A 1 minute arrive le refrain qui est tout aussi timide que l'intro. Maybe que cela va se densifier par la suite ? Toujours non, le titre se traîne, même s'il se fraie un intermède de guitares dansantes à 3'20. Elle est où la lumière qui perce les nuages ? Le frisson (d'habitude) garanti ? Il débute sur "Fables", un peu tôt (à 1min 50) et n'est pas amplifié par la suite...
C'est comme s'il manquait un temps dans le mouvement. L'album a les ingrédients mais ça ne prend pas. Heureusement un peu plus loin "Mr Crédit" vient nous up lifter, c'est dans ses paroles: "Higher, I'll be the hand to lift you up higher". Ce titre austère au départ s'étoffe, s'approche d'abord en chuchotant, avec sa guitare en quasi pizzicato (pizzicati au pluriel?) pour ronronner glorieusement en fin de course. Yes."Something Changed" ne continue pas à faire changer les choses, ni "Renagades", "ni "Greenwich". C'est pas qu'on veut de la surprise à tous les titres, mais au moins quelque chose de suffisamment construit pour être lisible et porteur. Tout se délaie dans une soupe peu reconnaissable. C'est charmant des fois et ça vient se voisiner avec du Editors ("Gran Hotel"), ça a le calmant et lénifiant et pommadant de dEUS sur "Big Shot City". Et puis"Go easy" ira aussi molo, finalement comme le reste de l'album.
Tel le miroir de la couverture, avec sa tige de fer qu'on prend pour un "pied" de soutien, mais qui s'avère être un couteau qui ne peut pas du coup soutenir grand chose: cet album laisse présager de l'espoir mais se casse en bonne partie la gueule. Ni mauvais ni bon, The Other Side Of Make-Believe porte aussi bien son nom: il nous fait croire... et puis en fait pas vraiment. C'est sinueux pour pas grand chose, ça ne va pas jusqu'au bout, pour finalement nous laisser circonspects. L'ambiance est belle, les instrus sont même peaufinés on le sent, il y a un côté cinématographique, c'est bien mené... Et puis c'est tout. Un album qui a la forme de bande-son de fond.