Minus
The Great Northern Whalekill
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1- Cat's Eyes / 2- Black And Bruised / 3- Shoot The Moon / 4- Kiss Yourself / 5- Throwaway Angel / 6- Not Afraid / 7- Rip It Up / 8- Rhythm Cure / 9- Futurist / 10- Shadow Heart / 11- Weekend Lovers
Le rock’n’roll, ça commence parfois sur un malentendu. Ainsi la pochette du quatrième album de ces islandais intitulé The Great Northern Whalekill, ornée d’un cliché clinique exhibant l’imposante anatomie d’un homme atteint d’une surcharge pondérale carabinée. Le livret intérieur se complait à scruter les moindres replis de cet amas de chair flasque. Insulte à la frange obèse de la population de ce pays nordique ? Critique des affres de notre mode de vie contemporain ? Que nenni. La bio l’affirme, ce disque est en fait un violent réquisitoire contre "la politique catastrophique de l’Islande sur la chasse à la baleine. Alors que la grande majorité des islandais sont contre, une minorité au congrès fait perdurer cette atrocité." Diantre ! Et pour mieux véhiculer sa colère, le quatuor a opté pour un titre jetant un clin d’œil au Great Southern Trendkill de Pantera, bien qu’on imaginerait les texans autrement plus concernés par la fermeture des distilleries Jack Daniel’s que par le sort tragique des grands mammifères marins.
Ces prérogatives aussi insolites que louables ne doivent cependant pas occulter l’essentiel. Minus est un quatuor de rock sauvagement burné adepte des uppercuts sonores et des crochets décibéliques vicieux. Leur patrie d’origine et le thème principal de leur nouvelle réalisation comptent finalement bien peu, tant ce combo s’inscrit dans la droite lignée du heavy rock à l’anglo-saxonne. Le magazine Kerrang !, spécialiste du binaire testostéroné outre-Atlantique, ne s’y est d’ailleurs pas trompé en le couvrant d’éloges flatteurs. Jusqu’ici cantonné au rôle de chauffeur de stade pour mastodontes bodybuildés (The Distillers, Amen, Biffy Clyro, The Eighties Matchbox B-Line Disaster, Metallica, Foo Fighters, Queens of the Stone Age, la liste est longue et explicite), Minus entend bien passer au premier plan dorénavant. Puissamment épaulés par le vétéran Joe Barresi (Queens of the Stone Age, Clutch, Kyuss, Bad Religion) qui connaît bien son sujet, les ferrailleurs venus du froid ont mis tous les atouts de leur côté, dressant des murs de guitares propres à faire fondre les calottes glacières au milieu desquelles ils ont grandi.
Choisissant d’ouvrir le feu au forceps, le groupe envoie ses meilleurs soldats d’entrée de jeu. "Cat’s Eyes", "Black And Bruised", "Shoot The Moon" et "Kiss Yourself" sont des charges de power rock méchamment caréné, quelque part entre Foo Fighters au plus fort de sa robustesse, Mastodon rompu aux joies de la linéarité et féroces déflagrations arides, façon Hermano croisé avec une rythmique hardcore. Servies par une production au cordeau, les guitares rauques mugissent de plus belle tandis que la batterie, mise très en avant, mène la danse aux quatre coins du ring, enfonçant l’un après l’autre les breaks assassins. Ne tentant pas de jouer la surenchère, la voix de Krummi se contente d’invectiver ses comparses, tel un Scott Weiland attentif derrière ses Velvet Revolver. Passé cette batterie de titres musclés, le quatuor se prend à tourner de plus en plus en rond. L’énergie demeure, quelques bonnes idées surgissent ça et là (le feu nourri de "Not Afraid", les accents martiaux de "Futurist"), mais les riffs se ressemblent dangereusement d’une plage à l’autre. Il manque le doigté d’un Slash, les fulgurances d’un Josh Homme, quelques refrains qui font la différence. A trop se reposer sur une production efficace qui ne fait pas tout, Minus en a oublié le plus important : affûter son style, creuser sa différence car la puissance seule ne suffit pas, même dans la catégorie poids lourds. S’il ne nous détournera pas des cadors US, The Great Northern Whalekill reste toutefois un choix tout à fait pertinent dans le genre apocalypse mineure.
L'album est intégralement écoutable sur la page Myspace du groupe : http://www.myspace.com/minus