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Critique d'album

Pink Floyd


The Wall


(30/11/1979 - Harvest - Prog éthéré - Genre : Rock)
Produit par Bob Ezrin, David Gilmour, James Guthrie, Roger Waters

1- In the Flesh? / 2- The Thin Ice / 3- Another Brick in the Wall Pt. 1 / 4- The Happiest Days of Our Lives / 5- Another Brick in the Wall Pt. 2 / 6- Mother / 7- Goodbye Blue Sky / 8- Empty Spaces / 9- Young Lust / 10- One of My Turns / 11- Don't Leave Me Now / 12- Another Brick in the Wall Pt. 3 / 13- Goodbye Cruel World / 1- Hey You / 2- Is There Anybody Out There? / 3- Nobody Home / 4- Vera / 5- Bring the Boys Back Home / 6- Comfortably Numb / 7- The Show Must Go On / 8- In the Flesh / 9- Run Like Hell / 10- Waiting for the Worms / 11- Stop / 12- The Trial / 13- Outside The Wall
Note de 4/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"Que reste-t-il à dire sur cet album?"
Pierre D, le 28/01/2012
( mots)

Une chronique de The Wall aujourd'hui ça n'a aucun intérêt. Ce disque de Pink Floyd a été analysé et disséqué, mis en scène au cinéma et sur scène, renié et joué en intégralité, il n'y a donc pas vraiment lieu de donner des arguments en sa faveur ou à sa décharge. C'est pourquoi personne ici n'analysera l'album chanson par chanson, de nombreux sites sont dédiés à cette tâche et ils s'en acquittent généralement de manière satisfaisante. Retracer l'histoire de l'album? Inutile, des articles ont été écrits sur le sujet et en cas de flemmardise aigüe l'article de wikipedia.org est très complet. Évidemment il sera nécessaire de faire quelques incursions dans les thèmes précités mais dans l'ensemble il vaudrait mieux que l'histoire de Pink Floyd et du processus de création de The Wall vous soit déjà familière pour tout comprendre aux (trop) longs développements qui vont suivre. Nous allons nous intéresser à la place qu'occupe The Wall dans le corpus floydien. L'hypothèse est la suivante: The Wall est l'aboutissement d'une logique poussée jusqu'à son extrémité la plus absurde. "Pris dans une acception large et diffuse, "absurde" peut être employé pour caractériser des œuvres littéraires qui témoignent d'une angoisse existentielle, celle de l'individu égaré dans un monde dont l'ordre et le sens lui échappent" (Christophe Triau, maître de conférences à l'université de Paris-VII).

Depuis ses débuts, l'œuvre de Pink Floyd tend vers une maîtrise totale de sa musique. Sur les quatre membres originels (Syd Barrett, Roger Waters, Rick Wright et Nick Mason) trois sont étudiants en architecture. Ils sont ainsi initiés à des notions bien particulières: la construction, l'ordre, la proportion, la stabilité, l'espace. L'architecture en tant que discipline a pour objectif de concilier l'utilité, la beauté et la solidité de formes, d'espaces et de structures. Ces aspects sont au cœur de l'histoire interne du groupe puisque celui-ci, au fur et à mesure de son évolution, ira vers une maîtrise sans cesse plus poussée de la composition, du son et même du positionnement du son dans l'espace (avec l'utilisation des techniques les plus avancées de l'époque telle que la quadriphonie). La première période en compagnie de Syd Barrett est celle des tâtonnements. Le groupe se cherche et maîtrise encore assez mal l'équilibre entre ses velléités expérimentales et ses tendances pop (presque aucune chanson ne dépasse le format conventionnel des 3 minutes). À cette tension s'ajoute celle apportée par la folie de Barrett. Après l'éviction de ce dernier s'ouvre l'ère Gilmour. Les hésitations sont toujours présentes mais le groupe plonge plus profondément encore dans l'expérimentation. Les premiers essais sont marqués par un manque de cohésion et les albums Atom Heart Mother ou Meddle souffrent d'un déséquilibre flagrant entre les pièces phares de plus de 20 minutes qui occupent toute une face ("Atom Heart Mother", "Echoes") et les autres titres qui sonnent comme du remplissage. Les avis rétrospectifs des membres du groupe sont d'ailleurs édifiants: "I think Atom Heart Mother was a good thing to have attempted, but I don't really think the attempt comes off that well" (David Gilmour).
Il faut attendre la sortie de Dark Side Of The Moon pour que la maîtrise soit atteinte. Ici il n'est plus question de déséquilibre entre tendance pop et tendance expérimentale, les deux sont imbriquées, intrinsèquement liées l'une à l'autre, ce qui permet à l'album de bénéficier d'une unité qui faisaient défaut à ses prédécesseurs. Cet état de grâce rencontre un succès qui ne s'est pas démenti au travers des années puisque le disque est aujourd'hui l'un des albums les plus vendus au monde et il est resté dans le Billboard durant 741 semaines. Cependant le fruit arrivé à maturation porte en lui les germes de sa propre décomposition. En effet dès la parution de l'album on lui reproche justement cette trop grande perfection qui confine à la déshumanisation. L'erreur est humaine, la perfection inhumaine? C'est ce que semblent penser les détracteurs de Dark Side Of The Moon qui le qualifient de "disque juste bon à tester les chaînes hi-fi" (ce qui n'est pas infondé puisqu'il sert effectivement aux fabricants de chaînes hi-fi de référence pour éprouver leur système). La maîtrise accomplie serait porteuse d'aliénation de l'élément humain. Et d'une certaine manière c'est bien ce qui va arriver. Face au succès gigantesque de l'album Pink Floyd doit apprendre à gérer une notoriété qui l'oblige à jouer dans des stades toujours plus grands dans les années qui suivent. Le groupe se sent déconnecté de son public et lors d'un concert de 1977 un petit groupe de fans excité fait sortir Roger Waters de ses gonds et ce dernier finit par leur cracher dessus. C'est cet épisode du crachat qui constitue le point de départ du projet The Wall, Waters ressentant une séparation psychologique entre l'artiste et son public, un mur qu'il tente alors de concrétiser par le biais d'un album.

C'est ici que s'opère le passage de la maîtrise de Pink Floyd à l'obsession de contrôle de Roger Waters. Le bassiste voit le chemin qu'a pris le groupe et il décide de prendre les choses en main. Il contrôle d'abord The Wall en tant que projet et il travaille dessus avec le producteur Bob Ezrin (Lou Reed, Alice Cooper, Kiss) et non pas avec les autres membres de Pink Floyd. Il écrit le script (puisqu'il s'agit d'un opéra rock) avec le producteur tout en lui précisant bien "you can write anything you want. Just don't expect any credit". Comment aller encore plus loin dans la maîtrise après Dark Side Of The Moon? Comment avoir la mainmise sur la musique du Floyd? Waters répond à cette problématique avec l'idée d'un opéra rock (une œuvre rock qui comprend une trame racontée à travers plusieurs morceaux à la manière d'un opéra). En choisissant cette forme il théâtralise le travail du Floyd par le biais d'une trame où la musique est mise au service d'une histoire.
Quelle place reste-t-il à Pink Floyd en tant que groupe dans ce projet de Roger Waters? Aucune. Le groupe est exclu de la conception de l'album qui est accaparée par Waters, Ezrin et le dessinateur Gerald Scarfe. À l'intérieur de la structure théâtrale il reste peu de place pour les envolées de guitare de Gilmour qui se trouvent réduites au strict minimum (sa contribution la plus marquante est sans doute le solo sur Comfortably Numb). Pink Floyd tel que le monde l'a connu n'existe plus. L'exemple de Rick Wright est emblématique: ses parties de clavier sont ré-enregistrées pendant la nuit, un autre claviste est engagé pour travailler avec lui puis Wright est finalement licencié pour être ensuite employé comme musicien de session pendant les concerts qui suivent la parution de l'album (ce qui est quand même un peu la honte). La fin du groupe en tant qu'entité est assez logique, celui-ci ayant toujours conçu sa musique comme un tremplin pour des improvisations. Dans cette nouvelle forme théâtralisée où les compositions n'existent pas pour elle-même mais dans un but narratif il ne reste à l'évidence plus d'espace pour ce genre d'aléa et un groupe comme Pink Floyd ne pouvait pas survivre à une telle rigidité. Waters lui-même est rattrapé par sa création. L'histoire de The Wall développe le thème de l'aliénation au travers de son personnage principal, Pink, un musicien de rock qui devient fou. Son père est mort durant la 2nde Guerre Mondiale (comme celui de Waters) et ses traumatismes sont autant de briques dans le mur mental qu'il se construit pour s'isoler du contact humain, s'imaginant en dictateur fasciste menant ses concerts comme Hitler les parades à Nuremberg. Le concept de l'album prend naissance dans des évènements réels (la part autobiographique de la trame de The Wall n'a jamais été niée par son auteur), se voit appliqué un traitement artistique puis est rattrapé par la réalité lorsque Roger Waters laisse s'exprimer ses penchants dictatoriaux (il considère les autres membres de Pink Floyd comme de simples exécutant de sa volonté) et se laisse emporter par son obsession du contrôle. La logique qui sous-tendait la trajectoire de Pink Floyd tourne à l'absurde et il ne restera plus au groupe qu'à dépérir lentement.

Écrire un article sur The Wall en 2011 pose la question du rôle de la critique rock à l'heure d'Internet (lire sur ce sujet l'excellent article de NonooStar sur Inside Rock http://www.inside-rock.fr/Ci-git-la-presse-musicale-et). Comme dit en introduction, les informations sur les albums sont généralement disponibles facilement sur des sites tels que Wikipedia, le simple étalage d'érudition ne suffit donc plus à remplir un article sur un disque ancien tel que The Wall, ce que Rock & Folk n'a visiblement pas compris, cf. l'article de Jérôme Soligny paru dans le numéro 526 où ce dernier aligne les anecdotes connues depuis 40 ans sans se donner la peine de les mettre en perspective. Il paraît plus pertinent de tenter de proposer un éclairage que l'on pense neuf et pas totalement dénué d'intérêt pour toute autre personne que soi, tout en prenant soin de préciser auparavant les prérequis et postulats sur lesquels on se base. Mais bon, il n'est pas dit que le présent article y parvient.

Commentaires
Tontonmick, le 07/06/2017 à 10:52
Excellente chronique qui a rafraichi ma vision de cet album
Sbylm53, le 04/06/2017 à 09:54
Il est impossible de ressortir une chanson car elles s'entremêlent et la première appelle la seconde, etc... Une seule solution, se dépêcher entre chaque face de tourner le disque (oui, car les petits crépitements font partie du charme du vynil) puis se recaler dans son canapé et fermer les yeux.
SylvainFoulquier, le 04/12/2016 à 10:50
La deuxième partie de The Wall contient deux moments d'apothéose qui atteignent au sublime : le déchirant "Is there anybody out there ?" de Roger Waters, qu'on pouvrait imaginer repris par un orchestre de musique classique,et les solos de guitare de "Comfortably numb " dont la musique est entièrement composée par David Gilmour. Deux moments grandioses, auxquels viennent s'ajouter plusieurs brillants morceaux signés Waters ("Hey you","Nobody home"...). Intemporel.
Foulquier, le 06/09/2016 à 22:56
Les critiques citent surtout le célèbre "Comfortably numb", composé par David Gilmour, et ses sublimes solos de guitare, mais "The wall" contient d'autres très grands morceaux, écrits et composés par Roger Waters. Citons entre autres "In the flesh ?", "The thin ice", "Goodbye blue sky" ou encore le déchirant "Is there anybody out there ? "...La transposition scénique et cinématographique du disque est également impressionnante.