Tous les observateurs s’accordent à le dire : le groupe que nous nous apprêtons à voir en cette soirée de presqu’été au Bataclan ne ressemble plus vraiment à celui qui avait arboré la Grande Scène du dernier Rock en Seine, sous une pluie étonnamment automnale pour un mois d’août. Pourtant, il s’agit bel et bien de
Temples, quartette anglais dirigé d’une main de maître par James Edward Bagshaw, chanteur, guitariste, leader, producteur, compositeur, bouille d’adolescent boudeur malgré ses 27 ans bien trempés. Leur rock psychédélique et planant avait convaincu une bonne partie de l’auditoire présent ce jour-là, et leur première galette
Sun Structures d’achever les derniers suspicieux à temps plein, persuadés de voir un énième revival d’on ne sait plus quelle époque. Si le talent du groupe est proportionnel à la masse capillaire de ses protagonistes, la soirée s’annonce plutôt réjouissante.
C’est dans un premier temps à
Marc Desse, nouvelle coqueluche des Inrocks, qu’incombe la tâche de faire patienter une assistance qui semble plus occupée à s’enfiler quelques bières plutôt qu’à savourer une pop romantique qui, à défaut d’être vraiment originale, a le mérite de tenir convenablement la route. Joliment troussés, les textes évoquent à la fois mélancolie et angoisses, un véritable attrape-filles servi par un joli brun en perfecto. Sourire aux lèvres,
Marc Desse quitte la scène sous des applaudissements un peu plus nourris, et c’est sous les coups de 21h que les sbires de
Temples débarquent et jouent les premières notes de "Colours To Life", chanson-titre de leur premier album sorti en février dernier.
Plusieurs choses frappent d’entrée : le son, d’abord. On le sent, les anglais ont considérablement pris de la bouteille et se permettent quelques coquetteries psychédéliques de plus bel effet sans renier les lourds riffs qui ont également fait leur succès ("The Golden Throne"). La cohérence, ensuite, tant les boys semblent jouer les yeux fermés, de manière parfaitement concise, les nombreuses dates effectuées leur permettant de consolider une formation qui possédait déjà de solides bases. Enfin, les chansons, agréables sur platine, prennent un nouvel essor sur scène, transportant une fosse qui, timide dans un premier temps ("You’re too quiet !" lancera même James Edward), est littéralement transcendée par les guitares aériennes, les délicieuses nappes de claviers et l’ingéniosité de la section rythmique. "Sun Structures", "Prisms", "Keep In The Dark", les morceaux s’enchainent aisément et le concert décolle rapidement.
Et puis, il serait malhonnête de ne pas reconnaître que James Edward Bagshaw dégage une aura fascinante. Transfuge de
Marc Bolan avec une voix
lennonienne, taille de guêpe et gueule d’ange, l’homme à tout faire du groupe attire à lui tout seul bon nombre de regards, hypnotisés par les riffs qu’il lacère sur sa Gretsch ou sa Danelectro et par la grâce de son timbre vocal. Bien qu’encore un peu timide, il n’hésite pas à demander au public de crier encore plus fort entre deux chansons, ni de s’exprimer sur sa joie d’être à Paris, puisqu’évidemment, "
that’s always a pleasure to play here. We love Paris". Le groupe nous achève une première fois avec un "Mesmerise" d’anthologie, allongé de plusieurs minutes et déchainant la foule, avant de partir puis de revenir et de conclure par "Shelter Song" pour nous laisser pour de bon sans oublier de nous saluer une dernière fois.
Convaincant sur disque,
Temples nous a agréablement surpris sur scène, le Bataclan se révélant le théâtre parfait des progrès réalisés par le groupe qui nous a offert un show revigorant, élégant et puissant. A n’en pas douter, c’est toujours sur la Grande Scène du festival d’été parisien qu’on les reverra certainement bientôt, mais avec un horaire plus tardif. On prend les paris.
Setlist:
Colours To Life
Prisms
A Question Isn’t Answered
Sun Structures
The Golden Throne
Ankh
Move With The Season
The Guesser
Keep In The Dark
Mesmerise
------------------
Sand Dance
Shelter Song