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Shoegazing : spleen et onirisme par delà le mur du son


Maxime, le 09/07/2012

Précurseurs


Phil Spector
1958-1966
voir les coffrets : Back To Mono (2003) et Phil Spector Album Collection (2011)

On pourrait allonger à loisir la liste des ancêtres du shoegaze (revendiqués ou non), et on espère que ce parcours discographique livrera quelques clés décisives. Mais s'il fallait trouver une première pierre, une première chaise comme le disait John Lennon à propos du blues, nul doute qu'il faudrait aller chercher du côté du dingo new-yorkais. On trouve dans l'oeuvre du producteur mégalomane une vision de la pop et de la façon de la produire qui sera reprise dans des proportions différentes par la génération My Bloody Valentine, à savoir son fameux wall of sound. On a déjà beaucoup glosé sur l'affaire, résumons à grands traits : enregistrer en mono et à volume maximal violons déferlants, cuivres gargantuesques, guitares tonnantes, batteries grondantes, percussions entêtantes et choeurs tonitruants pour les fondre à égalité dans le mix. Objectif affiché : clouer l'auditeur sur place et donner à la pop la démesure d'un opéra wagnérien, Ronettes, Crystals, Righteous Brothers, Tina et Ike Turner soumis au joug du Gesamtkunstwerk. On pense évidemment à Kevin Shields et sa maniaquerie jusque-au-boutiste dans la confection du mur du son de Loveless, même si l'Irlandais nourrit des velléités expérimentales qui divergent quelque peu de l'efficience pop avant tout recherchée par Spector. Reste qu'avant d'être une histoire de gens timides les yeux rivés sur leur rangée de pédales d'effets, le shoegazing se singularise d'abord comme une certaine façon de considérer la production et de lui conférer une dimension esthétique, plastique, de premier plan. Il reste dommage que beaucoup de shoegazers aient trop oublié l'ambition hautement mélodique du Spector Sound pour lui préférer une obsession parfois néfaste pour les enregistrements camés du Velvet Underground et les bricolages savants de Sonic Youth.
Maxime


The Velvet Underground : White Light/White Heat
30 janvier 1968

L'influence du Velvet sur le rock alternatif et/ou indie étant comparable à celle de Black Sabbath sur le metal, c'est-à-dire immense, on ne s'étonnera pas que le shoegazing puise ses racines les plus profondes dans la chaux vive expectorée par le gang new-yorkais sur sa seconde réalisation. Devant les ventes décevantes du disque à la banane, l'armada se libère de la tutelle de Warhol, congédie Nico et s'apprête à pulvériser le mur du son. Bouclé en un rush de trois jours, WhiteLight/White Heat est un pur manifeste proto-punk. Ivre de sa collaboration avec La Monte Young, John Cale accumule les couches de guitares jouées à fond les amplis, braqué sur ses obsessions, Lou Reed se complait à célébrer la décadence urbaine de sa voix nasillarde, tandis que Moe Tucker cadence imperturbablement la machine, comme une locomotive lancée dans son immuable mouvement. Si le "Sister Ray" terminal préfigure les trips noisy les plus éprouvants que le rock ne manquera pas d'enfanter à sa suite, le groupe n'en oublie pas pour autant sa sensibilité pop, portée par le très beau "Here She Come Now" ou la morgue camée de "Lady Govida's Operation". La lumière crue se cache au fond du tunnel de cendres, les shoegazers retiendront la leçon et arpenteront le trajet, armés de nouveaux joujoux décibéliques.
Maxime


Cocteau Twins : Treasure
1 novembre 1984

Cocteau Twins n'est pas à proprement parler un groupe de shoegaze, pas non plus complètement un groupe de dream pop malgré des similitudes évidentes. Cocteau Twins est l'archétype du groupe sans étiquette, voguant au gré des époques entre le gothique, l'ambient, ou le post-punk mais sans jamais s'y amarrer franchement. Mais le fait est que le groupe de l’envoûtante Liz Fraser a ouvert des voies et mine de rien, peut s'imposer en influence commune de pléthore de courants. Treasure est le troisième album des Écossais et si l'ensemble de la discographie est remarquable, elle se résume entièrement ici. Le groupe a en effet poussé à son paroxysme l'esthétique gothico-dream et pour ainsi dire, l'a quasiment créé de toutes pièces. Si les arrangements et les compositions tissent l'écrin idoine pour leurs desseins, le soin tout particulier apporté aux aventures vocales de Fraser frappe le sceau de Cocteau Twins. Tournée en drones, boursouflée d'écho ou fluctuant en volume, la voix de la belle est l'héroïne incontestée de l'acte. Une héroïne mystique et stupéfiante, pleine d'intensité, qui grâce à ses lamentations transporte littéralement ce Treasure dans une dimension parallèle, délicieuse et exaltée.
Kevin


The Jesus And Mary Chain : Psychocandy
Novembre 1985

Jimi Hendrix fut le sculpteur du larsen, taillant dedans comme dans un bloc de matière brute. The Jesus And Mary Chain en sont les architectes, construisant des cathédrales sonores déchiquetées sur lesquelles trônent les chansons des Ronettes, enterrant les mélodies des Beach Boys sous un déluge de distorsion. Avec leur premier single Upside Down/Vegetable Man et l’album Psychocandy, les JAMC ont atteint l’équilibre parfait entre ambitions mélodiques issues de la pop pré-Beatles et attentats soniques. Ils sont les meilleurs car obsédés par l’approche de Phil Spector et de son Wall of Sound, et ne tombent jamais dans les écueils du shoegazing qui deviendra très vite de la musique planante et paresseuse. Malgré des allures d’extrémistes (concerts expédiés en un quart d’heure de larsen, sans un regard pour le public), le groupe des frères Reid conserve sur disque un carcan pop sixties (la cellule rythmique de "Be My Baby" des Ronettes y est déclinée à l’envie), lacéré par de pures agressions de guitares soutenant une voix d’ange sous amphétamines. Un corpus suffisant pour engendrer un mouvement tout entier, sans pour autant l’avoir désiré.
Pierre D


Spacemen 3: The Perfect Prescription
Septembre 1987

Difficile de savoir si les Spacemen 3 sont des précurseurs du shoegazing ou s’ils sont en plein dedans. D’un point de vue strictement temporel, ils se séparent en 1991, soit l’année de parution du Loveless de My Bloody Valentine et de l’apogée du shoegazing. Mais les disques de Spacemen 3 peuvent s’apparenter à du shoegaze pur jus, rapport à leur recherches quasi bruitistes et franchement scotchées à deux neurones, notamment sur leur premier album Sound Of Confusion. Et c’est un peu ça le problème avec Spacemen 3, même sur leur meilleur opus The Perfect Prescription, ça reste de la musique de drogués, Taking Drugs To Make Music To Take Drugs To avouait le titre de leur recueil de démos paru en 1990. Ils ont beau avoir sorti quelques grands morceaux ("Walkin’ With Jesus", "Come Down Easy"), leur œuvre semble sans cesse réclamer la transe immédiate. Malheureusement, un cerveau sobre a bien du mal à entrer directement dans un état second quand on lui envoie des chansons basées sur un accord répété en boucle agrémenté de feedback. Les Spacemen 3 sont cultes mais Spiritualized, projet monté par Jason Pierce après la dissolution du groupe, compose une meilleure musique.
Pierre D


Sonic Youth : Daydream Nation
Octobre 1988

La même année et le même mois où paraissait le Bug de Dinosaur Jr, les champions du rock bruitiste proposaient à la planète leur manifeste le plus abouti. Délaissant (partiellement) les torrents de larsens simplement anarchiques et les titres sans queue ni tête, Thurston Moore, Kim Gordon et Lee Ranaldo façonnaient de cinglantes pop-songs dynamitées par de vicieux soubresauts et des riffs toujours aussi étranges et schizophrènes. Premier succès des terroristes Sonic Youth chez Capitol, Daydream Nation, double album magistral et instantanément culte, émut en un instant les tenanciers de l'underground et mit à genou le milieu alternatif naissant, avec ses morceaux sculptés au gré de divagations live, sa simplicité mélodique et son extrême complexité de délivrance instrumentale et sonore. Trop déglinguée et agitée pour avoir pu s'associer au shoegazing, la jeunesse sonique a néanmoins marqué au fer rouge les anglais rêveurs accrochés à leurs pédales d'effet, ne serait-ce que dans la prodigieuse inventivité dont elle a fait preuve dans l'exploitation, sous toutes ses formes possibles, de la guitare électrique et de ses sonorités.
Nicolas

lire la chronique de l'album


Dinosaur Jr. : Bug
31 octobre 1988

Alors que les années 80 embarquaient la planète pop dans un ennui sans nom, la révolte indépendante se mettait à gronder dans l'ombre, investissant patiemment l'underground avant de contaminer durablement le paysage mainstream une petite décennie plus tard. Parmi ces groupes ostensiblement boudés par les médias, il y en avait un qui a pratiquement tout inventé à lui tout seul : power pop, bruitisme, indie, alternatif... shoegaze ? L'écoute de Bug, près de vingt cinq ans après sa conception, ne souffre d'aucune équivoque : J. Mascis et Lou Barlow ont ici semé les graines de toute la révolution alternative des années 90. Mais ils ont aussi apposé leur empreinte sur les shoegazers en associant des mélodies douces délivrées d'une voie naïve et des guitares vrillées et cherchant volontairement le chaos bruitiste, la saturation et les larsens outranciers ("No Bones" et "The Post" en représentant les exemples les plus représentatifs). Le Dinosaure aime jouer avec les pédales d'effet, même si l'histoire retiendra surtout l'influence qu'il a eu sur le grunge et l'émo. Et de fait, le rock des années 90 ne s'est pas joué uniquement aux Etats Unis dans la région de Seattle, n'est-ce pas ?
Nicolas
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