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Critique d'album

Frank Zappa


Bongo Fury


(00/10/1975 - DiscReet - Rock, jazz, avant-garde - Genre : Rock)
Produit par Frank Zappa

1- Debra Kadabra / 2- Carolina Hard-Core Ecstasy / 3- Sam With The Showing Scalp Flat Top / 4- Poofter's Froth Wyoming Plans Ahead / 5- 200 Years Old / 6- Cucamonga / 7- Advance Romance / 8- Man With The Woman Head / 9- Muffin Man
Note de 5/5
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Note de 3.0/5 pour cet album
"Deux marginaux pour le prix d’un"
Franck, le 06/09/2025
( mots)

Alors que les fidèles du guitariste moustachu espéraient une suite directe au tempétueux One Size Fits All1, c’est finalement un disque plus modeste – et presque opportuniste – qui voit le jour sur cette deuxième moitié d’année 1975. Objet singulier, ni tout à fait album studio ni véritable live (la frontière étant de toute façon brouillée avec un énergumène comme Zappa), Bongo Fury est en réalité un assemblage étonnamment cohérent de morceaux captés quelques mois plus tôt lors d’un concert au Armadillo World Headquarters d’Austin (Texas), agrémentées de quelques chutes issues des sessions de One Size Fits All. Il s’agit surtout d’un album marquant la collaboration (attendue) entre Frank Zappa et Don Van Vliet, alias Captain Beefheart. Les deux amis d’enfance, déjà complices sur l’imparable "Willie the Pimp" (Hot Rats, 1969), se retrouvent ici pour un disque qui a tout de la parenthèse récréative pour Zappa – au sortir de sa période la plus fructueuse – et du coup de projecteur bienvenu pour un Captain dont la carrière s’embourbe depuis son emblématique Trout Mask Replica (1969). Deux marginaux pour le prix d’un, réunis sous la bannière d’un Bongo Fury Tour au caractère exceptionnel !


Accompagné d’une partie des Mothers, les deux compères semblent d’ailleurs s’en donner à cœur joie à l’image d’une joute délirante opposant la voix rocailleuse et inquiétante de Captain Beefheart – particulièrement déchainé - et des cuivres intenables sur "Debra Kadabra", qui évoque par ailleurs la période jazz fusion – malheureusement révolue - du Grand Wazoo


Force est de constater que Beefheart s’intègre naturellement à l’univers zappaïen, injectant un supplément d’anarchie mélodique à l’ensemble (oui, c’est possible). Ses interventions à l’harmonica, volontiers approximatives (merci pour les fausses notes bien stridentes), ajoutent une rugosité bienvenue, tandis que son organe vocal, dotée d'une improbable tessiture s'étendant sur cinq octaves, s’accorde plutôt bien à la théâtralité revendiquée par les différentes compositions. Entre monologues absurdes mais traversés de satire et de poésie, et véritables décharges d’énergie brute, l’expérience sonne aussi libre que spontanée. Le tout est porté par la dynamique du live, retranscrite à travers une production assez irréprochable pour l’époque.


L’album adopte un style résolument blues, contrastant avec les précédentes réalisations de Zappa. Certains morceaux deviennent ainsi un peu plus prévisibles : "Poofter’s Froth Wyoming Plans Ahead", sympathique sans être mémorable avec ses élans country, ou encore "Advance Romance", parodie de love song qui s’étire sans grande conviction sur plus de onze minutes. Ce dernier, malgré son aspect autocentré, se rattrape grâce aux interventions vocales de Napoleon Murphy Brock et George Duke, ainsi qu’à un véritable numéro de batterie sur sa dernière partie. Les amateurs de Frank Zappa y trouveront tout de même leur compte, grâce à des passages nettement plus fulgurants : "Carolina Hard-Core Ecstasy", d’abord, où les effets de guitare se marient à des nappes de synthés bien senties. Le solo de guitare, fougueux et virtuose, s’entrelace avec la ligne de basse engageante de Tom Fowler pour atteindre un bel équilibre. Les chœurs et le retour en grande pompe des cuivres confèrent quant à eux une musicalité entêtante, compensant habilement avec les pitreries de Zappa et le caractère alambiqué du morceau.
En parlant de solo, "Muffin Man" se pose incontestablement comme un nouveau manifeste guitaristique de la part du maitre : une partition qui donnera du fil à retordre aux passionnés de six cordes et qui, à elle seule, confère corps et puissance mélodique à un morceau qui n'avait finalement pas grand-chose d’autre à proposer.


Moins réjouissant, Bongo Fury sonne aussi comme le clap de fin – cette fois définitif – des Mothers of Invention, déjà amputés de figures indissociables comme Ruth Underwood (la percussionniste ayant quitté le navire peu avant). Une page se tourne, marquée par l’arrivée de sang neuf, à l’image du jeune Terry Bozzio, petit prodige des baguettes qui succède à Chester Thompson et qui deviendra le cogneur attitré de Zappa jusqu’au début des années 1980.


Si Bongo Fury demeure relativement anecdotique dans l’imposante discographie de Frank Zappa, il n’en conserve pas moins une certaine saveur : celle de clore une époque – sans doute la plus fameuse de l’artiste américain – tout en concrétisant une collaboration pour le moins évidente avec Captain Beefheart, autre figure inclassable, et tout aussi allergique aux conventions.


 


A écouter : "Carolina Hard-Core Ecstasy", "Muffin Man"


 


1 Dans les notes accompagnant One Size Fits All, il était question d’un album à venir censé prolonger directement l’expérience. Un projet qui ne verra finalement jamais le jour.

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