
Animal Triste
Jericho
Produit par
1- AVE SATAN / 2- Rearview Mirrors / 3- Homecoming King / 4- Teenage Wheels / 5- River of lies / 6- Montevideo / 7- Jericho / 8- The Real Kanye West / 9- Love Crimes / 10- Sad Generation (with Happy Pictures) / 11- The Morning After


Après deux albums séduisants qui posaient les bases d’un rock sombre et puissant, les Normands d’Animal Triste délivrent un troisième opus encore plus fort en symboles, en mélodies lancinantes et en ambiances ténébreuses. Une orientation esthétique qui prend vie dès la très belle pochette de l’album inspirée d'une célèbre peinture de Bouguerau intitulée "Dante et Virgile", conviant un bestiaire à la fois riche et chaotique.
Prenant pour référence l’effondrement de la cité assiégée de Jericho, Animal Triste ne sort pas les trompettes mais bien les riffs abrasifs (la trinité composée de Darko, Sébastien Miel et Fabien Senay officie avec brio aux guitares) et les rythmiques relevées (assurées par Cédric Kerbache à la basse et Mathieu Pigné à la batterie) à l’instar de l’entame supersonique "Ave Satan" qui traverse l’enfer à toute vitesse sous le chant profond et psalmodiant de Yannick Marais. Une ouverture qui marque les esprits pour un album à la fois varié sur le plan mélodique mais doté d'une grande cohérence.
Fiévreux et habité, le chant de Yannick Marais constitue une nouvelle fois l'argument principal de ce troisième essai. Le chanteur habille chaque titre d'une tension sourde, à l'instar d'un court "Teenage Wheels" mémorable et électrisant, qui menace d'exploser à chaque instant ou d'un "Love Crimes" qui file à tombeau ouvert dans un fracas saturé. Quand il ne se fait pas incantateur chamanique sur fond de lignes de guitares acérées sur "Montevideo", le chanteur n'est pas en reste du côté des ballades avec le superbe "Homecoming King" qui évoque la plus belle couleur mélancolique de Matt Berninger de The National.
Le groupe sait aussi compter sur ses invités pour briller. Bien loin de la pâle figuration ou du saupoudrage anecdotique, la participation de ses différents invités apporte un véritable plus à l'édifice. Le camarade Peter Hayes, frontman du Black Rebel Motorcycle Club et habitué des lieux, vient donner un coup de main sur "Rearview Mirrors" particulièrement cinématographique et habité d'une fougue crépusculaire, ainsi que sur "Sad Generation (with happy pictures)", touchante complainte qui trouve une ligne de fuite dans une seconde partie plus dynamique et lumineuse. Si la participation de Marina Hands est moins marquante sur le titre éponyme, sa construction autour d'une mélodie légère laissant place à une déflagration sonre finale est particulièrement efficace. Enfin, l'inévitable Alain Johannes dynamite de manière assez jouissive le refrain de "River Of Lies" avec une intensité sidérante et s'amuse sur la transe dansante de "The Real Kanye West" doté d'une ambiance électro-organique relevée par une guitare agitée comme un feu follet.
L'album se referme avec un titre acoustique majestueux "The Morning After" qui peut compter sur ses guitares évoquant Ennio Morricone et ses chœurs enveloppants pour accompagner l’auditeur vers de nouveaux rivages. Une conclusion réussie pour un album qui brille par son éclectisme mais bénéficie d'une qualité homogène. Respectant un cahier des charges sombre et envoûtant, Animal Triste signe son meilleur album et prouve une nouvelle fois que la scène rock française devra compter sur eux en 2025 et pour les années à venir.