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Critique d'album

Mötley Crüe


Theatre of Pain


(21/06/1985 - Elektra - Glam metal - Genre : Hard / Métal)
Produit par

1- City Boy Blues / 2- Smokin' in the Boys Room / 3- Louder Than Hell / 4- Keep Your Eye on the Money / 5- Home Sweet Home / 6- Tonight (We Need a Lover) / 7- Use It or Lose It / 8- Save Our Souls / 9- Raise Your Hands to Rock / 10- Fight for Your Rights
Note de 4/5
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Note de 2.5/5 pour cet album
"Qui l’eût Crüe ?"
François, le 02/08/2025
( mots)

La tradition philosophique aura beaucoup glosé sur la tragédie, laissant la comédie de côté, par choix (La naissance de la tragédie de Nietzsche) ou plus trivialement, parce que les textes à son sujet ont été perdus (La Poétique d’Aristote). Plus conséquents, Platon condamnait l’influence du théâtre sur la société athénienne, tandis que Rousseau souhaitait protéger Genève des acteurs en interdisant toute performance dans la ville calviniste. Bien que radicaux, ces derniers avaient compris que, comme le yin et le yang, Thalia et Melpomène ne sont pas rivales mais sont bien les deux faces d’une même pièce (de théâtre) : figurées par deux masques, l’un riant, l’autre pleurant, les muses de la comédie et de la tragédie se répondent et n’existent que l’une par rapport à l’autre.


Si Mötley Crüe a choisi de les représenter sur la pochette de son troisième album, ce n’est pas seulement parce que son titre renvoie effectivement à la dramaturgie (ce devait d’ailleurs être celui de l’opus précédent) ou pour coller à l’esthétique chamarrée du temps. Alors quelle signification donner à cette métaphore théâtrale ? S’agit-il d’un clin d’œil aux frasques tragicomiques de ses membres, qui constituent un contexte difficile pour le combo californien ? Au-delà des excès en tout genre qui concernent l’ensemble du groupe, de vrais problèmes découlent de l’addiction à l’héroïne de Nikki Sixx et les ennuis judicaires de Vince Neil causés par son accident de voiture mortel qui coûta la vie à Nicholas "Razzle" Dingley d’Hanoi Rocks. D’autres conséquences sont moins graves : après une tournée en compagnie d’Ozzy Osbourne en 1983, les membres de Mötley Crüe risquent leur place aux Monsters of Rock à cause de leur comportement qui provoquent des conflits avec Van Halen et AC/DC. Il est dit que le titre de l’album proviendrait de la lecture d’Antonin Artaud ayant théorisé le "théâtre de la cruauté" dans un essai de 1938 (Le Théâtre et son double) : la mauvaise conduite du groupe évoque plutôt l’empereur Héliogabale tel qu’il est mis en scène dans sa pièce de 1934, Héliogabale ou l’anarchiste couronné


Mais encore, cette métaphore théâtrale pourrait renvoyer à leur évolution musicale : Theatre of Pain est un album de l’entre-deux, à cheval entre le Metal et la mièvrerie pompier. Il symbolise l’évolution du Glam Metal qui sort de sa première période encore inscrite dans le Heavy (1983-1985) pour se diriger vers une esthétique beaucoup plus kitsch qu’incarnent les nouveaux venus Poison ou Cinderella. C’est à ce moment que le style vestimentaire et capillaire évolue vers le Hair Metal pur et dur, et qu’adoptent les membres de Mötley Crüe.


En réalité, ces deux aspects s’entremêlent : le groupe est en crise à cause de ses excès qui déteignent sur l’inspiration, notamment sur celle du compositeur principal Nikki Sixx, drogué au dernier degré et contraint à recycler quelques vieux titres. Par conséquent, cette évolution stylistique est sensible dans le contraste entre les deux faces de l’album : la première cherche clairement à capter l’air du temps, elle aguiche avec des titres qui correspondent aux attentes supposées du public, alors que la seconde est plus proche de l’album précédent - et elle est paradoxalement plus réussie.


Ainsi, l’entrée en matière se fait de manière très convenue sur "City Boy Blues", proposant du Hard US sans aucune prise de risque ni inspiration, quoique toujours moins ridicule que le boogie-blues-glam "Smokin' In the Boys' Room", sorte de mauvaise imitation du ZZ Top Heavy de la même époque (le solo favorise ce parallèle), qu’on retrouve également sur le tout aussi peu convaincant "Keep Your Eye on the Money". En outre, Mötley Crüe comble les attentes du public avec une power ballad sirupeuse, "Home Sweet Home", un titre devenu culte mais assez insupportable pour qui ne goûte pas à ce pain-là (mélodies niaises, son de piano et effets au chant insupportables).


Sur cette première partie, seul "Louder Than Hell" est assez remarquable pour être un titre Glam un peu plus méritoire, du type de ceux qui ornent la seconde face : "Raise Your Hands to Rock" reprend les canons du genre, en scandant "Rock", "Rock", ou en jouant sur le contraste arpèges/riff musclé que prisera Guns N’Roses. Surtout le jouissif "Tonight (We Need a Lover)" articule à merveille l’écriture Heavy et l’approche Glam. Aussi, les codes du Metal classique ne sont pas reniés, comme l’illustrent le midtempo "Save Our Souls", l’énergique et véloce "Use It or Lose It" qui renoue avec les racines priestiennes en modérant l’attaque, le très Accept-ien "Fight For Your Rights" (très  "Balls to the Wall " dans le riff comme dans les paroles).


Sans être dénué de bons morceaux, Theatre of Pain cède un peu trop aux (pires) sirènes du Metal US de l’époque pour être honnête, tant et si bien que même Mötley Crüe finira circonspect face à cet album et ne se montrera jamais aussi excessif par la suite – Girls, Girls Girls s’inscrit dans un registre plus proche du hard-rock en 1987. Pour le public par contre, c’est un nouvel adoubement au regard du succès de l’opus, qui confirme le statut du groupe comme tête de proue de la scène Glam californienne.


À écouter : "Tonight (We Need a Lover)", "Use It or Lose It", "Raise Your Hands to Rock", "Fight For Your Rights"

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