Agitation Free
Malesch
Produit par
1- You Play for Us Today / 2- Sahara City / 3- Ala Tul / 4- Pulse / 5- Khan El Khalili / 6- Malesch / 7- Rücksturz / 8- Music factory Live (Bonustrack)
Composer un ovni au sein de la scène Krautrock semblait impossible tant celle-ci était d’une originalité sans borne, et pourtant, les musiciens d’Agitation Free sont parvenus à réaliser cet exploit avec Malesch en 1972.
Formé en 1967, Agitation Free commence son histoire dans la seconde zone de la scène allemande, si bien que certains de ses premiers membres n’hésitèrent pas à quitter le navire pour des formations plus performantes, comme le batteur Christopher Franke qui rejoint le prestigieux Tangerine Dream ou Ax Genrich qui s’envole chez les improvisateurs de Guru Guru.
On n’aurait sûrement pas entendu parler d'Agitation Free si le Goethe-Institut n’avait pas décidé d’offrir un voyage aux musiciens du groupe, soit Michael Hoenig (claviers), Lutz Ulbrich (guitares), Jörg Schwenke (guitare), Burghard Rausch (percussions) et Michael Günther (basse). En effet, ceux-ci traversent le Proche-Orient, la Grèce ou encore l’Egypte, et reviennent de leur périple avec des sonorités orientales plein l’esprit. C’est cette inspiration qui fit de Malesch, l’album composé à la suite de leurs pérégrinations, une pièce unique en son genre.
Enfants du psychédélisme, les membres d’Agitation Free n’hésitent pas à s’engager dans des chemins space-rock et planants. Cette nature cosmique ressort sur l’expérimental "Pulse", principalement centré sur les claviers (un titre très Krautrock) ou sur le progressif "Khan el Khalili" (l’arrivée de la guitare est magistralement gérée). Seulement, ce registre est associé à d’autres genres musicaux et d’autres sonorités. Voyage dans le temps et l’espace, l’excellent "You Play for Us Today" nous entraîne dans une ambiance planante grâce à ses claviers, puis monte en puissance petit à petit par le ryhtme des percussions tribales et une guitare prenant de plus en plus de place – un véritable space-rock oriental.
Commençant au milieu d’un souk, où un homme chante plaintivement dans une langue orientale, "Malesch" développe une fresque à mi-chemin entre le rock psychédélique et le rock progressif, aidé par des divagations guitaristiques typiques de la fin des 1970’s et par des claviers voluptueux. Une touche prog’ qui ressort sur "Rücksturz", un final électrique qui fait parfois penser à Genesis par ses belles mélodies et son touché, et sur "Ala Tul", qui, suite à son introduction bruitiste, laisse place à des orgues baroques qui dansent devant les marimbas. Du reste, "Sahara City" est peut-être le titre qui renvoie le plus, mélodiquement et instrumentalement parlant, à l'Afrique du Nord, notamment sur l’introduction puisqu’il laisse ensuite l’auditeur planer dans un désert bruitiste et éthéré, jusqu’au final plus bluesy (mais saturé) et sûrement improvisé.
Au sein du maelstrom expérimental aux frontières mal définies que fut le Krautrock, Malesch figure très subjectivement dans mon panthéon personnel. Original, pertinent, varié, mélodique, il parvient à tenir réunis tous les fils de son entreprise complexe sans tomber dans les excès de ses camarades. Un album qui trouvera sûrement son public cinquante ans après sa sortie … Inch’Allah …
A écouter : "You Play for Us Today", "Malesch", "Ala Tul"