Do Make Say Think

Do Make Say Think est un des piliers d'une des scènes qui depuis quelques années est le théâtre d'une véritable révolution musicale, classée depuis dans cette bâtarde mais si intrigante catégorie nommée post-rock. Il s'agit de la scène de Montréal, où sont actuellement composées quelques pièces instrumentales parmi les plus belles que le rock n'ait jamais connu, si tant est que le terme convienne encore. Ces artistes sont pour la plupart signés chez un label en passe de devenir culte, Constellation.

Après trois albums quasi irréprochables, Do Make se surpasse et nous livre un recueil de musique contemplative et bouleversante, où il est très difficile d'y rester indifférent, où l'on en sort forcément changé. Les guitares, plus présentes que jamais, nous emportent par les mélodies envoûtantes qu'elles tissent le long de structures complexes et vertigineuses par leurs évolutions. Et quand les cuivres les rejoignent, l'émotion est à son comble : rarement la musique n'aura atteint un tel degré d'intensité, d'émotion et de détresse (je pense notamment au splendide titre d'ouverture "Fredericia"). Quelques fois, les pièces sont telles des contes tant les tons et les coups de théâtre se chevauchent, comme sur le titre "Auberge le Mouton Noir", où le truculent entrelacement de guitares du début se fait terrasser par un menaçant nuage de cuivre.

Et au final, on s'aperçoit que décidément rien n'est à jeter dans ce disque, pas même la moindre interlude qui paraissait si anecdotique à la première écoute, mais qui romprait l'hégémonie de l'ensemble si on l'ôtait. Non vraiment, sur les 9 titres, pas un qui n'aspire pas au rang de chef d'oeuvre. Do Make signe un disque qu'il n'est cependant pas aisé de maîtriser au début, par la longueur et l'originalité des structures qui peuvent rebuter, mais qui en vaut vraiment, vraiment la peine si on s'attarde dessus, au bout de multiples écoutes. Un des disques du début du millénaire, pas moins.