Glass Hammer
Dreaming City
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Il est loin le temps où les Etats-Unis n’étaient qu’une périphérie du rock progressif. Depuis les années 1990, les groupes sont légions outre-Atlantique, et Glass Hammer, sans être le plus connu, est un pilier de la scène américaine. Surtout, la formation du Tennessee témoigne d’une vitalité impressionnante en proposant régulièrement de nouveaux albums d’une qualité remarquable. En effet, Dreaming City sort un an et demi après Chronomonaut : c’est leur dix-neuvième opus (en comptant One). Et à nouveau, il s’agit d’un album-concept teinté d’heroïc-fantasy qui se faufile dans les pas du très yessien The Inconsolable Secret (2005). Toujours rehaussée par une pochette sublime mais bien sombre, leur musique demeure hautement recommandable tout en marquant une certaine évolution.
Certes, on retrouve un univers esthétique très référencé, mais personne ne peut plus les qualifier d’ersatz de Yes ou d’ELP (ce qui, en toute honnêteté, n’était pas absolument faux). D’ailleurs, de la bande d’Howe ou d’Emerson, il n’est point question ici. "The Watchman of the Walls" est un bel hommage à Rush où tous les instruments (particulièrement la guitare et les claviers) travaillent autour des sonorités et mélodies du trio canadien. On perçoit également du Jethro Tull sur "The Key" à travers un chorus de flûte imparable, pas mal de Kansas ("Cold Star"), des jeux rythmiques et tonals à la Gentle Giant ("Cold Star" à nouveau, dans la deuxième partie) … Le tout est évidemment bien assimilé et arrangé à la sauce du groupe pour un résultat infaillible.
Seulement, nous avons parlé d’évolution esthétique, et elle saute aux oreilles au moment même où le disque se lance sur votre platine. Le premier morceau, "The Dreaming City", est d’une puissance heavy rarement entendue chez Glass Hammer : de la guitare aux claviers en passant par la basse robuste et agressive, on est emporté dans leur démonstration de force. D’une réelle densité et variété musicales, ce titre constitue un moment fort de l’album.
L’autre changement, c’est la présence de passages électroniques proches de la synthwave, resucée des musiques de film des années 1980. S’ils étaient déjà présents dans l’album précédent, ils sont ici nombreux. Une riche idée à l’écoute de l’excellent "Terminus" qui est terriblement addictif.
Peut-être que Dreaming City souffre d’une certaine longueur, notamment entre "At the Treshold of Dreams" et "The Tower", où sont multipliées les pistes instrumentales planantes ou les titres moins aboutis, entre New Wave et musique électronique type 1970’s. Rien d’insupportable, mais une baisse de régime après un début en fanfare (les trois premiers titres sont excellents) et avant un final grandiose. Sans perdre à aucun moment la cohérence de l’ensemble, cette vingtaine de minutes atmosphériques auraient mérité d’être contrebalancée par un titre plus épique.
L’invitation au voyage, musical et fantastique, appelle une réponse de la part de l’auditeur. Il serait dommage que celle-ci ne soit pas positive tant Glass Hammer met du sien dans la réalisation de son ouvrage, avec une régularité qui lui fait honneur. Entrez, la cité onirique vous ouvre ses portes.