Green Day
¡Dos!
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1- See You Tonight / 2- F*** Time / 3- Stop When The Red Lights Flash / 4- Lazy Bones / 5- Wild One / 6- Makeout Party / 7- Stray Heart / 8- Ashley / 9- Baby Eyes / 10- Lady Cobra / 11- Nightlife / 12- Wow! That's Loud / 13- Amy
Soyons francs : il s’en est fallu d’un cheveu pour que cette chronique, et celle, à suivre, de ¡Tré!, ne voient jamais le jour. Le fait est que Billie Joe Armstrong, avec le premier volet de sa trilogie, a commis un disque bien en deçà de ses possibilités, se contentant de recycler sans génie une punk-pop raz des pâquerettes, vulgaire et plus que passablement inspirée, fruit d’une sorte de crise de mégalo cocaïnée visant à croire (et à faire croire) que la moindre de ses déjections verbales mises en musique s’apparentait à un chef d’oeuvre. Mais vu que le tâche était entamée, il fallait tout de même aller jusqu’au bout du projet de Green Day et voir si les deux albums suivants pouvaient s’extirper de l’indigence. Et de fait, le deuxième réquisitoire ne se révèle pas aussi catastrophique que cela.
Première bonne surprise avec ¡Dos!, Armstrong a décidé de changer de couleur. Après la verdeur punky imbécile du numéro 1, l’album orange va puiser dans une autre facette moins connue de Green Day, ou plutôt de Foxboro Hot Tubs : le garage rock. Mais si Billie Joe, toujours aussi fier de lui, a été jusqu’à affirmer que ce disque aurait pu devenir la seconde production studio de son side project potachon, la réalité le rattrape bien vite, car au sein de morceaux gentiment 50-60’s et d’une production un peu plus rêche surnagent encore bon nombre de titres estampillés Berkeley, chewing gum et bikinis. Pas vraiment punk-rock, pas entièrement garage, ¡Dos! surnage entre deux eaux sans réellement prendre parti, tout en réservant une matière largement plus consistante que sur son prédécesseur.
C’est la deuxième bonne surprise de l’écoute : ¡Dos! tient (à peu près) la route. Tempos ralentis, verbe plus contenu (la dose d’insanités ayant considérablement diminué), mélodies rafraîchies, Green Day se remet en selle sans déshonneur. Ceux qui ont apprécié le jouissif album de Foxboro Hot Tubs pourront se repaître sans crainte des "F*** Time" (oui encore un fuck, on ne se refait pas entièrement), "Stop When The Red Lights Flash", "Lady Cobra", et "Wow, That’s Loud!", avec toujours ce paradoxe Armstrongien porté par des morceaux à la couleur très rétro, rugueux, crissants, mais au rendu pour autant parfaitement moderne. "Makeout Party" va même au delà en se réservant des solos de gratte et surtout de basse assez réjouissants, et ça fonctionne bien, sans prise de tête. D’autres morceaux vont donc s’avérer plus classiques et californiens, versant power pop secouée ("Lazy Bones") ou punk énervé ("Ashley", "Baby Eyes"), et là encore, ça marche plutôt pas mal, voir même pas mal du tout pour "Ashley". Ajoutons à la sauce des titres un peu plus bâtards, le mid-tempo claqué "Wild One", le sautillant "Stray Heart" qui laisse une fois encore Mike Dirnt s’éclater à la basse, et la jolie balade électrique "Amy", soi-disant hommage à Amy Winehouse ... mais difficile de rapprocher le texte de la toxico défunte. Bref, ¡Dos! est bon.
Il est bon, certes, mais pas exceptionnel. Qu’il est loin, le temps juvénile de Dookie ou celui des bombes power pop du début des années 2000. Quand on s’attaque aux tubes, même constat : American Idiot en était blindé jusqu’à la moelle quand ¡Dos! empile les airs sympathiques mais pas foncièrement mémorables. A l’heure du mp3, pourquoi vouloir encore de la nouveauté alors que Green Day a déjà commis beaucoup mieux ? Une playlist axée sur Nimrod et Stop Drop & Roll!! se substituera avantageusement à ce numéro 2 et vous permettra de surcroît d’éviter la pantalonnade rappée "Nightlife", ce qui n’est pas du luxe. Accrochez-vous encore un peu : suite et fin des aventures de Green Day très bientôt dans ces pages.