Karfagen
Principles and Theory of Spektra
Produit par
Antony Kalugin, référence ukrainienne en termes de rock progressif symphonique, ne s’arrête plus : Karfagen vit à un rythme plus que soutenu (un à deux albums par an), tandis qu’il poursuit parallèlement une carrière solo tout aussi intensive (Marshmallow Moondust – 2020, Stellar Gardener – 2021). Entre ces deux opus, Principles and Theory of Spektra conclut une trilogie initiée avec 7 et Spektra, en revisitant des morceaux composés au moment de l’écriture des deux premiers volets (2015 – 2016) auxquels la très belle pochette fait référence (dans les couleurs comme dans les personnages représentés, on notera également un clin-d’œil à Pallas – The Sentinel - dans les vaisseaux steampunks fantastiques).
Musicalement très homogène et dans la même perspective esthétique des derniers albums en date, Principles and Theory of Spektra doit se prendre d’un bloc malgré sa division en six pistes et deux phases. Ainsi considérée, on peut apprécier une œuvre centrée sur un voyage musical aux mouvements légers et progressifs, fondée sur l’installation et le développement d’ambiances apaisantes. Au niveau du style, Karfagen reste dans sa veine symphonique inspirée par Genesis, la scène néo-progressive (les claviers synthétiques aidant) et surtout, par Camel qui s’avère être la grande référence mobilisée.
Chaque instrument trouve ainsi ses moments de gloire selon les besoins de la composition. "Levitations" fait la part belle à la guitare aérienne dans un morceau très camélien, tandis que "Hunter" est davantage dominé par les claviers au profit de nombreuses expérimentations sonores pour afficher toute la palette de cet instrument manié avec virtuosité par Kalugin. De son côté, "Calypso" dévoile l’expression d’une flûte pastorale agréable et cotonneuse.
Voyage fantastique et onirique donc, qui amène à des structures composites mais articulées avec fluidité. "Phantasmagoria" commence alors sur une longue introduction acoustique, puis propose des passages plus planants, sertis d’arpèges légers sur fond de rythme lancinant. Les nombreuses belles mélodies permettent de suivre aisément le propos. Le contraste joue également dans les scansions internes des titres, entre, par exemple, la doucereuse première partie de "Birth of a Star", un peu plus anecdotique, et un deuxième mouvement beaucoup plus enlevé.
Le tout se révèle limpide, cristallin, apaisé, reposant, une musique de fond dans laquelle on peut se laisser aller à rêvasser dans un moment oblomoviste. Sans offrir ici l’œuvre du siècle ni réellement innover, Kalugin maintient le cap dans son univers forgé depuis plusieurs années, faisant vivre une musique intemporelle et relativement accessible.