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Compte-rendu de concert

Gojira


Date : 21/08/2015
Salle : Z7 Konzertfabrik (Pratteln)
Première partie :

Expérience transcedante que ce concert de Gojira au Z7 tant l'ambiance tribale et la sombre musicalité enivrante du groupe exaltent les sens et plongent le spectateur dans un trip abyssal parfaitement exécuté. Plus qu'une grande sensation, un incroyable sentiment.

Etienne, le 01/09/2015
( mots)

A vrai dire, aucune appréhension ne jalonnait l'esprit avant ce concert de Gojira. Le talent du groupe n'est plus à démontrer: ses albums sont salués par la critique et le groupe rencontre un grand succès populaire outre-atlantique. Les landais avaient même enflammé avec brio le stade de France lors de la première partie de Metallica pour les 20 ans du black album. C'est donc dans une configuration beaucoup plus intimiste, au Z7 de Pratteln, que Gojira vient délivrer sa fougue scénique et pousser les guitares à fond. La salle est quasi comble, contrairement à leur premier passage dans la Konzertfabrik comme le fera remarquer Joe avec amusement et une pointe de satisfaction, et Gojira va littéralement la retourner autant que les esprits sortiront perturbés, secoués mais comblés quelques deux heures plus tard.

C'est une scène épurée, sans décors, avec une batterie surplombant une fosse compacte depuis sa plateforme qui se dévoile, noyée dans une épaisse fumée. En guise de préparation, une musique électronique planante, sorte de trip-hop suave et entêtant, accompagne l'attente du public et envoûte le spectateur berçé par les nappes sonores imprégnant la salle. Comme pour mieux apprécier le futur moment de folle énergie qui s'annonce, la sérénité est palpable au Z7 et c'est une formation toute de noire vêtue qui s'avance sur scène alors que les lumières s'éteignent et que le chant des baleines d'"Ocean Planet" sonne l'entame d'une plongée sauvage dans les eaux tumultueuses du répertoire de Gojira.

Les meilleurs morceaux de From Mars to Sirius structurent une setlist aux allures de best-of, regorgeant de pépites plus anciennes ("Love", "Wisdom Comes"), et voit un brutal "Heaviest Matter of the Universe" cotôyer un "Backbone" dantesque, déclenchant l'hystérie d'une fosse qui n'aura pas tenu en place très longtemps. C'est une ambiance hétérogène qui règne au Z7, où les mélomanes studieux et attentifs regardent avec amusement les amateurs frénétiques de basculements cervicaux réguliers et énergiques. La justesse des balances et de la puissance du groupe permet de jouir d'une écoute harmonieuse et chaque instrument voit son potentiel sonore décuplé pour un résultat d'ensemble monstrueusement efficace. Batterie tellurique, basse ronflante, guitares acerbées et chant prodigieux sont autant de points singuliers qui magnifient l'exécution millimitrée des morceaux du groupe. Joe a beau modestement affirmer que le groupe ne se considère pas comme technique, les fractures rythmiques et blastbeats de Mario, les riffs supersoniques de Christian et le doigté serein de Jean-Michel impressionnent de technicité.

Sans oublier le leader de Gojira qui a été particulièrement brillant pendant ces deux heures d'un show diabolique. Déjà par son chant absolument impeccable, sans aucune fausseté et délivré avec une sincérité désarmante, mais également par le charisme phénoménal qui l'habite. Toujours mesuré dans ses démonstrations scéniques vigoureuses, appliqué dans la performance et sensible dans ses interventions avec son public, le chanteur ne manquera pas de parler du groupe, de sa précédente venue au Z7 et du plaisir de se produire ici. L'introduction de "Wisdom Comes" résume assez bien l'ampleur du bonhomme: avant d'entonner un hurlement transperçant de puissance, c'est un Joe serein qui évoque la génèse du titre et son inspiration d'un discours de Bobby Kennedy au lendemain de la mort de Martin Luther King. Gojira n'est décidément pas un groupe de métal comme les autres, et si cet exemple peut paraitre anodin, c'est bien tout le processus d'écriture et le travail abattu qui transparait au travers de ce titre. Les thèmes des chansons de Gojira ont été affublés à tort du fardeau écologiste, résultat d'une volonté indécente de certains critiques à chercher une politisation obligatoire des paroles du groupe. Gojira poétise et abstractise les questionnements personnels de l'homme autant que le constat désastreux d'un monde à la dérive, et c'est dans cette part laissée libre que chacun y projette sa propre expérience, son propre ressenti, faisant de la musique de Gojira son éxutoire. Rigoureux et exigeant, le groupe le prouve donc à travers la composition et l'écriture mais encore plus dans les interprétations phénoménales dont il est capable.

Car si les Landais assurent un show précis, c'est une furie libératrice qui s'empare des coeurs et des corps lors d'un "Enfant Sauvage" pour le moins mouvementé. Son introduction ne compte pourtant qu'une note mais le rythme martial qui l'accompagne entraine fatalement une débauche d'énergie. Les cassures entre refrains et couplets sont comme des coups de massues assènés sans retenue et la sauvagerie des ponts instrumentaux achève un spectateur soufflé par ce déferlement de puissance. Gojira sait parfaitement équilibrer sa musique et la violence de certains titres ("The Axe", "Backbone") s'oppose aux éffluves distordues et lancinantes de la longue introduction de "Flying Whales", jouée dans sa version intégrale. C'est un fait, la chanson est le morceau emblématique du groupe: ses lourds accords plaqués et glissants, sa longue introduction planante et hypnotique, ses hurlements déchirants en fin de refrain structurent un propos réfléchi et obscur, critique d'un monde en perdition. Autant dire que ces deux morceaux ("L'Enfant Sauvage" et "Flying Whales" donc) sont  les moments clés du concert tant la communion du groupe avec son public atteint son paroxysme (mains cornues levées avec vigueur, chevelures valdinguées de gauche à droite et de haut en bas, cris éraillés au rythme de la grosse caisse et mouvements de foule, évidemment).

Les tappings harmonisés de Joe et Christian concluent ce concert tout bonnement exceptionnel sur un "Gift of Guilt" dévastateur, histoire de ne pas ternir la dernière impression musicale de cette soirée. Mais pour autant la dernière impression marquante reste l'image d'un groupe heureux de jouer, heureux d'avoir joué, qui prend bon nombre de photos avec son public et donne médiators et baguettes sans retenue. Une générosité scénique et une proximité rares qui font de cette fin de concert, un moment spécial, presque intime. On pourrait retenir l'ambiance ténébreuse, les progressions musicales transcendantes ou le solo de batterie furieux de Mario (à ce propos, ça fait du bien de voir un vrai bon solo de batterie) mais c'est l'image d'un groupe proche de son public, généreux et modeste qui reste gravée. Arrêtons de parler du plus grand groupe de métal français, parlons de Gojira comme un des meilleurs groupes de métal tout court. Leur prestation le prouve, leur musique le prouve, leur philosophie le prouve. La tournée va se poursuivre pendant quelques semaines avant de laisser au groupe le temps d'enregistrer son sixième album, dans son tout nouveau studio new-yorkais. Les attentes vont être grandes, très grandes même. Vivement 2016.

Setlist: 01. Ocean Planet / 02. The Axe / 03. The Heaviest Matter of the Universe / 04. Backbone / 05. Love - Remembrance / 06. L'Enfant Sauvage / 07. The Art of Dying / 08. Drum Solo / 09. Toxic Garbage Island / 10. Flying Whales / 11. Wisdom Comes / 12. Vacuity Rappel: 13. World to Come /14. The Gift of Guilt

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