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Folk n' Rock


Collectif, le 26/06/2015

Sun Kil Moon : Benji

Février 2014


On va vous passer le CV de Mark Kozelek, depuis Red House Painters jusqu'à Sun Kil Moon, de ses albums solos ou en collaboration, ça prendrait bien plus qu'un simple paragraphe d'introduction pour tout résumer. On va directement foutre les mains dans Benji, sixième album de Sun Kil Moon, l'un des plus beaux succès de l'année 2014 et surtout, l'oscar remporté haut-la-main de l'album le plus macabre de l'histoire de la folk. En fait, le pitch de Benji – car oui on peut parler de pitch, tant le tout est un long scénario élaboré – c'est que sous couvert de nous raconter des anecdotes de sa vie, Kozelek nous embarque dans des scénettes ou tout le monde meurt à la fin. Ou au début. Ou au milieu, l'important demeure que quelqu'un y passe. Et tout le talent du bonhomme fait que d'une collection de cadavres, s'épanouit un fier sentiment d'être en vie.


Kozelek exalte la vie de ses poupées mortes. Car avant de mourir, elles ont vécu, elles ont essayé du moins et le songwriting acerbe et pointu du bonhomme nous immerge dans les instants heureux de sa cousine, d'un serial-killer local, de seniors et de tout un tas de braves gens qui auraient pu croiser son chemin. Avec force détails, il dépeint des histoires sommes toutes banales, mais le simple fait qu'il les mette sous vitrine de la sorte les rend incroyablement attirantes. Qui plus est, de cette évidente banalité, il en coud de la poésie, il en tisse une élégance rare, sans pudeur, appuyée par sa prose lourde et son débit à la limite du parlé. Un chant Dylan-esque mais sans l'accent nasal, un Dylan fatigué, usé, qui n'a plus souri depuis des décennies. Et tout le talent de performer du bonhomme fait que de quelques bouts de phrases, il en fait un groove aussi pataud que réjouissant.


Dans tout les morceaux qui composent Benji, Kozelek n'hésite pas à personnellement se représenter. Le « I » (ou le « je » pour nos amis pas anglophones pour un sou) est plus que présent, il est le héros central de tout ça. Et même quand il ne l'est pas, il est biologiquement ou symboliquement rattaché au héros de substitution. Prenons l'exemple de "Carissa", premier morceau de l'album et condensé de sept minutes de tout ce que peut être Benji. Carissa, selon ses dires, est une lointaine cousine, enceinte à quinze ans, que Mark a plus ou moins perdu de vue, qui est devenue infirmière et qui est morte (oui, quand même) dans un incendie causé par l’explosion d'un aérosol dans une poubelle. Ça paraît rien comme ça, mais à l'image des autres titres, ça crée un charge émotionnelle substantielle. Et le tout mis bout-à-bout ça vous donne une heure à sentir votre petit cœur s'alourdir de façon exponentielle. Il n'y aucune légèreté dans Benji, ni dans les mots ni dans l'esthétique dépouillée au possible, aucune bouffée d'air, c'est juste le calme courant d'une rivière de cendres. À la limite, on peut déceler de l'humour dans "I Love My Dad", mais un humour noir, une ironie brute qui se fond très bien dans l'ambiance de l'ensemble. Comprenez bien cela dit qu'il n'y a aucun pathos, ce n'est pas qu'une tristesse alanguie, c'est la vie, la mort et tout le bordel, et tout le talent de songwriter du bonhomme, fait qu'on se sent aussi concerné que possible, comme si tout ces destins tragiques étaient aussi un peu les nôtres.


Et si toutes les histoires sont un peu les mêmes, même si les décors diffèrent, on a finalement aucune idée sur la véracité de tout ce qu'il nous raconte. Certains détails ne trompent pas, des détails géographiques, historiques qu'il relate et on aurait bien tort de douter de lui, mais après tout rien ne l'empêcherait de nous balader encore plus loin que les paysages secs de l'Ohio. Qui plus est, il est important de préciser que musicalement, les onze titres sont quant à eux drastiquement proches. Même lorsque Kozelek s'essaie maladroitement – mais là encore, avec un groove d'extraterrestre – au rap sur "Richard Ramirez Died Today of Natural Causes", on reconnaît les mêmes guitares, les mêmes mélodies derrière. Timides, comme témoins ahuris de toutes ces histoires, un peu les bras ballants et le regard vide. Puis il y a bien les cuivres de "Ben's My Friend" (qui lui n'est pas mort, vu qu'il s'agit de Ben Gibbard de Death Cab From Cutie, et qu'ils sont vraiment amis), qui confère au dernier morceau de l'album une tonalité pop étonnante et, avouons-le, assez légère. Oui, le dernier morceau, le râle d'agonie de Benji est d'une manière assez savoureuse, le petit rayon de lune de l'album, une belle chanson sur l'amitié et la compétition entre deux musiciens aux trajectoires qui se croisent. Il n'empêche que le tout est d'une simplicité hors-norme, une folk matinée de blues et Kozelek qui balance son venin ordinaire de vieil homme qui a déjà bien bourlingué. Et tout le talent du bonhomme, c'est qu'on le suivrait jusqu'à ce qu'il canne à son tour.


Kévin


Commentaires
zawx1, le 07/04/2017 à 01:04
Il manque quand même Will Oldham.
james, le 01/07/2015 à 14:05
Merde...et Alela Diane, une gonzesse et une guitare!!!
Tom, le 26/06/2015 à 21:41
Tout le monde ne peut pas y être! mais Elliott Smith quand même !! ???
Sharvey, le 26/06/2015 à 10:55
Quel taf ! Bravo a l'equipe ! On va etre habitue a voir debarquer 20 nouvelles critiques comme ca dans une journee ? Sinon sur le contenu les Shins et les Coral seraient peut etre vexe de ne pas figurer dans les 22, mais c'est vrai qu'ils sont plutot du cote rock de la frontiere. Bon y a plus qu'a ecouter tout ce qui ne l'a pas encore ete !