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Critique d'album

Queen


Sheer Heart Attack


(08/11/1974 - EMI - Elektra - Glam Rock - Genre : Rock)
Produit par Queen - Roy Thomas Baker

1- Brighton Rock / 2- Killer Queen / 3- Tenement Funster / 4- Flick Of The Wrist / 5- Lilly Of The Valley / 6- Now I'm Here / 7- In the Lap Of The Gods / 8- Stone Cold Crazy / 9- Dear Friends / 10- Misfire / 11- Bring Back Leroy Brown / 12- She Makes Me / 13- In The Lap Of The Gods...
Note de 4/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"La rampe de lancement idéale pour le décollage de la fusée Queen"
Maxime L, le 06/12/2018
( mots)

Au rayon des meilleurs albums de la Reine, on retrouve irrémédiablement A Night at the Opera,  voire Innuendo mais on ne cite jamais Sheer Heart Attack, du moins rarement en premier !


Il s'agit pourtant d'un disque pivot dans la discographie du groupe.


En effet, c'est à partir de cet album que le groupe commence enfin à s'affranchir de ses principales influences et par là même de proposer une musique plus accessible, à destination notamment des radios. Jusque là très marqués par les formations progressives de l'époque, Sheer Heart Attack permettra à Queen d'affirmer sa propre personnalité, et ce après un Queen II très réussi, mais qui n'a pas eu complètement l'impact escompté. S'il n'est pas parfait non plus, Sheer Heart Attack mérite pourtant une attention et une écoute toute particulière.


Nous sommes en 1974 et la dernière tournée américaine du groupe en première partie de Mott the Hoople se voit raccourcie. En cause : l'état de santé de May, victime d'une hépatite puis quasiment dans la foulée, d'un ulcère à l'estomac dont il devra se faire opérer. C'est une énorme déception de devoir rentrer au pays, et un vrai coup d'arrêt dans la progression de la formation. Il y a fort à parier que Brian May avait à cœur de rattraper le temps perdu et de marquer le disque de son empreinte après ces différents pépins. Car si comme souvent, l'empreinte vocale de Mercury est remarquable tout au long du disque, la prestation du guitariste sur cet album est tout bonnement extraordinaire.


C'est lui qui ouvre les hostilités avec un "Brighton Rock" qui démarre comme une fête foraine, et dont les premiers riffs sont envoyés à une vitesse supersonique. Les parties vocales de Mercury sont assez déconcertantes à la première écoute : il alterne voix de tête / voix de gorge et donne presque l'impression que ce sont 2 chanteurs qui s'affrontent. Déroutant mais efficace ! Le milieu du titre, avec la partie instrumentale de Brian May, (très longue et souvent interminable sur les versions live) a tout à fait sa place et ne sonne à aucun moment comme du remplissage. Une entrée en matière explosive et particulièrement réussie donc (une constante pour le groupe qui soignera toujours le premier titre de ses albums).


Les claquements de doigts de "Killer Queen" n'ont toujours pas pris une ride 40 ans plus tard. C'est baroque, fruité, et les paroles de Mercury sont toutes aussi acidulées "She keeps Moet and Chandon in her pretty cabinet", "perfume came naturally from Paris" . On flirte avec le kitsch, comme souvent avec les textes de Mercury mais c'est avant tout la créativité et l'ingéniosité qui en ressortent. Là encore, la Red Special de May fait des miracles, tant au niveau des solo de guitare que sur toute la rythmique de la chanson. C'est le premier véritable succès du groupe en tant que single (2ème au Royaume Uni et 12ème aux USA) et sera un vrai tremplin pour le groupe.


Le deuxième single choisi pour représenter cet album est le très glam/heavy "Now I'm Here". Ces premiers accords en palm-muting, le déferlement de la batterie puis "Le" Riff heavy rock, que n'aurait pas renié Tony Iommi de Black Sabbath, consitueront un des classiques du groupe (notamment lors du Live At Montréal dans une version survitaminée). On peut aussi mettre en avant sur ce disque le fabuleux triptyque "Tenement Funster " "Flick of the Wrist" et "Lily of the Valley" (encore 3 titres qui mériteraient d'être sur un des best-of du groupe). Des premiers arpèges en acier trempés de "Tenement Funster" au chant presque martial de "Flick of the Wrist" en passant par la légèreté de "Lily of The Valley", il y a mille idées à la minute, des refrains énormes, des chœurs en pagaille, et toujours exécutés à la perfection. 


Difficile de ne pas souligner non plus les deux ovni du disque ; à commencer par "Stone Cold Crazy" qui pose quasiment les bases du du speed-métal. Un titre repris très tôt par Metallica (qui s'en sort haut la main hormis sur les parties vocales... James Hetfield n'ayant pas la diction de Mercury). Et puis quel autre groupe que Queen peut nous proposer sur un même album "Stone Cold Crazy" d’une violence inédite à l’époque et ce "Bring Back That Leroy Brown" ritournelle jazz/ragtime complètement décalée mais flamboyante, à l'image de ce que fera le groupe sur les prochains albums ("Seaside Rendez-vous", "Lazing on a Sunday afternoon").


Sheer Heart Attack n'est pourtant pas parfait, la faute à 3 titres un poil plus faibles, "Misfire" (première compo de Deacon qu'on connaîtra plus inspiré ensuite), "She Makes Me" sans relief particulier, et "In the Laps of the Gods" est ses effets de voix un peu pompeux. L'album se termine sur une version "revisited" d'In the laps of the Gods absolument fabuleuse et sonne comme une caresse après autant de coups échangés, parfois même de violences subies, de strass, de couleurs et de paillettes dans les yeux.. 


Sheer Heart Attack n'est pas encore le chef d’œuvre escompté par le grand public mais est une rampe de lancement idéale pour la fusée Queen qui un an plus tard, sortira son chef d’œuvre planétaire.

Note de 3.5/5 pour cet album
"Il vaut mieux être Reine une heure qu'une vulgaire duchesse toute sa vie…"
Daniel, le 05/05/2024

Urgent : groupe rock cherche studio d’enregistrement avec département médical (ou l’inverse)

Sheer Heart Attack a été conçu à la fois dans la confusion et dans une étrange précipitation.

Durant le printemps 1974, la tournée américaine qui devait célébrer la parution de Queen II a été un fiasco. Frappé par un virus hépatique, Brian May est hospitalisé et le groupe doit renoncer à ses rêves de gloire.

En ces temps immémoriaux, les concerts venaient en support du vinyle et conditionnaient ses ventes. Queen II est un chef-d’œuvre absolu mais ne se vendra pas faute d’exposition publique.

Tandis que Brian May multiplie les séjours à l’hôpital puis les périodes de convalescence en raison cette fois d’un ulcère, Mercury, Deacon et Taylor se lancent alors en trio dans l’aventure d’un troisième album.

Changement de cap

Même si le propos contient encore quelques rares réminiscences vaguement progressives et/ou gothiques, Sheer Heart Attack sera essentiellement un album "différent".

C’est que Mercury sait humer l’air de son temps. Le trône de Led Zeppelin est déserté. Queen sera plus rock. Le glam triomphe. Queen sera plus glam (1).

Sheer Heart Attack sera rock et glam...

Pour faire "rock", il faut une pièce de résistance (en français dans le texte) qui pose son guitar-hero en majesté : ce sera "Brighton Rock". Évidemment, Brian n’est ni Jimmy ni Ritchie. Derrière les effets extravagants de l’Echoplex EP-3, May tricote des notes superposées, parfois vides de sens, qui manquent du génie de ses contemporains. C’est un solo d’ingénieur plutôt que de guitariste virtuose. Mais l’illusion est parfaite et le titre entre aussitôt dans la légende.

Pour faire glam, Queen doit débarrasser sa musique de ses oripeaux progressifs ou gothiques pour l’encombrer de paillettes et de préciosité. "Killer Queen" est le premier immense succès du quatuor. Mercury y impose ses tics d’écriture pour évoquer la vie passionnée d’une call girl, tout en jonglant avec des mots aussi charmants que "Moët & Chandon" ou "Marie Antoinette". Plus tard, il incarnera une "Lady Godiva" transgenrée en "Mister Farenheit" (ou le contraire).

On verse tout dans un shaker, on secoue et puis on regarde ce que ça fait…

Sous un artwork d’une laideur inédite – que penser de ces quatre gaillards étendus et couverts de vaseline ? –, Sheer Heart Attack a tous les aspects d’un sacré foutoir. A l’image de sa conception bordélique, partagée durant cinq mois entre quatre studios pour le trio Mercury – Taylor – Deacon et divers services hospitaliers pour May. On est ici très loin de l’extrême lisibilité de Queen II avec sa face blanche et sa face noire qui se répondent en miroir. Sheer Heart Attack manque clairement d’un liant, d’une idée maîtresse, d’un "style", d’un fil rouge ou d’une ligne directrice (selon les maîtres mots de chacun et chacune).

Comme la sortie de l’album avait été annoncée pour le 1er novembre 1974 (date qui ne sera finalement pas respectée), c’est dans la pagaille la plus complète que les enregistrements sont bouclés à la fin du mois d’octobre.

La presse ne sera pas vraiment commode. Rolling Stone accordera à l’album une note médiane en précisant : "J’ai cherché partout sur les deux faces de cet album quelque chose – n’importe quoi – de magnifique pour finir par me retrouver à brailler avec les oreilles vides…"

Outre les deux titres déjà cités, il y a pourtant quelques moments très forts.  

A titre d’exemple, "Now I’m Here". Il faut avoir vu Queen sur scène pour percevoir à quel point ce morceau avait déjà une dimension épique et opératique. Objectivement, après une intro mémorable, le titre patine ensuite un peu dans la semoule mais le souvenir d’un Mercury grimé en Arlequin bondissant de la cour au jardin en criant "Je suis ici" puis "Je suis là" rend cette séquence inoubliable.

On retrouve ce caractère démesuré dans l’intro de "In The Lap Of The Gods" où Roger Taylor pousse la note la plus aiguë du répertoire humain. Un batteur que l’on retrouve à la composition et au chant sur l’excellent (et très sombre) "Tenement Funster" dont le chorus résume l’attitude de toute une génération de petits rockers.

Le titre forme un triptyque avec le puissant "Flick Of The Wrist" et le délicat "Lily Of The Valley" qui nous ramène, le temps de cent secondes enchantées, dans le monde imaginaire que Freddie partageait avec sa sœur Kashmira.

L’attention s’égare ensuite dans une succession de titres nettement plus insignifiants (voire franchement moches comme cet abominable "She Makes Me (Stormtrooper In Stilettos)" de Brian May).

"Bring Back That Leroy Brown" est une heureuse parenthèse inattendue dans ce petit catalogue de banalités. C’est ce genre d’excentricité absolue qui démontre qu’un groupe est en mesure de se hisser au-dessus de la mêlée de ses contemporains. Contrebasse, banjolele, piano bastringue et percussions de ragtime band rivalisent de virtuosité pour un hommage au chanteur folk Jim Croce, décédé peu avant dans un crash aérien et auteur du fabuleux hit (posthume) "Big Bad Leroy Brown" (2). En 1974, le public rock a été pris à contrepied par cette démarche non orthodoxe. Mercury a accueilli les remarques avec sa réponse habituelle : "Je ne tiens compte que des critiques constructives. Les autres peuvent aller se faire foutre."

En clôture de l’opus, "In The Lap Of The Gods… Revisited" est une mercuryade assez banale supposée être chantée à l’unisson dans les stades. Cela dit, le titre est plus que pertinent dans son intitulé car, à ce moment précis, le sort de Queen se trouve en effet dans la main des Dieux (du rock).

Conclusion poétique pour ceux et celles qui croient au merveilleux

Et les Dieux (du rock) se montreront extrêmement bienveillants…

Conclusion alternative pour les autres

Malmené par la presse, méprisé par quantité de petits rockers qui ne comprenaient pas les étonnantes saillies qui rendent sa musique difficile à cataloguer, le groupe a tracé sa route, cherchant et trouvant sa rédemption sur les scènes du monde.

C’est que participer à un concert de la Reine transformait le sceptique en convaincu et le convaincu en prosélyte.

Sans les atours dont la vêtait la production de Roy Thomas Baker, la musique se dévoilait plus rude, plus rêche et plus pêchue. Moins belle aussi. Probablement. Mais Mercury, soutenu par son trio magique, avait ce pouvoir extraordinaire de venir chercher chacun et chacune d’entre nous pour l’emmener dans son monde et lui conter personnellement ses histoires (3).

Le lendemain de chaque concert, il régnait souvent une grande effervescence au rayon "Q" (peu usité) des magasins de disques. C’est comme ça (selon mon souvenir) que Queen a construit son univers. Brique après brique. Petit rocker après petit rocker.

Il n’y a pas d’intervention divine dans la conclusion alternative.

Le second t-shirt de ma vie a été un t-shirt Queen acheté à un camelot peu avant l’ouverture des portes. Un horrible pirate de contrebande. Tissu bleu ciel et logo orange. Cinquante ans plus tard, je me demande encore comment ce fichu bout de tissu a bien pu disparaître de mon existence. J’espère qu’il va bien. Il me manque.


(1) Le monde s’était découvert une passion dévorante pour le spandex, l’eye-liner, le gloss, l’ambiguïté et les paillettes. De Mud à T-Rex ou Bowie, en passant par les Glitter, New-York Dolls, Reed, Harvey, Sweet, Slade, Kiss, ...

(2) Par souci de charité, j’éviterai d’évoquer la terrifiante adaptation française du titre de Jim Croce.

(3) Je n’ai éprouvé ce même sentiment de "proximité complice" qu’avec Ronnie James Dio, Bruce Springsteen, Bruce Dickinson et, par moment, Biff Byford ou Fish. 

Commentaires
DanielAR, le 05/05/2024 à 13:41
Je classe ce titre dans la "succession de titres plus insignifiants". Après les enluminures gothiques de Queen II, un rock aussi basique m'avait un peu épouvanté. Je n'y retrouvais pas "mon groupe". Je peux comprendre qu'à titre "rétroactif", on puisse considérer qu'il s'agit du premier titre de speed metal de l'histoire (la reprise de Metallica a beaucoup contribué à cette légende urbaine). Mais il s'agit déjà du recyclage d'un vieux titre assez indigent imaginé par Mercury à la fin de sixties (c'est à dire bien avant Queen). Lorsque j'ai découvert "Stone Cold Crazy" sur l'album en 1974, je n'y ai pas retrouvé les "marqueurs" habituels que j'aimais beaucoup chez la Reine. Une fois encore, l'appréciation de l'art est un exercice très subjectif et je suis toujours très heureux de rencontrer des contradicteurs et des contradictrices. Merci pour la remarque !
Eily, le 05/05/2024 à 11:17
Daniel, pas un mot sur Stone Cold Crazy dans votre chronique ? C'est bien curieux !