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Critique d'album

The Rolling Stones


Their Satanic Majesties Request


(08/12/1967 - Decca - - Genre : Rock)
Produit par

1- Sing This All Together / 2- Citadel / 3- In Another Land / 4- 2000 Man / 5- Sing This All Together (See What Happens) / 6- She's a Rainbow / 7- The Lantern / 8- Gomper / 9- 2000 Light Years from Home / 10- On with the Show
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Les Stones en plein marasme"
Guillaume , le 27/07/2023
( mots)

A trop vouloir saisir le pouls musical du moment, les Rolling Stones finirent par se brûler les ailes. Depuis quelques albums déjà, on sent que leur ADN perd de sa force. Il s’est amalgamé avec succès à la pop élisabéthaine et au psychédélisme par petites touches. En 1967, les forces lysergiques ont pris possession de tout le "Swinging London". Tout le monde se met à l’acide et dès lors, les carcans de la Pop music explosent sous les coups de boutoir d’une créativité sans limites. Les nouvelles générations s'éclatent mais l'Establishment anglais, lui, voit d’un très mauvais œil cette libéralisation soudaine des mœurs. Les autorités veulent frapper un grand coup. Cette victime expiatoire sera les Stones. En février 1967, le magazine News of the world lance la campagne : "Drogues et Pop stars : les affaires qui vont vous choquer" sur les "supposés" trains de vie décadents des rockstars qui pervertiraient la jeunesse britannique (avec une fausse interview de Jagger…). Les secousses de cet article nauséabond se feront ressentir dans tout le pays. Au même moment, aux Etats-Unis, la chasse aux drogues est déclarée.


Quelques jours après l’article, la police coordonne une descente au domicile de Keith Richards dans le Surrey. Marianne Faithfull, la girlfriend de Jagger, est retrouvée nue sous un manteau de fourrure (avec une barre chocolatée coincée dans son intimité selon de fausses rumeurs), Mick est arrêté pour possession de plaquettes d’amphétamines et Keith pour avoir permis la consommation de drogues dans son domicile. C’est du pain béni pour la presse de bas étage qui fustigent ces parangons du "Sex, Drugs and Rock and Roll". De lourdes peines sont prononcées à l’encontre des "Glimmer twins". L’intelligentsia londonienne décrète alors un branle-bas de combat généralisé : au débotté, les Who enregistrent "Under my thumb" et "The last time" ; le très sérieux The Times publie un incroyable éditorial, prenant fait et cause pour les Rolling Stones. Devant ce tollé généralisé et le peu de charges requises, Jagger et Richards sont libérés après une nuit au trou (d’où émergera "We love you") et le versement d’une conséquente caution. D’agneau sacrificiel désigné par la société bien-pensante, les Stones deviendront le porte étendard d’une nouvelle génération en pleine rébellion contre l’ordre établi, alors en gestation - celle de mai 1968 -. Mais pour l’heure, en 1967, les Stones ont d'autres chats à fouetter. Et non des moindres. Outre leurs démêlés judiciaires, ils se séparent de l’indispensable Andrew Loog Oldham qui reprochait à ses poulains de trop se disperser. Brian Jones, l’ange blond du Rythm’n’Blues anglais se délite en  plein vol. Alcoolique en phase terminale, camé jusqu’au trognon, il n'est plus capable de jouer de la guitare. Encore moins de l’harmonica puisqu’il crache du sang lorsqu’il essaie de souffler quelques notes. Amputés d’une partie du socle de l’édifice stonien, ces satanistes de pacotille (lubie qui persistera le temps de trois albums) naviguent à vue durant les séances de Their Satanic Majesties Request, qu’ils décident de produire eux-mêmes. 


Cet album mérite-t-il l'opprobre des fans et de Jagger en personne ? Certains titres ne passent pas la barre en effet (malgré leur charme certain). Cependant il serait dommage de passer à côté de certaines perles qui ont toute leur place dans le corpus du groupe. 


L’esprit "Flower Power" irrigue manifestement la joviale "Sing this all together". L’innocence et la naïveté du chant de Jagger peuvent surprendre tant on était habitué au cynisme éhonté de ses rengaines, marque de fabrique du chanteur. Cette folk-song sans prétention s'égare dans une improvisation qui manque clairement de direction. Ce thème ressurgit via "Sing this all together (See what happens)" qui s’embourbe dans une jam léthargique sans fin. Il devait s’en passer des vertes et des pas mûres au Studios Olympic, dans lequel la faune noctambule du tout Londres venait y passer une tête. Illustration parfaite de l’adage : "Si vous vous souvenez des années 60, c’est que vous n’y étiez pas". Plus inquiétant encore, Bill Wyman parvient à placer une composition originale ("In another land") au milieu de toutes les compos Jagger-Richards ! C’est l’une des seules fois de leur carrière où les jumeaux maléfiques daignent accorder un quelconque crédit aux compositions de leurs partenaires (on se souvient des risibles mentions “Inspiration by” sur Black and Blue), qui provoquera le départ, en partie, de Mick Taylor. Pour la petite histoire, un matin de juillet 1967, Wyman, Watts et le pianiste Nicky Hopkins se retrouvent orphelins des Glimmer twins qui avaient manifestement des choses plus importantes à faire que d’enregistrer. C’est à ce moment-là que Wyman sort la bancale "In another land" de son chapeau, aidé par Steve Marriott des Small faces au chant. Convaincus par l’ambiance onirique de la mélodie, Jagger et Richards le retiennent pour la version finale de l’album.


Keith Richards vient transpercer les atermoiements léthargiques de ses comparses avec ce saignant "Citadel". Son riff monstrueux, grésillant d’infrasons électroniques, articule à lui tout seul le morceau, rappellant - en dépit de tout l’attirail hippie de circonstance - que les Stones restent toujours les Stones. "2000 man" renoue avec la pop pastorale entrevue sur Between the Buttons. Sur une suggestion de Charlie Watts (qui provoqua l’hilarité de Jagger… Ce qui en dit long sur son omnipotence créative), cette délicate ballade acoustique accélère brutalement sans crier gare pour en révéler le versant électrique où tout le groupe se lâche complètement dans un final hautement jouissif. Morceau le plus connu du lot, "She’s a rainbow" est une autre perle de l’album et aussi le dernier témoignage du savoir faire pop des Stones - et d’une certaine ingénuité sixties que l’on ressent dans les paroles -, que les modes et l’open tuning de Keith Richards viendront engloutir d’ici peu. On doit l’élégance raffinée du titre aux arrangements de cordes somptueux de John Paul Jones, futur bassiste de Led Zeppelin. Cette légèreté intemporelle vient se briser sur les récifs sinistres de l’impitoyable "2000 light years from home". Une merveille absolue de pop psychédélique menaçante, et totalement inclassable dans la discographie du groupe. Le Mellotron de Brian Jones gargouille des sonorités de l’hyper-espace, teintés d'onirisme, que vient tempérer la guitare vigilante de Keith Richards. Le seul titre de l’album qui bénéficie de la clémence de Jagger.


Censé être la réponse des Stones au Sergent Peppers Lonely Heart Club Band des Beatles, Their Satanic Majesties Request demeure un énorme plantage - malgré quelques fulgurances. La presse ne donnait pas cher de la peau des Stones qui semblaient complètement largués en cette cauchemardesque année 1967. Mais là où la plupart des musiciens auraient explosé en plein vol, ces derniers vont faire valoir leur inégalable instinct de survie et opérer un tonitruant come-back l’année suivante.


 

Commentaires
Arbitre, le 27/09/2020 à 21:42
Directement ou indirectement, les Stones ont eu aussi puisé dans le Pet sounds des Beach boys pour délivrer les sons particuliers de cet album. Il y a également un côté baroque, pas aussi évident que sur le Sgt Pepper des Beatles. Ceci étant posé, personnellement je retiens comme morceaux intéressants "Citadel" (du rock stonien à la sauce psyché), "In another land" (compo de Wyman, chantée par lui, mêlant comptine médiévale et rock stonien) et "2000 light years from home" (trip cosmique). A la même époque, et dans la même veine, il y a eu aussi "Dandelion" et "We love you" en 45t. Les hippies n'ont pu qu'apprécier, mais les fans des Stones les plus purs (friands de Blues/Rock) n'ont pas du tout aimé.