Thin Lizzy
Vagabonds of the Western World
Produit par Nick Tauber
1- Mama Nature Said / 2- The Hero And The Madman / 3- Slow Blues / 4- The Rocker / 5- Vagabond Of The Western World / 6- Little Girl In Bloom / 7- Gonna Creep Up on You / 8- A Song For While I'm Away / 9- Whiskey in the Jar / 10- Black Boys On The Corner / 11- Randolph's Tango / 12- Broken Dreams
Après deux albums aussi bancals qu’anecdotiques, Thin Lizzy sort enfin du bois, et l’année 1973 fit prendre au groupe une envergure beaucoup plus large. D’abord, c’est la sortie du single "Whiskey in the Jar", reprise d’un titre traditionnel qui lui permit d’assumer ses racines irlandaises et d’obtenir enfin un véritable écho. Ensuite, c’est la parution de leur troisième opus, Vagabonds of the Western World, illustré comme un comics-book ou un film de SF par Jim Fitzpatrick appelé à devenir le "Roger Dean" du combo. Cet opus a une relative importance dans leur carrière, puisqu’il s’agit non seulement du premier qui soit vraiment réussi, mais également d’un premier pas vers le son qui fit leur succès.
Album de transition s’il en est, Vagabonds of the Western World nous autorise à enfin parler de Thin Lizzy comme d’un groupe de hard-rock, même s’il maintient encore certains traits esthétiques du début de sa carrière. Bien sûr, l’approche est encore rugueuse et éloignée des envolées mélodiques aux twin-guitars, mais tout de même, "The Rocker" impose un riff tubesque, même si le solo perd en pertinence à mesure qu’il traîne en longueur sans réelle justification. De même, "Mama Nature Said" est un chef-d’œuvre émouvant du bottleneck endiablé qui intervient avec le maximum d’acuité. Mais encore, l’hendrixien "Gonne Creep Up on You", suintant l’inspiration du guitar-hero du chant aux effets de guitare, est lui aussi bien réalisé. Le groupe brille aussi sur "Little Girl in Bloom", une sorte ballade-slow à la lumière diffuse, plutôt moderne dans le son de guitare et la façon de poser les notes.
Moins convaincant quand il s’y adonne, le groupe garde son goût pour les longues pièces narratives comme "The Hero and the Madman", aux relents psychédéliques et à la rythmique assez entraînante, un exercice bien plus réussi quand il s’agit du raconter "The story of the vagabonds" sur le titre éponyme en début de face B, un récit plus ou moins épique musicalement parlant. Il manque aussi d’originalité sur "Slow Blues", un titre funk qui permet à Lynott de lancer des "baby" suaves et de déployer son chant chaleureux, avant de finir en revisitant du bout des doigts "House of the Rising Sun". Néanmoins, la seule fausse note est selon nous "A Song for While I’m Away", une chanson d’amour pastichant le kitsch de la variété des 1950’s, qui finit hélas par en posséder les mêmes travers (jusqu’aux violons) au point de ressembler à un chant de Noël désuet.
Certes, tout n’est pas abouti sur Vagabonds of the Western World, mais Thin Lizzy offre ici, pour la première foi, un album cohérent, très rarement à côté de la plaque, et parcouru de quelques éclairs de génie avec d’excellents titres. Les choses sérieuses peuvent commencer pour le meilleur groupe de hard-rock irlandais.
A écouter : "Mama Nature Said", "The Rocker", "Little Girl in Bloom"