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Compte-rendu de concert

Paul McCartney


Date : 05/12/2024
Salle : Paris La Défense Arena (Nanterre)
Première partie :

 

 
Daniel, le 13/12/2024
( mots)

Un rêve curieux et pénétrant… (I)

Toutes les gazettes en parlent : Sir McCartney, le célèbre explorateur sonique, a disparu au cœur de la Macronie. Il nous faut monter d’urgence une expédition de secours...

Accompagné du Colonel Cocx et du Docteur Futurity, qui comptent parmi les plus fins scientifiques rock belges, je passe rapidement en revue l'équipe de sherpas qui va transporter notre équipement. Les sacs de bière trappiste lyophilisée et les friteuses de campagne (modèle réglementaire "deux cuissons") n'échappent pas à mon contrôle.

La Macronie s'étend au Sud-Ouest du Royaume. L'indigène y parle un idiome proche de notre langue (si l'on excepte certains termes spécifiques comme chocolatine, périph', kanterbrau, baguette, Allez l’OM, maroille, peuchère, GIGN ou Pastis 51), recourt à un système de calcul simplifié (qui s'arrête avant septante), joue au football à quinze et, particularité unique dans le cosmos, est dirigé par la tribu qui a obtenu le moins de suffrages aux élections.

Bruxelles - Gare du Midi – 10h45 (heure locale). Après un dernier adieu à nos souverains, nos pairs, nos fiancées et nos courtisanes éplorées, nous coiffons nos casques coloniaux et embarquons dans l'Ouest-Express. Notre train file bientôt à toute vapeur vers la frontière où nous saluons brièvement les fiers gabelous qui défendent notre poste le plus occidental  

Nous nous enfonçons alors à toute allure en terra incognita en direction de Pairis…

Réveil et retour à une réalité plus contemporaine

Le jingle ferroviaire le plus célèbre du monde rock (les quatre notes magiques de Michael Bloumendil qui ont été empruntées par David Gilmour) me tire brutalement du sommeil et de mes stupides rêves coloniaux. La rame du TGV Bruxelles – Paris vient de s’immobiliser sur le quai n°9 de Paris Nord.

Retour à la réalité. Un temps grincheux. Une France sans gouvernement. Une ville qui peine à se parer pour Noël...

Cap sur la Défense Arena...

Quelques heures plus tard

Parmi les quarante mille spectateurs de la salle aux gradins vraiment vertigineux, il y en a au moins un qui pleure toutes les larmes de son corps. Je le sais. C’est moi. Paul McCartney interprète "Now And Then" avec son groupe de scène. Une version atomique (qui démontre au passage à quel point la composition tient merveilleusement la route). J’adore ce titre et l’émotion est vraiment trop forte (1).

Alors, une question récurrente de mon ami le Docteur Futurity me revient à l’esprit : pourquoi perdre des heures à se rendre dans un musée lointain pour contempler une peinture originale alors qu’il est possible de télécharger instantanément une illustration HD sur son portable ? Pour être confronté au génie qui est à l’origine du tableau. Ce génie n’est perceptible qu’en examinant l’objet en détail, dans ses vraies dimensions, avec sa peinture craquelée et ses coups de pinceau trop marqués.

C’est qu’en prenant la peine de "voyager vers" une œuvre que l’on peut espérer approcher le mystère de sa création. Et, parfois, on y découvre des clés de lecture nouvelles qui récompensent tous les efforts de patience qui ont précédé.

Il en est en musique comme en peinture. Et Paul McCartney est assurément un génie (2). A son corps défendant mais un pur génie. C’est à dire un créateur qui se démarque de façon exceptionnelle de ses contemporains par des aptitudes musicales hors du commun.

Le rock a engendré des kyrielles de façonniers, une plâtrée de petits maîtres et quelques rares héros. Mais peu de génies absolus. En extrême résumé, si on efface Brian Wilson et Paul McCartney du tableau, il ne reste (quasiment) personne.

Alors, pour un vieux rocker qui était déjà là sur Terre en 1958, quand les Quarrymen ont enregistré leur première composition originale ("In Spite Of The Danger", chantée à l’origine par George Harrison), voir cet être humain octogénaire – en pleine forme – interpréter "Now And Then" sur scène (c’est à dire un titre recomposé avec talent et respect soixante années plus tard) est un moment exceptionnel dans une vie.

Mené de main de maître par ce très jeune vieil homme, élégant, portant beau, farceur et faussement modeste, qui orchestre son monde avec enthousiasme, talent, rigueur et brio, le spectacle  va décliner "old songs",  "new songs" et "in between songs" pendant deux heures et trente minutes. Loin d’une vaine démonstration de juke-box (3) qui passerait en revue quelques singles nostalgiques, Paul McCartney offre à son public un vrai concert avec son intro, ses moments apaisés, ses envolées, ses confidences en solo, ses titres obscurs, ses explosions d’énergie et son immense bouquet final, par moment bardé de flammes et d’explosifs dignes des adieux de Kiss.

La set-list marie Paul McCartney en solo, les Wings, The Beatles et l’incunable de The Quarrymen déjà évoqué plus haut. Le plus fascinant est que l’ensemble, parfaitement homogène, sonne avec une absolue contemporanéité tant le groupe est soudé, actuel, "totipotent" (4) et supérieurement brillant. Le résultat, supporté par un light show mortel d’imagination et de fantaisies psychédéliques conduites par une intelligence artificielle à son meilleur, est autrement plus abouti que la tournée 2001 – 2002 (5).

Comme savait le faire l’unique Brian Wilson en concert, Paul McCartney se montre redoutablement exigeant dans les domaines rythmique et mélodique. Les trente-six titres, sublimés par une voix puissante et étrangement intacte, sont (ré)interprétés au cordeau par les huit musiciens (dont une remarquable section de trois cuivres) présents sur scène. Très subjectivement, j’ai été particulièrement impressionné par la science du batteur qui réadapte son drumming, avec une facilité ahurissante, à toutes les époques créatives et à tous les états d’âme de son leader.

Ma seule petite revanche sur le destin rock m’a été offerte avec "Black Bird". Ca fait vingt ans que j’essaie d’enchaîner les accords de ce titre biblique sur mon Ovation mais je ne suis jamais parvenu à une parfaite régularité rythmique tant la structure impose de grandes gesticulation sur le manche. Si Paul McCartney est un bassiste parfait (sa basse Höfner signature sonne comme un miracle rythmique et mélodique) et un claviériste très correct, ses interventions à la guitare acoustique sont plus génériques et je n’ai pas été renversé par la version un peu chaotique que j’ai entendue.

Au même titre que le Diable, le réconfort du musicien besogneux (que je suis) se cache dans des détails…

Les presses rock, non-rock (et même anti-rock) ont déjà largement couvert l’événement avec des bonheurs variés, si fait que je ne vois pas l’utilité d’y revenir par le menu (6). J’évoquerai très subjectivement mes trois meilleurs moments (sachant qu’il en ira autrement pour chacun des quarante mille élus du 5 décembre) : "My Valentine" (7), soutenue par  la traduction gestuelle de Natalie Portman (sublime d’élégance et de grâce) et Johnny Depp ; "In Spite Of All The Danger" de The Quarrymen que je ne connaissais pas et qui pastiche maladroitement ce rock américain encore nubile du mitan des fifties et, enfin,  le très violent "Helter Skelter" qui a entraîné la salle entière dans un vertige époustouflant de montagnes russes virtuelles et sonores.

Cela fait des années qu’un concert de Bruce Springsteen trônait sans partage tout en haut du podium de mes meilleurs moments live. Il va désormais falloir que le Boss fasse un pas de côté.

Un rêve curieux et pénétrant… (II)

Après plusieurs jours de marche dans une zone hostile, c’est au cœur de la jungle de Suresnes (8), à proximité du grand fleuve sauvage qui traverse Pairis, que notre expédition rencontre enfin un explorateur qui semble égaré.

Notre mission de sauvetage touche au but. Le Colonel Cocx arme discrètement son fusil Martini-Henry. Le Docteur Futurity dresse un rapide croquis de la scène au fusain dans son calepin de voyage.

Je m’approche prudemment de l’homme qui m’observe d’un air un peu perplexe. Je lui tend la main.

- Sir McCartney, I presume…
- Well, you must be confusing ! My name is Ramon. Paul Ramon !
- Damned ! Echouer si près du but...


Set-List

Hard Days’s Night (The Beatles)
Junior’s Farm (Wings)
Letting Go (Wings)
Drive My Car (The Beatles)
Got To Get you Into My Life (The Beatles)
Come On to Me (solo)
Let Me Roll It (Wings) avec, en coda, le riff de « Foxy Lady » de Jimi Hendrix
Getting Better (The Beatles)
Let’Em In (Wings)
My Valentine (solo)
Nineteen Hundred And Eighty-Five (Wings)
Maybe I’m Amazed (solo)
I’ve Just See A Face (The Beatles)
In Spite Of All The Danger (The Quarrymen)
Love Me Do (The Beatles)
Michelle (The Beatles)
Dance Tonight (solo)
Black Bird (The Beatles)
Here Today (solo)
Now And Then (The Beatles)
Lady Madonna (The Beatles)
Jet (Wings)
Being For The Benefit Of Mr. Kite ! (The Beatles)
Something (The Beatles)
Ob-La-Di, Ob-La-Da (The Beatles)
Band On The Run (Wings)
Let It Be (The Beatles)
Live And Let Die (Wings)
Hey Jude (The Beatles)

Encore

I’ve Got A Feeling (solo)
Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (Reprise) (The Beatles)
Helter Skelter (The Beatles)
Golden Slumbers (The Beatles)
Carry That Weight (The Beatles)
The End (The Beatles)

(1) Comme des lecteurs s’inquiètent parfois de ma santé mentale, je précise que je pleure volontiers lorsque je suis confronté à une émotion artistique. Ma chère psychologue, le Docteur Zinzin, ne s’en inquiète pas.

(2) Un génie qui a enquillé 27 albums studio (20 en solo et 7 avec les Wings) depuis qu’il a quitté vous savez qui.

(3) Comme les affectionnent, par exemple, les cover-bands...

(4) J’emprunte le mot au vocabulaire scientifique de la biologie parce que je n’en trouve pas de meilleur dans le langage vernaculaire.

(5) Parfaitement documentée sur le double album Back to The World (Live).

(6) Je me permets de renvoyer ici à l’extraordinaire set-list du concert.

(7) Il s’agit d’un extrait du confidentiel "Kisses On The Bottom" (2012) que Paul a dédié à sa compagne, laquelle était présente dans la salle..

(8) Je jure qu’il y a une jungle à Suresnes. Il suffit de se perdre dans le quartier pour y arriver. Et c’est plutôt surprenant...

Je serais le plus ingrat des hommes si j’omettais de remercier Benoît Cocx et le Docteur Futurity qui ont fraternellement veillé sur ma petite personne durant toute notre expédition en Terra Incognita. On a les amis que l’on mérite et je dois être fichtrement méritant.

 
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