Fantomes
It's Ok
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1- Rainbow / 2- Easy / 3- City at Night / 4- Rain / 5- Bored / 6- Back With the Sun / 7- Sometimes / 8- Parker Lewis / 9- Brother / 10- Colors
À la vue des disques trônant au sommet des charts et des artistes les plus écoutés sur nos chères plateformes de streaming, il est clair que de nos jours, les formations se prônant appartenir au mouvement rock et autres sous genres se sont clairement vues reléguées au rang de vieilleries de moins en moins populaires, notamment auprès de nos jeunes générations. A l’heure des samples, des instruments virtuels et des boites à rythmes, quelques puristes n'ont bien heureusement pas rangé leurs guitares et autres artefacts analogiques au placard pour prendre un malin plaisir à remettre au goût du jour certaines sonorités oubliées et bien trop peu utilisées dans la musique "à la mode".
Exemple des plus concrets avec la scène post-punk actuelle qui a vu émerger ces dernières années un nombre considérable de nouvelles formations. On citera parmi les plus populaires Shame, Fontaines D.C., IDLES ou encore Structures, Cathedrale et The Psychotic Monks au sein de notre chère patrie, exprimant, chacun de leur façon, leur résistance artistique face aux mastodontes de la pop et du hip-hop moderne. Les parisiens de Fantomes justement, nouveaux venus sur la scène indé francophone nous proposent en ce début d’année un premier long format aux influences non dissimulées allant piocher allègrement dans les sonorités des années 90 et renouant ainsi avec la grande période du rock indépendant. Et franchement dit, cela fait un bien fou !
Avec un premier EP prometteur sorti il y a 3 ans de cela, nous décelions déjà le parti pris de Paul et Mus pour un son bien typé 90s avec des titres de la trempe de "Rain" et "Back With the Sun" - que l’on retrouve avec joie sur ce premier LP - s’épanouissant quelque part entre Pavement, Weezer et les Pixies. Influences de goût à part, la force de notre duo réside essentiellement dans sa capacité à naviguer, sans complexes, à travers l'âge d’or de l’indie en s’appuyant sur le classique combo guitare/batterie, sans fioritures ni autres extravagances, prodiguant un incroyable aspect d’authenticité aux compositions.
Le contexte est posé dès l’entame avec "Rainbow" sur lequel plane le fantôme d'un certain Kurt Cobain, refrain abrasif et guitares grondantes savamment dosées à l'appui. En parcourant le disque, le clin d’œil à l’ancienne bande de Dave Grohl ne sera pas le seul. Démonstration avec "Rain" où la voix rocailleuse de Paul, soutenue par une distorsion typiquement grunge, est encore mise en avant ou avec le conclusif "Colors" laissant déferler toute sa puissance autour du développement d’un riff grandiose. Les deux français ne font dans clairement pas dans la dentelle avec une bonne poignée de titres énergiques, parmi lesquels on n’oubliera pas de citer "Sometimes", faisant la part belle à une power pop pétillante.
L’originalité du disque se retrouve pourtant dans la capacité des français à nuancer ces titres grungy par l’intervention d’une pop-rock des plus rafraichissantes. Avec son lot de petites pop-songs feel-good très accrocheuses, le duo parvient à nous tirer de la grisaille du quotidien à l'aide d’une instrumentation maligne, calibrée et sautillante. "Easy" ou encore "Back in the Sun", survitaminées, nous plongent en plein coucher de soleil Californien tandis que "Parker Lewis", le tube de l’album, emploi un malin contre-chant à la basse démontrant par la même occasion une parfaite maitrise du crescendo. Le duo parvient même à nous proposer son lot de balades, dont il fait bon de se délecter, de la mélancolique "City at Night" et son refrain entêtant à la simplette "Brother" qui n’a rien à envier à la troupe de Rivers Cuomo, tant le parallèle avec Weezer est troublant.
Avec ses 10 pistes pour seulement 32 minutes de musique, on pourrait regretter la durée un peu courte de l’ensemble mais It’s Ok a finalement l’avantage de se délester de toute longueur inutile et de se concentrer sur l’essentiel avec des titres dépassant rarement les trois minutes et demi. Des riffs simples et efficaces, une instrumentation énergique et des morceaux construits autour de l’authentique structure couplets/refrain permettent à Fantomes de s’imposer comme un incontournable des beaux jours à venir. Rien de révolutionnaire en soit, mais une agréable vague de fraîcheur au sein de la sphère rock francophone.