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Critique d'album

R.E.M.


Chronic Town


(24/08/1982 - IRS - - Genre : Pop Rock)
Produit par Mitch Easter et REM

1- Wolves / 2- Gardening at Night / 3- carnival / 4- 1,000,000 / 5- Stumble
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"La première page d'une des plus grandes histoires du rock Américain"
Maxime L, le 16/01/2023
( mots)

Peut-on être considéré comme un groupe "mesestimé" lorsqu’on a vendu la bagatelle de 80 millions de disques en 30 ans de carrière ?


Poser la question, c’est en soi déjà un peu y répondre, puisque oui, R.E.M demeure finalement assez mal connu dans nos contrées, en dépit des tubes matraqués en radio depuis 1991, "Losing My Religion" et "Everybody Hurts" en tête. Et pourtant, le groupe originiaire d’Athens eût une vie avant les clips martelés sur MTV, les récompenses en tous genres et les contrats stratosphériques avec Warner. 
Une vie qui débuta au milieu des années 70 lorsqu’un jeune étudiant en arts, Michael Stipe, fit la connaissance d’un des employés de son disquaire favori, Peter Buck, avec qui il partage les mêmes goûts musicaux : Television, Patti Smith, The Velvet Underground pour ne citer que les plus connus. De fil en aiguille, les deux jeunes Américains se mettent en tête de monter un groupe, rapidement rejoints par le bassiste Mike Mills et le batteur Bill Berry. 


Voilà, dans les très grandes lignes, la naissance de R.E.M, dont on vous conseille la lecture de la biographie par Thierry Jourdain, ou l’écoute du double épisode de podcast de Recoversion qui leur était consacré. Si les 80 millions de ventes dont je parlais en introduction concernent surtout les années 90 (18 millions rien que pour Out Of Time, ouch !), la discographie officielle du groupe démarre en 1982 avec l’EP Chronic Town qui précède d’un an la sortie de Murmur premier (et excellent album du quatuor). Et pour qui ignorerait tout de cette première partie de carrière, la surprise risque d’être de taille tant la musique des Géorgiens est à des années lumière des gros tubes nineties. On retrouve pourtant sur cet EP inaugural quelques éléments qui feront le sel et les spécifictés de R.E.M.


À commencer par la guitare de Peter Buck, construite autour d’arpèges ciselés, comme sur le parfait “Wolves, Lower”, entre autres, sans ne jamais tomber ni dans la surenchère, ni dans la démonstration. Ce qui traduit déjà en 1982 la volonté du groupe à n’être qu’une entité, sans qu’aucun membre n’ait plus d’importance que les trois autres. On parle même ici et là d’un groupe de “rock communiste”, tous les royalties et droits d’auteur étant, dès le départ (et jusqu’à la fin du groupe), divisés en 4 parts parfaitement égales, sans se soucier de l’apport de l’un ou de l’absence de l’autre sur les paroles ou la composition.


Le deuxième élément musical qui se dégage et qui rétrospectivement, apparait comme l’un des points forts reconnus du groupe (pour les initiés en tout cas), c’est la basse de Mike Mills. Toujours bien mise en avant, parfois même davantage que le chant, elle est à mon sens le point central de l’équilibre des Géorgiens. Que ce soit sur les lignes soutenues de “Wolves, Lower”, ou en soutien appuyé sur des structures plus classiques, comme sur “Carnival Of Sorts”, Mike Mills est toujours au parfait endroit au parfait moment. D’autant plus que le musicien à lunettes s’occupe, brillamment, des choeurs sur une grande partie des chansons.


C’est finalement Michael Stipe qui, pour des oreilles non aguerries, est sans doute le moins évident à identifier sur Chronic Town. Certes, sa tessiture "particulière" est déjà là, mais sa façon de chanter et d’utiliser sa voix n’est en rien comparable aux disques tels que Out Of Time ou Automatic For The People. C’est particulièrement le cas sur le presque expérimental “Stumble”, sur “100000” où sa voix se montre très sèche et abrasive sur les couplets, quand elle n’est pas volontairement sous-mixée, sur “Carnival of Sorts”, ou carrément construite sur des murmures (sic), comme sur l’intriguant “Gardening At Night”.


Voilà pour ce qui est des forces en présence. La musique du groupe, quant à elle, se révèle ici tout à fait enthousiasmante, encore loin des canons “college rock” de la suite. La froideur dans la production de “Gardening At Night’ ou “Carnival of Sorts” (parfaitement symbolisée par la gargouille du visuel), rappelle l’énergie du post-punk britannique naissant, et on est par moments pas si loin des lignes noires syncopées et désabusées de The Cure, période cold-trilogy.


Chronic Town est équilibré, et si aucun “tube“ ne s’en dégage, il ne contient aucun temps faible non plus. On commence à discerner quelques gros refrains “Carnival of Sorts”, “1000000” notamment et une propension à ne pas se répéter en expérimentant, sur “Stumble”, son jeu de batterie varié et ses empilements de guitares (très The Cure là encore), et sur des textes qui ne présentent aucun véritable sens. 


Et c’est là la singularité de R.E.M sur leurs premières sorties : les textes n’ont aucun début de signification. Que ce soit les incompréhensibles “House in Order” en choeur sur “Wolves, Lower”, les enfilades de mots dans “Carnival Of Sorts” ou les paroles intriguantes de “Stumble”, les Géorgiens n’accordent en 1982 aucune importance au sens des mots, du moment où ils “sonnent” avec musicalité. Ce qui devrait, à mon sens, presque être la norme tant la musique se doit d’être ressentie plus que “comprise”. 


Même les titres de chansons paraissent inventés de toutes pièces : le sens de “Gardening At Night” (qui donnera d’ailleurs le nom de leur maison d’édition, “Night Garden”) n’a jamais été rééllement explicité par le groupe, ou alors selon plusieurs versions qui ne concordent évidemment pas. On est loin des messages politiques anti-Bush ou du “Everybody Hurts” adressé à la jeunesse en perdition. Là encore, il s’agit d’une volonté du groupe de brouiller les pistes, de ne pas trop se livrer sans doute aussi pour Stipe, qui mettra des années à faire apparaitre ses textes dans les livrets des albums (à partir de 1988 sur Green). La dimension “underground” de R.E.M. en 1982 est réelle, au point de s’adresser, dans leurs chansons à un public local, très centré sur la Géorgie. Sur “Stumble”, la phrase “We’ll strumble through the A.P.T” fait référence à l’abréviation de “Atlanta Party Phone”, pratique de l’époque où, pour être invité aux fêtes importantes d’Athens, il “suffisait” d’appeler un numéro de téléphone. Encore fallait il connaitre ce numéro.*


En résumé, Chronic Town est un disque à ne surtout pas négliger dans la carrière de R.E.M, et qui va au delà de la simple curiosité discographique. Et si la première K7 démo du groupe (avec "Radio Free Europe") s’était écoulée à 400 exemplaires, l’accueil de Chronic Town lui sera bien supérieur, avec un vrai succès d’estime, et 20 000 copies vendues à sa sortie. De quoi attirer les radios..universitaires au moins dans un premier temps.


 


*cf “Remember Every Moment” de Thierry Jourdain, qui explique également que c’est dans cet environnement de “A.P.T” que les B-52’s seraient nés.

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