Band Of Horses
Mirage Rock
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1- Knock Knock / 2- How To Live / 3- Slow Cruel Hands Of Time / 4- A Little Biblical / 5- Shut-In Tourist / 6- Dumpster World / 7- Electric Music / 8- Everything's Gonna Be Undone / 9- Feud / 10- Long Vows / 11- Heartbreak On The 101
Les années passent et la redite menace. En d’autres termes, les reproches que l’on peut formuler ont souvent une sale tendance à se répéter au fil du temps, et s’il est difficile de critiquer un disque formellement inattaquable, il convient néanmoins de laisser parfois pointer l’amertume pour exprimer une certaine forme de lassitude vis-à-vis d’un groupe qui a pourtant à peu près tout compris à la musique mais qui peine régulièrement à enthousiasmer, à vraiment enthousiasmer.
Band Of Horses fait partie de ces formations auxquelles on n’a foncièrement rien à reprocher : esprit impeccable, talent intact, envie et régularité exemplaires, prestations lives de qualité, et on en passe. Mais alors pourquoi, pourquoi, à mesure que les disques s’enchaînent, l’intérêt vis-à-vis de cette orchestre équin continue-t-il à décroître ? Pour être tout à fait honnête, il convient de signaler que le petit dernier, Infinite Arms, avait un peu inversé la vapeur et nous promettait un petit espoir de progression, espoir bien vite balayé par ce rocher mirage aussi beau qu’agaçant.
Peut-être que la bande à Ben Bridwell souffre, plan par plan, de la comparaison avec ses alter egos. Le barbu à chemise à carreaux chante d’une voix authentiquement habitée, mais on lui préférera toujours le plus acide Matthew Caws. Les arrangements rock indie à consonance folk sont toujours aussi soignés, mais dans le même genre, My Morning Jacket provoque tellement plus d’émotions. Le songwriting s’avère indéniablement de qualité, mais il reste à mille lieues d’un Ben Gibbard. Le verdict fait mal à entendre : Band Of Horses est bon en tout mais n’excelle en rien. Pire : il ne progresse en rien, et alors que le séminal Everything All The Time profitait de l’effet de surprise et d’une réelle charge émotionnelle, les albums suivants, celui-ci y compris, se sont contentés d’appliquer la même (bonne) recette avec le même (bon) résultat, mais sans tirer les leçons de ses relatives carences.
Mirage Rock ne déroge pas à ce constat : dès l’introductif "Knock Knock", porté par son refrain en boucle et son riff gentiment enfiévré, on s’ennuie sec. Pas de surprise ensuite avec des mélodies en pilotage automatique qui nous amènent exactement à l’endroit où on les attend, un peu comme si on visionnait un film dont les ficelles paraissent tellement grosses qu’on devine la fin de l’intrigue dès les premières minutes, sensation vraiment gênante à l’écoute du naïf "A Little Biblical" ou du plus retors "How To Live". Les titres lents, en revanche, tiennent bien plus facilement le choc et se révèlent largement plus longs en bouche ("Slow Cruel Hands Of Time", "Shut-In Tourist") même si on ne peut s’empêcher d’y trouver un arrière-goût de déjà-vu. Pour d’autres morceaux, on peine à comprendre une idée de construction saugrenue ("Dumpster World" qui assemble deux ambiances assez disparates sans réel liant) ou à passer outre certaines influences beaucoup trop visibles ("Electric Music", pompé à bloc sur Dire Straits). L’exercice folk ("Everything’s Gonna Be Undone") et le point de passage obligé par la balade country ("Long Vows") se révèlent éminemment réussis mais d’un académisme outrancier, tandis "Feud" se veut énervé sans arriver à la cheville de Nada Surf. Rageant. Le dernier morceau, "Heartbreak On The 101" est le seul à créer véritablement la surprise en laissant à Bridwell le soin de développer une palette vocale rauque et grave qu’on ne lui connaissait pas : certainement une piste à creuser.
Que l’on soit bien d’accord : Mirage Rock n’est certainement pas un disque raté, et il plaira sans aucun doute à nombre d’entre vous. Mais qui retiendrait un disque d’une telle banalité à l’heure de tirer le bilan de cette année 2012 remarquablement fertile en disques de très grande qualité ? Dans les faits, seul Rolling Stone a cité Band Of Horses à la 19ième place de son classement annuel... tandis que Green Day, avec le médiocre !Uno!, se hisse au 8ième rang de ce contestable palmarès. Rien de plus à ajouter.