Calexico
Carried To Dust
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1- Victor Jara'S Hands / 2- Two Silver Trees / 3- The News About William / 4- Sarabande In Pencil Form / 5- Writer'S Minor Holiday / 6- Man Made Lake / 7- Inspiración / 8- House Of Valparaiso / 9- Slowness / 10- Bend To The Road / 11- El Gatillo (Trigger Revisited) / 12- Fractured Air (Tornado Watch) / 13- Falling From Sleeves / 14- Red Blooms / 15- Contention City
Depuis sa création, Calexico tient une place à part dans le paysage indie de la côte ouest des USA. Basée à Tucson (Arizona) non loin de la frontière mexicaine, la formation de Joey Burns et de John Convertino est aujourd'hui reconnue autant pour ses qualités de songwriting délicat que pour son brassage d'influences allant du rock au folk en passant par le mariachi et l'americana. Même si le groupe n'a jamais été crédité de coups d'éclats indélébiles par le passé, sa constance et sa passion pour la belle musique, tout en douceur et en finesse, lui ont permis de réaliser des albums de qualité et rendent désormais plus qu'hypothétique la sortie d'un opus raté.
Carried To Dust ne vient heureusement pas démentir ce préambule. Si le précédent volet, Garden Ruin, accomplissait une digression politique anti-Bush fort à propos, ce cinquième album se veut un retour à une musique plus détachée et dénuée de tout versant idéologique, évoquant simplement (si l'on peut dire) un long périple musical allant de la Californie au Chili en passant par le Mexique et toute la cordillière des Andes. Quelques invités ont été conviés à participer au voyage, au premier rang desquels le toujours aussi barbu Samuel Beam - juste retour des choses après l'impressionnante contribution de Joey Burns et de Paul Niehaus au brillantissime Shepherd's Dog d'Iron & Wine - mais également la talentueuse Pieta Brown ainsi que Doug McCombs de Tortoise. En somme, toutes les conditions ont été réunies pour un agréable moment de détente.
De fait, ça commence plutôt fort avec deux superbes chansons en guise d'ouverture, "Victor Jara's Hands" et "Two Silver Trees" atteignant très vite un haut niveau d'intensité émotionnelle. La voix grave et discrète de Burns accomplit des miracles en terme de sobriété rêche, trainant avec placidité au gré des accompagnement de cordes et de cuivres, se laissant transporter sans effort par les rythmiques particulièrement maîtrisées de Convertino. Un batteur qui cogne avec intelligence et sensibilité, c'est suffisament remarquable pour être encouragé, non ? Si "The News About William" marque un peu le pas malgré ses arrangements acoustiques hispanisants particulièrement bien trouvés, "Writer's Minor Holiday" se laisse apprécier sans déplaisir. Pourtant, au fur et à mesure que l'album avance, l'intérêt décroît petit à petit. Non pas que les titres suivants soient déplaisants, loin de là même, mais on pourrait néanmoins leur reprocher un petit manque de consistance. Ceci bien sûr si l'on excepte les deux duos avec les invités principaux, judicieusement placés au milieu de l'album et qui apportent un renouvellement bienvenu à l'ensemble. On notera notamment la parfaite harmonie vocale entre Burns et Beam sur "House Of Valparaiso", et la sensibilité toute latine apportée par la voix de Pieta Brown à "Slowness". Mention spéciale également à "Bend To The Road" et à la douceur de ses pincement de guitare et de basse. Difficile en revanche d'accrocher complètement au mariachi presque kitch de "Inspiración", même si cette touche mexicaine fait pour beaucoup dans le charme de Calexico. Car si le groupe parvient à donner à ses compositions une tonalité moderne malgré un fort attachement à l'égard des traditions locales, ce fameux titre ne demeure au mieux qu'une redondance qui n'apporte rien de bien intéressant au style musical dont il s'inspire.
Loin d'être déplaisante, cette livraison de Calexico laisse comme un petit arrière goût d'inachevé préjudiciable, surtout si l'on s'en réfère aux quelques perles qu'elle contient et qui auraient pu laisser présager du meilleur. D'autant que l'album finit par se révéler un peu longuet aux entournures - ce qui n'arrange rien, et qu'il aurait notablement gagné à être amputé de quelques interludes instrumentaux superflus. Il n'en reste pas moins que Carried To Dust résiste parfaitement à l'épreuve du CD relancé en boucle, et qu'il associe à quelques excellents titres une ambiance sonore finement ciselée par des orfèvres du folk-rock latino. Voilà qui devrait suffir à ravir les afficionados du groupe, faute de mieux. Et qui ne devrait pas m'empêcher pour autant de continuer à suivre de très près ces "citoyens d'amérique et du monde", comme ils se définissent eux-même.