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Critique d'album

Kula Shaker


K


(16/10/1996 - Columbia - Brit-pop psychédélique - Genre : Pop Rock)
Produit par

1- Hey Dude / 2- Knight on the town / 3- Temple of everlasting love / 4- Govinda / 5- Smart dogs / 6- Magic Theatre / 7- Into the deep / 8- Sleeping Jiva / 9- Tattva / 10- Grateful when you're dead (Jerry Was There) / 11- 303 / 12- Start all over / 13- Hollow man
Note de 4.5/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"Un album d'anthologie liant rock britannique sixties et brit-pop. Un must"
Maxime, le 08/10/2006
( mots)

À l’heure où vous lisez ces lignes, Kula Shaker est en studio en train de donner un successeur à son dernier album sorti en 1999. Cette nouvelle est d’une importance capitale, fondamentale, décisive, et mérite bien qu’on stoppe pendant un petit moment la course de nos vies pathétiques et inutiles pour en saisir toute la portée. Pour cela, il faut remonter au milieu des années 90, alors que la planète pop est secouée par l’émergence de jeunes groupes britanniques décidés à porter haut le noble héritage des glorieux aînés (Beatles, Who et consort) en les croisant avec le rock baggy des Happy Mondays et des Stones Roses. Vous l’avez compris, nous sommes en 1996, en pleine fièvre brit-pop et l’essentiel des débats musicaux de l’époque se résume à se demander si le single "Roll Will It" d’Oasis se vendra plus que le "Country House" de Blur ou si Noel Gallagher regrette d’avoir déclaré qu’il souhaitait que Damon Albarn meure du Sida.

Au milieu de cette scène bouillonnante traversée de très bons (Suede) voire d’excellents groupes (Pulp) apparaît Kula Shaker. Sur le papier, rien ne les distingue de leurs congénères : mêmes aspirations pop, influences à peines voilées, tripotées de singles squattant le haut des charts (surtout en Angleterre). Sur le papier seulement, car dès que l’on fait parler les disques, il est évident que Kula Shaker tient une place résolument à part sur l’échiquier briton, à la fois tout à fait typique de la scène d’alors et développant un son bien à lui. Fils d’une actrice (Hayley Mills) et d’un réalisateur (Roy Boulting), son leader, Crispian Mills, suite à un voyage initiatique en Inde, s’emploie à faire ressurgir du fin fond des sixties le psychédélisme qui régnait lors du fameux Summer of Love. Psalmodies indoues, tablas, sitars, encens et patchoulis peuplent les compos du quatuor, proposant un aller simple en auto-stop vers Katmandou, emmitouflé dans sa veste en peau de mouton.

La force de ce premier album, c’est non seulement de combler un fantasme absolu : lier l’approche psychédélique des Beatles période Rubber Soul - Revolver avec la puissance et la classe d’un Jimi Hendrix Experience, mais de sublimer cette simple symbiose musicale avec une redoutable écriture et des compositions magistrales. Tout comme Wolfmother le fait aujourd’hui avec le hard rock seventies, Kula Shaker affiche nettement ses influences, mais dans un second temps joue avec ces codes, les dégraisse, les déjoue, les restreint dans des chansons classieuses. Jouer les blasés de service en criant au repompage éhonté n’a donc pas de sens aujourd’hui, à l’heure où le rock semble se limiter à bégayer ce qu‘il a déjà dit. Ce n’est pas qui tu cites qui importe mais comment tu cites. Il en résulte un double plaisir pour l’auditeur : il est à la fois caressé dans le sens du poil par des références on ne peut plus délicieuses et grisé par de formidables titres tour à tour mystiques et nerveux.

La question des références, Kula Shaker l’évacue d’ailleurs assez vite. Le titre liminaire, "Hey Dude" forme un clin d’œil au "Hey Jude" des Beatles, mais il n’est ici nullement question de ballade générationnelle, mais d’une entrée en la matière puissante et fiévreuse. La pédale wahwah s’échauffe, la guitare fuzz fume, les cocottes funky crépitent dans la braise, le verbe se fait lointain pour mordre au refrain. On a l’impression d’assister à une répète du Hendrix Experience et on se demande si les Kula ne saluent pas plutôt Joe que Jude. Le message est clair : il n’y a pas à chercher qui on repompe à tel moment. Le passé et le futur sont abolis, seul le présent de la jouissance à l’état pur prime. Et on jouit à l’écoute de K. A mort. Si on voulait schématiser à coup de hache l’album, on dirait qu’il repose sur l’alternance de titres puissants nourris de saillies guitaristiques et de vindictes rageuses ("Smart Dogs", "303") et de trips plus orientalistes, avec leurs doses d’instrus indous et de langueurs en forme de volutes dorées ("Tattva", "Govinda", "Temple of the Everlasting Light"). En gros, Ravi Shankar ("Sleeping Jiva") rencontre Pink Flyod et Iron Butterfly pendant que John Lennon (pour la qualité d’écriture) et George Harrison (pour les instruments orientaux) comptent les points en fumant du Hash avec le docteur Robert. La clef de voûte de l’album reste ainsi le titre "Grateful When You’re Dead/Jerry Was There", se scindant en deux mouvements distincts en hommage à Jerry Garcia, chanteur des Grateful Dead qui s'éteindra quelques jours après la parution du single. Dans un premier temps, le groupe déballe une belle rage seventies, soutenue par des riffs mordus jusqu’au sang, puis le morceau se délite, se dissout dans un nuage de vapeur éthéré, communiant autour des stèles d’un temple délabré. Toute la science de Kula Shaker se voit contenue dans cette chanson.

Mais ce serait injuste et totalement incomplet, car on ne rendrait pas ici compte de la majesté des mélodies, de la richesse du son, de la suavité des arrangements, de la magie des titres, de la voix de Mills qui plane sur ce nirvana musical avec aisance comme une traînée d’encens. Tout dans ce disque est parfait, chaque note coule de source, chaque écoute produit toujours la même quantité de plaisir. Même 10 ans après sa sortie, K n’épuise pas sa capacité de sidération, sa fraîcheur et sa maîtrise restent intacts. D’ailleurs, même chez des personnes pas forcément familières avec le rock britannique d‘il y a quarante ans, l’écoute de cet album produit des crises de transes voluptueuses qui arrachent les mêmes sourires béats que l’auditeur averti qui connaît l’album sur le bout des ongles. Si on voulait être méchant avec Kula Shaker, on dirait que cet album prouve a contrario l’excellence des groupes sixties puisqu’il suffit de les citer pour taper dans le mille. Si l’on voulait être plus juste, il suffirait de dire que le mot culte semblait inventé pour un tel disque, qui donne à n’importe quelle étagère Ikea qui aura la chance de l’abriter l’allure d’un autel bouddhiste des plus mystique.

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