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Critique d'album

Loading Data


Double Disco Animal Style


(13/03/2013 - Deadlight Entertainment - Stoner Rock - Genre : Rock)
Produit par

1- Double Disco / 2- Give The Rat A Name / 3- Teeth And Tongue / 4- Butterfly Shelf / 5- So High / 6- Hanging Low / 7- Round And Round / 8- Mezzoven / 9- Gift / 10- Alright / 11- Not Gonna Take It / 12- Armageddon / 13- Midnight Situation / 14- On My Heart / 15- Palinka (bonus track)
Note de 4.5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Les QOTSA français en apothéose. C'est lourd, c'est chaud, c'est disco."
Maxime, le 22/04/2013
( mots)

Printemps caniculaire sur le heavy rock français. A peine avons-nous eu le temps de nous remettre des derniers coups de semonce infligés par Glowsun, Mudweiser et 7 Weeks que les nouveaux Los Disidentes Del Sucio Motel, Mars Red Sky, Blaak Heat Shujaa et Bukowski suffoquent déjà dans l'antichambre. C'est au milieu de cette actualité pléthorique que les trop rares Loading Data amorcent leur retour, six ans après un Rodeo Ghettoblaster de jouissive mémoire. Stoppez les rotatives et baissez la nuque, le Grand Ancien s'est décidé à reprendre la parole. Car voici près de 15 ans que Lo S Data (guitare, chant) porte sa création à bout de bras envers et contre tout, écartelé entre les Etats-Unis où il a grandi, forgé sa culture, et sa patrie française originelle, où le rock n'a toujours été pratiqué qu'en seconde langue optionnelle. Or, dès la fin des années 90, bien avant que la multitude ne communie autour de Songs For The Deaf et raccroche le wagon stoner, le gaillard avait subi en direct la conflagration Queens Of The Stone Age depuis la Californie, captant le vent du renouveau professé par Josh Homme sous d'épaisses volutes de green. Reprenant le message au vol, celui qu'on nommait autrefois Suave Chavez s'emploie depuis lors à propager la bonne parole, armé de sa Les Paul custom et de son larynx d'airain, vadrouillant de Paris à Miami au grès des mercenaires se ralliant à sa cause.

Pourtant, à l'heure où l'Hexagone se taille progressivement une place sur l'échiquier européen en matière de stoner rock, que de plus en plus de groupes sont signés à l'international et que le Hellfest lui alloue un coin de tente chaque année, ces vétérans font toujours figure d'outsiders. Trop hédonistes, trop efficaces, trop pop pour un genre que l'on pratique aujourd'hui avec sérieux, chacun jouant à celui qui fera plus lourd et psychédélique que le voisin. Surtout, Loading Data a du mal à se départir de son étiquette de réplique frenchy des reines de l'âge de pierre, un réputation qui colle à ses guêtres depuis ses débuts et dont il aura du mal à se départir quand on se penche sur la genèse de ce troisième album, écrit pendant un séjour prolongé à Los Angeles et produit par Alain Johannes, l'une des principales chevilles ouvrières oeuvrant au sein de la nébuleuse du géant rouquin. On y retrouve l'ivresse anarchisante d'un Rated R, son goût pour les line-up à géométrie variable (partagé entre une partie des troupes parisiennes de l'époque et une pluie de guests, dont Adam Keller, un des anciens batteurs de la formation, et les deux tiers de Mondo Generator) comme pour les interludes fantasques (le claudiquant "Not Gonna Take It" ou "Mezzoven", trébuchant sur son riff éthylique). A l'image de son illustre modèle, le disque s'offre les sévices de Nick Oliveri, lequel vient agonir "Hanging Low" de ses glapissements de putois, avant de se clore sur une longue marche lancinante ("On My Heart") ressassant son coda jusqu'aux confins de la démence, dans la droite lignée d'un "I Think I Lost My Headache".

On commettrait cependant une grossière erreur en s'arrêtant à cette proximité plus ou moins revendiquée, même si la balayer d'un revers de main ne rendrait pas service à ses instigateurs, tant cette plaque mérite plusieurs tours de platine avant de révéler ses secrets. On fait le malin lors des premières écoutes, se délectant d'un air amusé de ces rengaines robotiques sur lesquels Josh Homme adorerait minauder ("Gift"), relevant avec componction les clins d'oeil appuyés (le pont d'"Armaggedon" cite explicitement celui de "Mexicola") et on se rend soudain compte que la plupart des refrains ont durablement imprimé leur marque dans notre subconscient. On comprend alors que Loading Data est bien plus qu'une pâle imitation, qu'il se réapproprie plus qu'il ne singe, qu'il doit, bien plus qu'une série de tics qu'il s'agirait de reproduire, son allégeance à une certaine idée du rock véhiculée par les premières réalisations du conglomérat de Palm Desert, celle de la ligne claire et musculeuse, celle qui allie puissance et élégance, celle qui tente de tenir les deux bouts de la chaîne, la lourdeur des guitares comme l'immédiateté des mélodies. Moins lysergique, plus frontal que son ainé, le combo sonne, s'il fallait vraiment résumer l'affaire, comme le premier album des QOTSA bousculé par le fun décomplexé des Eagles Of Death Metal et traversé par le chant carnavalesque d'un Guy McKnight (The Eighties Matchbox B-Line Disaster) qui se serait doté d'une voix de stentor.

Le décor est planté. Que ceux qui se tournent les pouces devant les pensums qu'usine l'Elvis poil de carotte depuis Lullabies To Paralyse et les amateurs de rock viril mais (in)correct se préparent à ripailler, car Double Disco Animal Style se profile comme ces burgers servis dans les dinners les plus reculés du nouveau continent : imposant, graisseux, saignant comme un morceau de barbaque grillé à vif. "Double Disco" met en branle l'engin cahoteux, et l'on se cogne en pleines gencives le heavy groove rock du commando, expédié avec une énergie décuplée. Les riffs ronronnent lubriquement tel le râle de Jabba le hutt, émoustillé par le string de la princesse Leïa, la basse semble écrasée par deux tonnes de fonte, la batterie cogne méchamment contre le plexus. Fidèle à sa réputation, le groupe aligne de parfaites bombinettes, percutantes, directes, évidentes, avec une aisance insultante ("Alright"), mais on remarque bien vite qu'il a profité de son congé prolongé pour densifier le propos. Le tempo varie d'une piste à l'autre, alternant les atmosphères, ici une prosopopée torve appuyée sur un clavier lugubre ("Butterfly Shelf"), là des guitares opiacées dialoguant âprement sur une rythmique à suspension hydraulique ("So High"), le tout porté par une production époustouflante. Le son est gargantuesque, primal, cru mais regorge d'une foultitude de détails. Alain Johannes a accompli un joli travail d'orfèvre. On oublie alors ce musicien tapi dans l'ombre des Them Crooked Vultures pour se souvenir qu'il avait aidé Mark Lanegan à mettre en bière son sublime Blues Funeral.

Comme pour l'escogriffe de Washington, son grand mérite est d'accorder les pleins pouvoirs à la voix de Lo qui résonne ici comme jamais, caverneuse, suave et gutturale, à en faire trembler la moelle épinière. Qui l'entendra comprendra pourquoi l'animal se fait aujourd'hui appeler El Patrón. Voilà bien la caution heavy de ce disque, tant son organe peut rivaliser avec n'importe quelle guitare sous-accordée. De fait, l'écoute de Double Disco Animal Style constitue une expérience sensorielle confinant à la métempsychose. Vous voyagerez à travers ses yeux et ses oreilles, harnaché sur un rollercoaster lancé vers les tréfonds de sa psyché détraquée. Hypnotisant son auditoire d'une simple vibration de ses cordes vocales, il vous vissera ses obsessions dans le crâne une par une ("Give The Rat A Name"), vous conduira d'une puissante accolade à l'arrière d'un peep-show ("Teeth and Tongue"), vous rendra fou sous les remugles d'une valse branque ("Round And Round"), s'abattra sur votre corps avec le poids d'un cheval mort pour vous glisser ses suppliques dans le creux de l'oreille ("Armageddon") ou vous guettera, braquemard en pogne, sous les néons glauques d'un motel miteux pour une nuit de débauche ("Midnight Situation"), avant de crooner tel un ogre repu sur le sol de sa tanière le long de la ghost track. On sort de là exténué, vidé, rincé mais béat, prêt pour un nouveau tour sur le train fantôme. En s'appuyant sur le charisme vocal de son frontman et en élargissant son registre, Loading Data nous inflige un coup de massue encore plus dévastateur que son prédécesseur, érigeant un manifeste discoïde, narcotique, plombé, charnel et entêtant. Josh Homme ferait bien de ne pas louper le come-back de ses Queens, sa descendance est prête à le bouffer tout cru.

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