Rick Derringer
All American Boy
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1- Rock and Roll, Hoochie Koo / 2- Joy Ride (Instrumental) / 3- Teenage Queen / 4- Cheap Tequila / 5- Uncomplicated / 6- Hold / 7- The Airport Giveth (The Airport Taketh Away) / 8- Teenage Love Affair / 9- It's Raining / 10- Time Warp (Instrumental) / 11- Slide On Over Slinky / 12- Jump, Jump, Jump
Rick Derringer est un homme de réseau. Après avoir commencé sa carrière dans les années 1960 au sein des McCoys (non sans avoir connu un petit succès en 1965 avec très British Invasion-like "Hang On Sloopy"), il entre dans le réseau des frères Winter, Johnny et surtout Edgar, tout en prêtant sa guitare à Alice Cooper et Steely Dan. Homme de réseau encore, quand il se décide à voler de ses propres ailes : All American Boy, son premier opus, réunit le gratin du rock US. Notez bien, on retrouve son ami Edgar Winter, Bobby Caldwell (de chez Johnny Winter), Joe Walsh (ex-James Gang, futur Eagles) ainsi que ses potes Joe Vitale et Kanny Passarelli.
C’est également un homme de raison qui sent l’évolution esthétique en train de se former à l’horizon du rock américain : le hard-rock, solidement installé au Royaume-Uni, s’apprête à être repris en main outre-Atlantique. All American Boy apparait à ce moment, quand Blue Öyster Cult, Aerosmith et Montrose (que Derringer connait pour avoir participé à l’enregistrement de They Only Come Out at Night d’Edgar Winter) s’attèlent à faire de 1973 l’année de l’avènement du hard-US. Mais contrairement aux trois groupes suscités, Rick Derringer propose un album de transition : hard-rock bien sûr, mais encore très classique – rock à papa – sur un certain nombre de pistes.
Du côté des moments qui déménagent, il y a le tube "Rock and Roll, Hoochie Koo", qui dépasse les versions précédentes enregistrées avec Johnny (Johnny Winter And, 1970) et Edgar Winter (Roadwork, 1972) auxquelles il avait bien sûr participé. Plus énergique, plus dynamique, plus propre, plus agressive, elle est l’incarnation même du hard-rock à l’américaine de cette première moitié des 1970’s. En assumant ses racines enfouies dans les musiques populaires américaines, Derringer est inscrit dans la même école qu’Aerosmith ("Slide on Over Slinky") ou que celle de Lynyrd Skynyrd ("Uncomplicated") – ou finalement entre les deux ("Teenage Love Affair"). Ce lien avec le rock sudiste se retrouve sur la pièce soft-rock/country-folk "Cheap Tequila" - très agréable.
Musicien virtuose, il dévoile ses talents sur des instrumentaux qui évoquent avant l’heure les excellents Dixie Dregs pour ses aspects mi-jazzy, mi-country : "Joy Ride", qui rappelle Focus, où la guitare virtuose imite le son du violon, "Time Warp" est plus entreprenant encore. Pour les amoureux de développements guitaristiques, "Jump Jump Jump", plus long et jazzy, est l’occasion de moments solistes plus impressionnants et approfondis.
Le gros point noir de l’album, suffisamment envahissant pour être nuisible, est l’attrait pour les slows kitchs. Le moins pire est peut-être "Teenage Queen" voire le Beatlesisant "It’s Raining" aux claviers smooth-jazz, mais l’interminable "Hold" ou "The Airport Giveth" aux ses orchestrations horripilantes, sont insupportables. C’est tout de même un tiers de l’album, et globalement, le reste n’est pas à la hauteur pour qu’on puisse passer dessus.
Voilà le problème de certaines œuvres de transition : elles conservent quelques écueils des deux périodes qui l’encadrent dont on se serait bien passé. La principale faiblesse de cet album provient des slows sirupeux franchement dispensables, alors que la partie hard-rock, certes parfois très classique et assez peu violente, laisse entendre des choses intéressantes. Il restera tout de même un tube, "Rock and Roll, Hoochie Koo", qui mérite une place dans l’histoire du rock.
À écouter : "Rock and Roll, Hoochie Koo", "Teenage Love Affair", "Cheap Tequila"