Styx
The Serpent Is Rising
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1- Witch Wolf / 2- The Grove Of Eglantine / 3- Young Man / 4- As Bad As This / 5- Winner Take All / 6- 22 Years / 7- Jonas Psalter / 8- The Serpent Is Rising / 9- Krakatoa / 10- Hallelujah Chorus (from Handel's
A l’exception de Pink Floyd (qui a effacé Atom Heart Mother de ses intégrales), de Kiss (qui nie avoir enregistré (Music From) The Elder), de Metallica (qui finira bien un jour par admettre que Saint Anger est une daube absolue), très rares sont les rockers qui ont désavoué publiquement une de leurs œuvres.
Dennis DeYoung déclarera spontanément que The Serpent Is Rising (moins de 100.000 exemplaires vendus dans le monde entier) est un des pires albums enregistrés de toute l’histoire de la musique. Le propos est probablement un peu excessif (quoique) mais il recèle un fond de vérité. Je parierais même des biscuits contre des dollars que le disque, plus hard que ces deux prédécesseurs, ne figure pas dans la collection personnelle de l’accordéoniste de Chicago.
Il est vrai que sur "The Grove Of Eglantine", le leader de Styx quitte soudain ses terres chrétiennes consacrées pour des métaphores pubiennes. Il n’y a pas de bon ou de mauvais moment pour virer sa cuti mais passer sans transition de Saint-Augustin (sur Styx II) aux attraits d’un sexe fantasmé relève plus de l’analyse freudienne que de la chronique rock.
Dans le même état d’esprit, John Curulewski (fort peu inspiré sur ce disque) se fend d’un horrible titre "caché" aux accents calypso où il parle d’une planche de WC ("Plexiglas Toilet"). Il est aussi responsable de la plus intéressante plage titulaire où il question d’un grand serpent qui se dresse.
Le décor est planté. Au sens premier du terme.
Bâclé durant les trois mois qui ont suivi l’échec commercial de Styx II, The Serpent… serait un concept album. Celui qui aime un groupe est toujours tenté de trouver des excuses à ses idoles. La question qui se pose est par conséquent : qu’y a-t-il à sauver dans ce naufrage qui débute dans une petite culotte pour arriver à l’éruption d’une île volcanique avant de tirer sa révérence sur une sublimissime reprise chorale de l’"Allelujah" de Händel ?
Deux plages, puissamment chantées par James Young, tirent leur épingle du jeu : "Witch Wolf" et le très bon "Young Man".
"Jonas Psalter" est également audible (pour autant que l’on aime les histoires de méchants pirates).
Même le brave Bill Traut, propriétaire du label Wooden Nickel, se joint à l’effort en ajoutant quelques maigres notes de saxophone sur "22 Years " sans parvenir à faire décoller un titre fort banal.
Parmi les grandes curiosités conceptuelles, "Krakatoa" (le volcan dont la formidable explosion a inspiré son œuvre majeure à l’extravagant Edvard Munch) est un monologue (traficoté au Vocoder) de John Curulewski qui érige un pont étrange (et heureusement éphémère) entre Styx et le Magma de Mekanik Destruktiv Kommando.
En apprenant que ce troisième effort discographique, commercialisé sous une pochette horrible, est une nouvelle catastrophe, Dennis DeYoung part se promener dans les rues bruyantes de sa bonne ville de Chicago. Histoire de prendre l’air. Il fait froid. Dennis a presque 27 ans. Au même âge, certains ont déjà accompli une carrière météorique avant d’intégrer le club mortifère le plus célèbre du monde rock.
Tandis que ses pas mènent le claviériste vers les rives du lac Michigan, il se dit qu’il serait plus que temps qu’un miracle se produise.
Au même moment, à New-York, un jeune illustrateur termine ses études et se demande ce qu’il va bien pouvoir faire de ses dix doigts. Il s’appelle Leon Rosenblatt. Ses premiers croquis professionnels, assez old school, évoquent un mage barbu (portant un chapeau pointu) qui dirige la course de Saturne et de quelques-uns de ses satellites naturels. A tout hasard, il les adresse à la firme RCA qui distribue Wooden Nickel.
Par la grâce d’un dessin, un miracle va se produire. Ce sera un miracle lent. Mais prodigieusement efficace. Il y aura - un jour – quatre album "triple platine" à la suite. Personne n’a encore réalisé un prodige pareil.