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Critique d'album

The XX


Coexist


(10/09/2012 - Young Turks / XL Recordings - électro pop - Genre : Pop Rock)
Produit par

1- Angels / 2- Chained / 3- Fiction / 4- Try / 5- Reunion / 6- Sunset / 7- Missing / 8- Tides / 9- Unfold / 10- Swept Away / 11- Our Song / 12- Reconsider
Note de 3/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"L'hygiène du peu."
Kevin, le 22/09/2012
( mots)

Revenus d'une tournée triomphale dans les quatre coins du globe, les trois rescapés de The XX n'ont pas tardé à se réunir en studio sans l'aide de personne. Pas d'ingé son, pas de producteur, juste les trois loustics, leurs machines et leur savoir-faire de gamins surdoués. Plus ou moins deux ans après, ils invoquent Coexist, deuxième chapitre de leur discographie et deuxième étape dans leur chemin de croix. Tout seuls comme des grands, ils ont creusé le sillon emprunté par le premier album, un sillon purement minimaliste, aérien, une trajectoire du vide mais inexplicablement, un résultat complètement envoûtant. Là où la matière s'échappe, le charme s'insinue et capture l'espace avec ses petits doigts boudinés. Le vertige en devient même psychédélique, face aux enchaînements arpèges - beats - voix atones, on se retrouve K.O en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. The XX, c'est le groupe qui tente de calculer le volume du vide. 

Cette gageure leur sied si bien. Parce qu'en tentant de prouver la quadrature du cercle, Romy, Oliver et Jamie distillent des sons purs et des mélodies franchement fascinantes. Avec quelques bouts de ficelle entre les doigts, ils filent un coton sombre et lumineux à la fois, une atmosphère lourde mais dans laquelle des fulgurances d'une légèreté insoupçonnable dérivent jusqu'à l'épuisement. Avec leurs voix d'adolescents tourmentés, Romy et Oliver ne peinent jamais à être sexy, mais ils sont sexy car ils sont naïfs, comme ridiculement petits dans cet univers immense qu'ils déploient. Leur force c'est justement cette faiblesse qu'ils incarnent à la perfection, qu'ils glissent dans les innombrables silences qu'ils abandonnent au détour des morceaux. S'il est difficile d'extraire un titre de la masse, certains parviennent tout de même à scintiller d'un éclat plus troublant. 

À commencer par le premier, le single qui a précédé l'album, "Angels" est l'hyperbole de la simplicité : des paroles niaises à peine articulées, un arpège de guitare qui s'envole, des touches éparses de basse et une batterie qui roucoule pour les refrains. La méthode est simpliste, mais elle est le modèle qui servira de patron à tous les autres. Au final, plus encore que les mélodies, ce sont les arrangements et les boîtes à rythmes de Jamie qui façonnent les titres, surtout quand il décide d’accélérer gentiment le pas ("Chained", "Reunion") ou d'intégrer de nouveaux éléments, comme les sifflements spectraux de "Tides" ou le piano élégiaque de "Swept Away". Il se paie même le luxe d'habiter presque seul un morceau, l'excellent "Fiction" dans lequel il jongle entre silences et doux vrombissements. Ses orchestrations dubstep sont la colonne vertébrale de l'album, tranquillement dissimulé par les deux figures chantantes, Jamie s'éclate à peindre les malaises de ses camarades sans jamais leur voler la vedette. 

Cela dit, au milieu de ces louanges, il ne faut pas oublier un aspect fondamental de la musique de The XX. Coexist, comme son grand frère avant lui, a la fâcheuse tendance de se mordre la queue. Bien que des efforts aient effectivement été fournis, chaque morceau semble être une copie du précédent et chacun des douze titres se répondent dans une torpeur relative. À l'écoute approfondie des morceaux, il est évident que chacun possède son identité et son caractère. Il n'empêche qu'à force d'utiliser les mêmes rares éléments, il devient compliqué d'inventer une structure ou une texture différente à chaque fois. C'est ici que le talent monstre de Jamie XX permet d'éviter l'écueil de l'auto-plagiat, mais à tourner en rond dans ce mariage de dubstep et de pop, l'auditeur peut légitimement sentir un léger fumet de redite. 

Qui plus est, le tout est d'une sensibilité à fleur de peau, abrasive, touchante et terriblement fragile. Le moindre cahot pourrait faire s'effondrer le château de cartes et tout l'équilibre de ce Coexist, d'où le soin extrême apporté à la mesure, à la pondération et au contrôle de l'intensité et du volume. D'où, également, une frustration passagère lorsque le muscle vient à manquer, lorsque l'on aimerait les sentir plus frondeurs, plus audacieux, qu'ils empilent des drones assourdissants plutôt que de maigres chuchotements d'enfants. Le pire là-dedans, c'est qu'on resterait sûrement un peu con si seulement ils tentaient d'en faire un peu plus, de hausser le ton ou la cadence. Leur plus grand talent, c'est justement d'avoir dompté cette harmonie précaire, d'avoir tissé cette gangue bancale et onirique avec leurs doigts de fée. Mais on ne peut s'empêcher de les imaginer délaisser le bien pour le mieux et basculer dans une dimension plus agressive, du moins plus épaisse. Cette frustration, cette envie épidermique de les entendre fracasser leurs limites est le noyau même de leur musique tellement le sens circule dans le manque. Ce manque qu'ils mettent en scène, qu'ils érigent comme idole et dont ils nous bourrent le melon avec ce sourire en coin de bambins sûrs de leur force. 

Toujours le cul entre deux chaises, les trois lascars font la musique qu'ils aiment et tant pis si des fois ça coince. Coexist, tout aussi tranquille qu'un fleuve de plaine continue d'aménager le lit de The XX, entre douces expérimentations et contemplation du néant. Ils demeurent ces magiciens gracieux à l'heure d'habiller les vides de mélodies évidentes, mais deviennent un brin pénibles quand ils la jouent trop facile. Si le talent est indéniable, la méthode a ses lacunes propres et Coexist appuie exactement là où les dents grincent. S'ils ont bien fait de bazarder les consensus et de s'en tenir à leur stricte recette traditionnelle, leur niche peut parfois sembler trop petite pour eux et le génie qu'on leur prête volontiers. Un album ordinaire pour un groupe totalement à la marge et paradoxalement déjà superstar. Allez comprendre...

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