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Compte-rendu de concert

Les Insus ?


Date : 08/06/2016
Salle : Zénith (Paris)
Première partie :

Il s’agit indéniablement d’un des retours sur scène qui aura fait couler le plus d’encre dans l’Hexagone cette année - probablement même plus que celui pourtant historique des Guns N’ Roses outre-Atlantique : les vraies fausses retrouvailles de Téléphone, trente ans après leur séparation, avaient ce soir un goût de nostalgie, quadras et quinquas accompagnés de leur marmaille renouant pour l'occasion avec une part essentielle de leur jeunesse, mais se remémorant aussi la candeur et l’optimisme supposément caractéristiques de la décennie mitterrandienne. À son insu(s), le public du Zénith a embrassé non pas le rêve d'un autre monde, mais bien le souvenir d'un autre temps.

Alan, le 10/06/2016
( mots)

Récit d’un anachronisme ? Peut-être. Car bien que “Ça (C’est Vraiment Toi)” continue encore à squatter régulièrement les playlists de mariages, anniversaires et autres rassemblements festifs en tous genres, force est de constater que personne de moins de quarante ans ne saurait se targuer aujourd’hui d’avoir emballé sur “Cendrillon” à l’occasion d’une boum. À l’heure où Johnny a cédé sa place sur le Champ de Mars à David Guetta, on serait tenté de penser que le temps a bel et bien fait son affaire. Et pourtant…

Pourtant, impossible de ne pas trouver dans le répertoire de Téléphone des chansons dont les paroles résonnent encore avec une infinie justesse en dépit des années qui les séparent de l’instant présent. Non contente d’être géniale, la plume de Jean-Louis Aubert sait aussi être intemporelle, que ce soit lorsqu’elle décrie l’assommante routine qui intervient entre boulot et dodo (“Métro (C’est Trop)”) ou pointe du doigt les dérives abrutissantes de l’appel du dollar (“Argent Trop Cher”). 
 
On ne saurait malgré tout ôter à Téléphone ce statut de groupe témoin d’une époque considérée par beaucoup (à tort ?) comme plus épanouie et apaisée que la nôtre. Mais bien qu’une amère vérité vaille toujours mieux qu’un doux mensonge, c’est pourtant à la charnière des années 70 et 80 que Jean-Louis Aubert, Louis Bertignac et Richard Kolinka, épaulés par Aleksander Angelov en lieu et place de Corine Marienneau, ont emmené un Zénith plein à craquer en ce mercredi 8 juin.
 
Chantez dans l’hygiaphone
 
Il est neuf heures, Paris exulte : les trente ans d’une pénible attente arrivent finalement à leur terme à mesure que les insupportables, sous les acclamations d’un public transi, investissent une scène tout juste plongée dans l’obscurité. Guitares tous azimuts, Téléphone se rappelle instantanément à notre bon souvenir alors que déboule le corrosif “Crache Ton Venin”. Bien loin de ses prestations narcotiques aux côtés des Enfoirés, Aubert montre les crocs et brille ici de mille feux drapé dans son cuir argenté. Tortueux et vicieux, le serpent siffle et ondule au rythme de la frappe animale d’un Richard Kolinka martelant ses fûts avec autant de vigueur que de passion.
 
Acclamés par leur assemblée, les trois compères, plus complices que jamais, savourent l’instant juste avant que le grizzly Bertignac n’entame le Chuck Berry-esque “Hygiaphone”, ravivant les passions d’une fosse en délire. Le seul vent de nostalgie ne suffit malheureusement pas à ventiler un Zénith rapidement converti en fournaise, l’atmosphère devenant suffocante et l’air irrespirable. Et Aubert de s’en amuser : “Pour la prochaine fois, on demandera à Jack Lang d’installer la ventilation.” D’humeur taquine, le duo Aubertignac n’hésite pas à prendre la parole pour se fendre de commentaires et anecdotes facétieux, la paire allant même jusqu’à s’amuser d’une évidente comparaison avec un autre duo emblématique du rock.
 
C’est donc avec un accent anglais des plus caricaturaux qu’Aubert déclare : “Et maintenant, Luigi va vous chanter un autre chanson… mais je crois qu’il est un peu bourré.” Au guitariste de répliquer : “Peut-être, mais j’étais pas bourré quand je l’ai écrite.” Et on ne saurait jamais lui en être suffisamment reconnaissant tant “Cendrillon”, repris en chœur par le public au même titre que “La Bombe Humaine”, “Argent Trop Cher” et autres “Métro (C’est Trop)”, envoûte de par son exaltante beauté, sur scène comme sur disque. Indéniablement l’un des moments forts de la soirée, la relecture du conte par Berti plonge une assemblée en pleine cure de nostalgie dans une émotion manifeste.
 
Paris avec toi
 
Survoltée depuis le début, l’ambiance vire soudainement à l’intimiste lorsqu’Aubert et Bertignac, guitares acoustiques en main, viennent s’asseoir en bord de scène, accompagnés par un Richard Kolinka en nage grattant délicatement sa caisse claire du bout de ses balais. Démarre alors un intermède acoustique au cours duquel les trois insupportables reprendront, dans une veine unplugged, “Le Silence” et “Ce Soir Est Ce Soir” face à un public hypnotisé. L’espace de quelques instants, la scène du Zénith s’apparente alors davantage à ces deux tabourets nonchalamment posés dans le coin d’un juke du Mississippi qu’à un vaste espace sur lequel les icônes de toute une génération se produisaient jusqu’alors.
 
Illustrant le lever du jour, les lumières aux teintes orangées se rallument progressivement tandis qu’Aubert prend place derrière son piano. L’ultime morceau du catalogue de Téléphone aboutit sur un majestueux solo de la part de Bertignac avant que le groupe n’entame son sprint final. Retentissent “New York Avec Toi”, sur lequel le public danse et se trémousse comme pour répondre à l’invitation d’Aubert à, un jour, aller là-bas, et finalement “Un Autre Monde”. Kolinka s’empare alors d’un ballon géant aux motifs de la Terre : “Ceci est notre passé, notre avenir, explique Aubert. Il est à vous, prenez-en soin.” Entre rêve et réalité, la petite Terre passe de main en main, rebondissant dans la fosse au son d’un hymne universel.
 
Applaudissements en rafales et exclamations de joie viennent ponctuer l’entre-deux avant que les Insus ne remontent sur scène pour un premier rappel. Et tandis que tout le monde frémit d’impatience à l’idée de s’égosiller sur “Ça (C’est Vraiment Toi)”, le groupe prend tout le monde de court en entamant “In Paris”, face-B de “New York Avec Toi” qu’Aubert qualifiera de “probablement la seule bonne chanson qu’[ils aient] chantée en anglais” - le texte s’inspirant d’un poème écrit par un jeune anglais rencontré à la sortie d’un concert que donnait Téléphone au Marquee Club londonien. Les quatre compères concluent de la plus belle des manières avec un “C’est Vraiment Toi” éminemment fédérateur, ponctué d’une courte reprise du refrain de “Satisfaction” - Mick and Keef, again.
 
Décidément généreux, les quatre insupportables réapparaissent une toute dernière fois pour un ultime baroud. Bottle neck vissé sur le doigt, Bertignac s’élance dans un solo de guitare slide complètement barré avant que tous n’entament “Tu Vas Me Manquer”, concluant près de deux heures et quart de festivités dans la plus pure tradition blues. Car de tradition il était bien question ce soir : rien de nouveau sous le toit du Zénith, les Insus s’étant contentés de donner, l’espace d’une soirée, une seconde vie au répertoire d’un groupe qui a su traverser les décennies et marquer son époque. Trente ans plus tard, Jean-Louis Aubert, Louis Bertignac et Richard Kolinka sont venus défendre avec passion et maestria leur statut d’icônes, et nombreux sont les fans qui ne pourront jamais assez les remercier d’être finalement revenus.
 
En définitive, n’est anachronique que ce qui n’a pas su faire date.

Setlist : 1. Crache Ton Venin - 2. Hygiaphone - 3. Dans Ton Lit - 4. Fait Divers - 5. Argent Trop Cher - 6. La Bombe Humaine - 7. Au Cœur de La Nuit - 8. 66 Heures - 9. Cendrillon - 10. Flipper - 11. Métro (C'est Trop) - 12. J'sais Pas Quoi Faire - 13. Le Silence - 14. Ce Soir Est Ce Soir - 15. Le Jour S'est Levé - 16. Un Peu de Ton Amour - 17. Ce Que Je Veux - 18. New York Avec Toi - 19. Un Autre Monde

Rappel : 20. In Paris - 21. Ça (C'est Vraiment Toi)

Final : 22. Tu Vas Me Manquer

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