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Dave Grohl : une odyssée du rock


Maxime, le 08/04/2013

Dave Grohl, mercenaire contrarié

Figure indéboulonnable du paysage rock des deux dernières décennies, Dave Grohl a survécu à tout : le suicide de Kurt Cobain, la mort du grunge, le départ puis le retour du rock, le déclin de l'industrie du disque... Il est l'une des rares rock stars de moins de 60 ans à pouvoir encore remplir les stades un peu partout sur la planète (sauf en France, perpétuelle exception culturelle). De son arrivée derrière les fûts de Nirvana à son rôle de réalisateur sur le documentaire Real To Reel, retour en forme de droit d'inventaire sur la copieuse carrière d'un leader improvisé mais déterminé, doublé d'un batteur d'exception. Que cache l'éternel sourire du frontman des Foo Fighters ?


J'ai toujours trouvé qu'il jurait sur les photos de Nirvana. Comme une pièce rapportée, un intrus, grimaçant de son sourire chevalin, écrasé par le charisme de Cobain. Le blond peroxydé semblait s'en foutre ou esquissait un sourire contrit, quand l'autre s'obstinait à afficher cette perpétuelle mine du ravi de la crèche. Certes, Novoselik avait lui aussi parfois l'air franchement nigaud. Mais il était ce chêne de deux mètres (et un centimètre) sur lequel se reposait le fragile leader. On se souvient de ces images où, à la fin d'un concert proprement achevé par la destruction du matériel, Kris prenait un Kurt prostré dans ses bras pour le raccompagner dans les loges. L'autre gars achevait son drum kit dans son coin, méthodiquement, parce qu'il fallait bien s'adonner aussi à ce rituel un peu idiot. Un salut derrière le micro où il recommande au public de bien se brosser les dents avant d'aller se coucher, puis vient son tour de fermer la marche, les cheveux ruisselant sur sa carcasse rachitique. Comme un bon petit soldat du défonçage de fûts et de l'équarrissage de cymbales. Consciencieux mais seul, au centre de la scène et pourtant jamais totalement à sa place. Eternelle pièce rapportée. Déjà, sur le fameux Unplugged in New York, on souffrait de le voir tapoter obséquieusement ses fûts, la langue plissée, ne sachant ce qu'il fallait faire. Lui dont la mission quotidienne était de bastonner, voilà qu'il lui faut retenir ses coups, tâcher d'accompagner sans les pulvériser des guitares désespérément débranchées.

Un apprenti dans l'antichambre du génie


Nirvana, il est vrai, a toujours eu un problème avec ses batteurs. Les premiers ne prenaient pas l'affaire au sérieux et ne se pointaient pas aux répétitions. Le mal aimé Chad Channing était devenu un boulet, pas assez percutant aux yeux du chanteur (vous la trouvez molle la batterie sur Bleach ?). Dave Grohl était le cinquième candidat au poste. Cobain voulait un cogneur qui, selon l'expression franchouillarde consacrée, envoie du pâté. Il n'a pas été déçu. Il est de notoriété publique que Nevermind doit beaucoup à la batterie du petit gars de Warren, Ohio. "Smells Like Teen Spirit" débute sur un lick de guitare fébrilement fouetté, laissant place à une terrible explosion atomique, une secousse tellurique, un ébranlement titanesque qui amorce le catapultage de tout un mal-être, toute une rage de (sur)vivre, rampe de lancement désespérée pour écrabouiller les décibels sur le mur puant de la réalité. Ebranlé par cette déflagration, le guitariste enfonce la pédale, et le riff de se muer en gros râle sourd, réanimé par le souffle de l'explosion. La messe était dite. 25 secondes ont suffi pour tout balayer, le hair metal ambiant, la tronche d'Axl Rose, un rock enlaidi par MTV, le gris quotidien de l'existence. 25 secondes que Kurt Cobain paiera très cher.

Il n'a pas dû être évident pour Dave Grohl de joindre la paire, fermement soudée depuis les tréfonds de la bouseuse Aberdeen. Les affinités électives n'ont pourtant pas dû peser bien lourd face au talent du bonhomme. Nirvana avait besoin d'un V8 sous son capot, de sonner gros. Le candidat remplissait parfaitement cet office. Pour le reste, on ne sait jusqu'à quel point l'alchimie humaine a fonctionné entre le leader et sa dernière recrue mais on a bien remarqué qu'ils géraient chacun à leur façon la tornade grunge. Grohl observait le phénomène avec un détachement amusé, Cobain se cognait la tête contre les murs. Paraîtrait que vers la fin, Dave commençait à lui taper grave sur le système. Et on ne parle pas ici de cette foldingue de Courtney Love qui prétendait qu'il la draguait dans le dos de son camarade, juste de ce que d'ordinaire les communiqués officiels qualifient pudiquement d'"incompatibilité d'humeur". Peut-être Kurt ne supportait-il plus l'insouciance de son camarade, lui qui s'avérait incapable de gérer son statut d'icône. Peut-être en était-il venu à mépriser cet artificier d'exception qui lui avait apporté sur un plateau l'efficacité rythmique qui lui manquait, contribuant à lui procurer cette gloire qu'il recherchait secrètement sans jamais se l'avouer. Peut-être une certaine rancoeur larvée s'était-elle installée entre les deux hommes. De son côté, Grohl en avait peut-être marre des jérémiades du Christ Clearasil et de sa punk rock guilt gémissante. Le vent de la hype allait bien finir par retomber, pourquoi s'en soucier  ? Pourquoi ne pas profiter bêtement et simplement de ce grand huit d'un rire rigolard et désabusé  ? On disait la fin de Nirvana de toute façon proche, sabordé au faîte de sa popularité. Le batteur avait inconsciemment pris les devants, enregistrant quelques démos sur une cassette sous le pseudonyme Late! entre deux day-off de la tournée Nevermind, peut-être l'ébauche d'un side-project rafraichissant auquel il s'adonnerait en attendant que l'autre termine sa crise existentielle. On bien savait-il son éviction proche et préparait-il déjà sa reconversion  ? On doute qu'il nous dise un jour le vrai mot de l'histoire. Amitié sincère ou relation essentiellement fondée sur l'intérêt, toujours est-il qu'une sorte de pacte tacite s'est noué entre les deux musiciens. Le batteur apporte sa formidable force de frappe, le chanteur l'initie en retour au processus d'écriture d'une chanson, lui permet d'assister au spectacle d'une sensibilité et d'un talent d'exceptions en action, le convie dans l'antichambre du génie. Bosseur et volontaire, l'apprenti prend des notes.


C'est ainsi sous le patronage de Nirvana que les masses entendent Dave Grohl en tant que chanteur pour la première fois, sur le morceau "Marigold". Le leader avait consenti à lui laisser une place en face B du single "Heart-Shaped Box". On aurait pu s'attendre à une pochade quelconque ("Moist Vagina" en était déjà une, à sa façon). Pourtant il exhume de la cassette Pocketwatch un titre malingre sur lequel il chantonne d'une petite voix, comme un gamin effrayé. Ça sera l'une de ses meilleures ballades (avec "Friend Of A Friend", issu des mêmes sessions, réenregistré et publié officiellement sur le disque acoustique de In Your Honor), lui qui bientôt se sacrifiera doctement à cet exercice pour rock FM sur chacune de ses réalisations, pénible excuse brandie pour soit-disant apporter de la variété à un album. On songe à ces lourdauds "February Stars" et "Walking After You" qui empèseront The Colour And The Shape, en passant par ces si dispensables "Tired Of You" et autres "Cheer Up Boys", jusqu'à ce gênant "I Should Have Known".

Dave Grohl ne met pas longtemps à ruminer ses premiers pas dans le songwriting. Bientôt l'idole trépasse. Pour cet hyperactif pathologique qui a toujours besoin d'avoir trois projets en préparation pour avancer, il est impossible de prendre le même chemin que Kris Novoselic, abasourdi de chagrin, accablé par la douleur, incapable de réagir. Aussi ne se fait-il pas prier lorsque Tom Petty lui propose de remplacer son batteur lors d'une tournée, à l'issue de laquelle le Floridien, conquis par sa recrue (on l'imagine aisément !), lui propose de garnir officiellement ses rangs. Deux routes se présentent à lui, et ce dilemme lui sera régulièrement posé tout au long de son parcours  : continuer d'être ce gamin ravi de participer au voyage, ou bien se risquer au jeu de l'aventure personnelle. L'ex-Nirvana tranche et décline la proposition, mais on donnerait cher pour savoir ce qui s'est passé dans sa tête à se moment-là. Qu'est-ce qui a pesé dans la balance  ? Pourquoi a-t'il tourné le dos à ce qui lui avait tant réussi jusque-là  ? Il aurait très bien pu connaître une très belle carrière de mercenaire quatre étoiles (dans le sens positif du terme, on ne parle pas d'un Zlatan Ibrahimovic du rock), le meilleur cogneur de sa génération, celui qui collectionne les collaborations prestigieuses, l'aide providentielle qui vient sauver un groupe à la dérive ou qui sert de tremplin à des formations prometteuses. Or voici trente ans que les Beatles ont consacré la figure du songwriter. Depuis eux, on n'est véritablement musicien que si l'on participe à l'écriture des morceaux, ou que l'on est au moins la principale cheville ouvrière de son groupe. Sinon on n'est rien. Le musicien du studio devient un vestige du passé, une figure obsolète que l'on considère avec condescendance, voire mépris. Jimmy Page, pièce maitresse du monstre Led Zeppelin, savait pourtant toute la dette qu'il devait à son passé d'intérimaire des studios et a toujours respecté cette fonction. Jeff Beck aussi. Mais Dave Grohl a peut-être été échaudé par la trajectoire de Nirvana, lui qui avait assisté, impuissant, au spectacle de son leader sabotant consciencieusement le navire. Autant voir jusqu'où on peut aller quand on fait les choses à sa façon.

Jovialité et poigne


Le frontman en puissance plonge ainsi dans son sac de démos, en sélectionne une douzaine, boucle dans la hâte un disque en enregistrant toutes les parties lui-même. La section rythmique de Sunny Day Real Estate est ensuite débauchée à la faveur d'un unique boeuf, Pat Smear rapidement dépêché. Foo Fighters nait. Le disque sort une année à peine après la mort de Kurt Cobain, dans une planète rock encore traumatisée. Nirvana avait prodigué aux foules un shoot maximum d'essentiel. Après un sevrage brutal, le batteur vient apporter un maigre substitut, un disque au son brut, sympathique, énergique mais gauche et redondant. Du grunge sans supplément d'âme. Le très creux documentaire Back And Forth, retraçant l'histoire d'un groupe qui n'a au fond pas grand chose à raconter (et surtout véhicule promotionnel éhonté pour le récent Wasting Light), a au moins le mérite de bien illustrer cette période. Grohl doit subir un bizutage en règle, supporter qu'on lui réclame "Marigold" à chaque concert, qu'on traque dans ses textes des références subliminales à Kurt. On exige surtout qu'il prouve sa légitimité. Comment osait-il prétendre prendre la place de l'autre  ? Comment osait-il recommencer si vite, alors que les cendres de son camarade étaient encore tièdes  ? Les archives de Back And Forth montrent que les concerts se déroulaient dans une ambiance morose. Grohl ne semble pas prendre de plaisir maintenant qu'il occupe le premier plan. Qu'importent les quolibets, l'homme est une force de la nature. Rien ne le détournera de sa route. Il épuisera les recrues les moins douées et les plus récalcitrantes. Il creusera son trou à force d'obstination, accrochant le tracklisting de quelques blockbusters hollywoodiens (Fous d'Irène, Godzilla). Les singles se taillent progressivement une place de plus en plus élevée dans les charts. Le groupe se stabilise peu à peu autour du noyau Nate Mendel-Taylor Hawkins. Après 5 ans d'existence, le travail accompli est énorme : à la fin des années 90, on évoque Foo Fighters sans que le mot Nirvana surgisse tout de suite sur le bout de la langue. Il faut le reconnaître, parvenir à faire presque oublier que l'on vient du groupe qui a forgé la décennie qui vient de s'achever relève de l'exploit.

Artistiquement parlant, la trajectoire est plus discutable. Dave Grohl n'a manifestement pas de vision claire quant au visage qu'il veut donner à son groupe, dont il trouve vite le nom idiot. Le vernis grungy du premier album n'est principalement dû qu'à son enregistrement effectué dans l'urgence et il souhaite par-dessus tout que sa nouvelle entité ne passe pas pour un ersatz du combo de Seattle. Pourtant Nirvana flotte encore dans l'air, les figures tutélaires revendiquées par Cobain avec. Hanté par son surmoi pixien, Grohl enfante The Colour And The Shape sous la houlette de Gil Norton, avide de s'accaparer l'excentricité foisonnante d'un Trompe le monde. Déterminé à s'éloigner le plus possible du disque homonyme, il tombe dans l'excès inverse, multipliant les prises et les placements de micro, laissant William Goldsmith et Pat Smear sur le carreau. Le résultat est contrasté  : la première moitié de l'album reste la plus intéressante de la discographie du groupe, mais s'esquissent en contrebande les points cardinaux qui fixeront définitivement son style, son goût pour le stances FM gentiment énervées ("Monkey Wrench"), le rock de stade poussif ("My Hero") et les refrains pompiers ("Everlong"). Le traitement de choc indie ne sied pas aux très prosaïques Foo Fighters. Bouclé dans une ambiance beaucoup plus détendue avec un line-up enfin stabilisé, There Is Nothing Left To Lose les voit arborer une power pop bétonnée enfin taillée à leur mesure. Les singles accomplissent parfaitement leur objectif radio friendly ("Learn To Fly", "Breakout"), un savoir-faire idéalement caréné et une assurance laid-back portent l'ensemble sans encombres ("Gimme Stitches", "Next Year", "Ain't The Life"). Ce troisième opus reste le plus homogène de leur discographie et leur ouvre les portes des grandes arénas. Un premier bilan se dessine alors : Grohl s'avère être un songwriter limité et un chanteur médiocre, compensant son manque de personnalité par un professionnalisme à toute épreuve et un sens très sûr de l'efficacité. Il creusera son trou aux points, et non par K.O.


Dans un paysage rock meurtri où nombre de groupes phares de la décennie sont au plus bas, Dave Grohl affronte le nouveau millénaire d'un air fringuant. Seul rescapé de l'épopée grunge, il devient une figure rassurante, un oncle bien aimé avec un petit côté adolescent attardé qui force la sympathie. Il a su s'extraire du trou noir de l'après Nirvana en se construisant quasi-systématiquement sur son reflet inversé, jusqu'à son rôle de frontman qu'il moque dans ses clips ("Big Me", "Everlong", "Learn To Fly") et qu'il exerce pourtant avec une autorité bien réelle. Le bonhomme sait se faire apprécier, on le dit déconneur, simple, facile d'accès. Mais son tempérament jovial cache également un pragmatisme implacable. Aussi marrant soit-il, Grohl aura toujours tracé son chemin à sa façon, surtout les Foo Fighters qu'il mène avec autant d'affabilité que de poigne, avec une sacré tendance à détourner le regard dès que les choses commencent à puer. Il réenregistre les parties de Goldsmith dans son dos sur The Colour And The Shape, et lui demande la bouche en coeur de rester dans le groupe quand celui-ci apprend que sa batterie a été effacée du mix. A l'époque de Nirvana, il s'appliquait à nettoyer le taudis de Kurt tout en feignant de ne pas remarquer qu'il s'injectait de la brune dans les toilettes. Cette même cécité lui fera démouler les yeux comme deux ronds de flan quand on l'informe de l'overdose de Taylor Hawkins, jonglant dangereusement entre alcool et médicaments depuis de longs mois. Quelques cadavres symboliques pavent le succès de cool Dave. Aucune carrière ne se déroule sans son petit lot de trahisons.

Un nouveau millénaire s'ouvre et les Foo Fighters semblent partis sur de bons rails, se dotant du guitariste Chris Shiflett pour muscler son line-up. Pourtant le groupe va mal, la gestation du quatrième disque est un calvaire. Le patron s'avère peu inspiré, n'aime pas ce qu'il enregistre et ne peut compter sur l'aide de ses troupes, rincées par une tournée des stades menée en compagnie des Red Hot Chili Peppers. Il a voulu s'entourer de soldats carrés et dociles, il en paye à présent le prix. Impossible de se reposer sur ces musiciens compétents mais peu imaginatifs pour qu'ils fournissent des idées fraiches. C'est alors que Josh Homme lui tend un bras salutaire. Ses Queens Of The Stone Age ne se portent guère mieux. Le producteur dépêché pour enfanter Songs For The Deaf (Eric Valentine) a été remercié et le batteur Gene Trautman vient de laisser son tabouret vacant. Cela faisait quelques temps que Dave Grohl lorgnait sur le combo californien. Fan de Kyuss depuis Blues For The Red Sun (1992), il avait toujours suivi la carrière du géant rouquin du coin de l'oeil et se serait déjà bien vu derrière les fûts sur Rated R s'il n'était accaparé par la tournée de There Is Nothing Left To Lose. L'homme ne se fait pas prier, empoigne ses baguettes et se réfugie chez son compère dans un état de surexcitation intense. L'ambiance change du tout au tout. De retour à sa fonction première, le cogneur boucle ses parties en une poignée de jours, ripaille avec ses nouveaux camarades de jeu, retrouve du plaisir, abat des forêts de séquoias avec une banane extatique sur les quelques dates soutenant la sortie du disque. Panique à bord chez les Foos restants, qui voient leur leader les abandonner pour un voyage qu'ils craignent sans retour.

Une impitoyable sélection darwinienne


A nouveau, Dave Grohl se trouve face à un choix cornélien, tiraillé entre sa vocation de mercenaire et ses velléités de songwriter. Là encore, on pourrait écrire des romans sur ce qui s'est tramé dans sa caboche à ce moment-là. Sa fibre artistique est peut-être relativement mince, mais le bonhomme a un goût sûr en matière de rock, et il est loin d'être aveugle. Il sait pertinemment que le disque auquel il vient de participer vaut plus que tout ce que les Foo Fighters ont commis et commettront dans leur histoire. Ainsi déclare-t-il doctement lors de la sortie du météore carmin  : "Tout les 10 ans paraît un disque qui définit le futur du rock. C'est celui-ci." Il ne s'agit pas de langue de bois promotionnelle, le type est tout à fait sincère, et il a raison  ! Dieu sait les ravages que Songs For The Deaf aurait causé s'il était sorti quelques années plus tôt, avant que le rap et l'électro n'éclipsent totalement le rock. Reste qu'il redéfinit le binaire américain de l'époque au bulldozer. Une décennie après Nevermind, Dave Grohl se trouve à nouveau là où tombe la foudre. Ce n'est pas le hasard qui l'a mené ici, lui dont l'instinct l'a poussé à délaisser Mission Impossible pour Dain Bramage, puis rebondir avec Scream, avant de les quitter sans remord pour rejoindre Nirvana. Toujours accompagner la formation qui lui fera franchir un pallier plus élevé, jusqu'à une strate ultime inespérée. Une carrière en forme d'impitoyable sélection darwinienne, même inconsciente. Peut-être en venait-il à regretter que sa route n'ait pas croisé Palm Desert plus tôt, tant il est sur la même longueur d'ondes que Josh Homme, gaillard talentueux, déterminé, mais hédoniste débonnaire. Celui qui sait gérer le succès sans crise existentielle, qui sait apprécier les drogues sans verser dans l'auto-destruction, qui admire la simplicité rustique de ZZ Top sans se complaire dans l'underground pointilleux. Un gaillard taillé dans le même bois, tellement moins compliqué à appréhender que la psyché torturée de Cobain. Enfin un leader sur lequel se reposer sans crainte. Pourtant, hélas, Grohl rentre finalement au bercail, au grand soulagement de Taylor Hawkins, apeuré à l'idée de retourner dans le girond d'Alanis Morissette.

Ainsi, il tourne encore le dos à ce destin qui l'avait conduit à perpétuer le don avec lequel il est né, et qui le porte plus à marteler comme personne qu'à éructer ou gratouiller comme n'importe qui. Abasourdi, on écoute encore avec quel bonheur, quelle maestria, quelle furie communicative il porte Songs For The Deaf à l'excellence, la rythmique cataclysmique de "A Song For The Dead", le tempo acéré de "First It Giveth", la marche ténébreuse de "God Is In The Radio"... Sa frappe animale, musculeuse, imaginative, finalement plus féline que celle de son modèle éternel, John Bonham, n'a jamais fini de nous laisser pantois. S'il daignait se prêter à l'exercice, un disque de solos de batterie vaudrait tellement plus qu'un nouveau Foo Fighters. Le bonhomme aurait pu devenir une sorte de Max Roach du rock US. Bon sang, à quoi rime cet entêtement  ? Pourquoi diable combat-il sa véritable nature  ? Est-ce que seul l'égo explique l'affaire  ? On se console toutefois. L'épisode QOTSA a durablement imprimé sa marque au fer rouge. S'il n'avait jusqu'ici accumulé qu'une poignée de collaborations ponctuelles, tout en portant pendant de longues années le projet Probot, récréative incartade heavy metal, son retour à la batterie devient de fait définitif, et depuis lors il conciliera son mercenariat percussif avec son poste de frontman. Dès l'année suivante il se porte à la rescousse de Killing Joke, sur le point de ressusciter son indus primitif. Les critiques ont peu commenté ce disque, et les fans du gang de Jaz Coleman ne semblent pas le porter beaucoup dans leur coeur, pourtant la frappe de Grohl y fait encore merveille. Il y montre une violence et une cruauté inouïes, un aspect de son jeu qu'il aura peu exploité dans sa carrière. Ailleurs, il épaule Trent Reznor sur son très rock With Teeth, se porte au chevet des Garbage du placide Butch Vig, cautionne la pantalonnade Tenacious D de son pote Jack Black, ou vient doper le carburant rythmique du backing band de l'actrice Juliette Lewis. Souvent réjouissant, parfois anodin, le fruit de ces collaborations ne se révèlera jamais aussi explosif que son association avec Josh Homme. Grohl n'a pas de baguette magique, ne transformera pas votre citrouille en carrosse. Mais on peut compter sur lui pour amener le véhicule à bon port et sur les chapeaux de roues.


Aussi son flirt poussé avec l'Elvis rouquin se révèlera-t-il au final bénéfique pour sa régulière. Conscient que Songs For The Deaf redéfinit les bases du rock américain pour les années à venir, le leader des Foo Fighters recalibre sa machine en conséquence. Intégralement réenregistré, One By One fixe une bonne fois pour toutes le son et l'identité du groupe. Dave Grohl aura beau répandre son fiel sur cet épisode de sa carrière, la réalité s'impose : son album le moins aimé est aussi son plus important, son plus crucial. Les timides tentatives pour donner du change à la scène indie sont oubliées, finie également la power-pop ludique. Place aux murs de guitares, aux refrains héroïques, au mainstream assumé sans complexe. La formation, basée pour de bon à Los Angeles, embrasse les préceptes qui régissent le binaire local, profilé dans ses moindres détails pour conquérir le continent, puis le monde. Le single "All My Life" lui ouvre définitivement les portes des stades. Récompense légitime, tant l'album est tendu vers ce but, livrant à l'auditeur le mode d'emploi de sa consommation scénique : ici le refrain à brailler à l'unisson, là le moment où pogoter sous une pluie de stroboscopes, là le titre où allumer les briquets. Dave Grohl se taille une panoplie de gladiateur de l'arène, sa silhouette s'épaissit, son menton fuyant se dissimule sous une barbe, ses cheveux s'allongent mais pas autant qu'à l'époque Nirvana, sa consommation effrénée de chewing-gums lui taille des bas-joues de castor. Look aussi gentiment grungy que casual, allure musclée mais sourire brite et décontracté, le gaillard épouse le moule de l'entertainer ultime de cette première décennie des années 2000, le modèle qui présidera la destinée du binaire pour le continent américain.

Sachant qu'il a oeuvré pour la postérité avec Songs For The Deaf, Dave Grohl assume enfin son rôle de leader avec sérénité, dictant à ses troupes la marche à suivre avec la même autorité volontaire que Paul McCartney lorsqu'il reprit en main les Beatles à la mort de Brian Epstein. Le gaillard ne ménage pas ses efforts pour présenter à ses comparses et au reste du monde un nouveau pont d'Arcole à franchir tous les deux-trois ans. On fait le show en salle, tandis qu'en cuisine on accommode le plat du jour en utilisant le même fond de sauce. Pourtant aux dires de son frontman, le quartet est en révolution permanente : l'option du double album tentée avec un courage qui force l'admiration près de 40 ans après le double blanc (In Your Honor), les tournées acoustiques, du jamais vu jusqu'ici, le retour de Gil Norton à la production comme gage de remise en question (Echoes, Silence, Patience & Grace). Autant d'efforts qui paraissent comiques, parce qu'un peu pathétiques, tant ils ne font que buter contre les bornes définies jadis par One By One. En dépit de ses ravalement cosmétiques, la machine Foo Fighters reste la même, dégobillant ce rock efficace et linéaire à la production clinquante et sur-bétonnée. Là est son centre de gravité, là son horizon indépassable.

Boucler la boucle


On s'était habitué à se fader avec une distance amusée ce vain enthousiasme plastronné en promo (il est après tout plutôt sain qu'un groupe soit persuadé que son dernier album est le meilleur, sinon pourquoi l'enregistrer ?), mais on décroche vraiment le pompon avec Wasting Light. Qu'est-ce qu'il n'aura pas fait pour nous le vendre celui-là le père Grohl... Les 20 ans de Nevermind se profilent, l'ex-batteur de Nirvana veut boucler la boucle. Le nouveau Foo Fighters sera grunge. Back to the roots ! La dream team d'antan est convoquée : Butch Vig vient poser ses cernes sur la console de son, un Pat Smear fatigué remonte à bord, la mine amusée mais un peu résignée. Argument ultime, le disque sera enregistré dans le garage du patron, fixé sur bandes analogiques. Diantre, on ne rigole plus. Enfin si, on se marre franchement devant les 20 grosses minutes dévolues à ce disque sur Back And Forth, tant on mesure l'abîme entre la dramatisation de l'enjeu ("quand on bosse sur bande il ne faut pas se louper, parce qu'on ne peut pas corriger sa prise", whao, c'te prise de risque, sont malades les mecs !) et la réalité de l'enregistrement, qui s'est déroulé dans la villa cossue d'un millionnaire, bouclé par des quadras en bermudas affalés sur le canapé, s'adonnant scolairement aux sessions entre deux plongeons dans la piscine avec leur progéniture. Jack White ou les Black Keys doivent bien se fendre la poire, eux qui ourdissaient depuis leur caves la résistance analogique il y a plus d'une décennie. Le résultat, fatalement, consiste en un enrobage gentiment corrosif, toutefois désespérément arc-bouté sur des fondations FM solidement rivées depuis des années par le poids de l'habitude ("One Of These Days", "Back & Forth", "A Matter Of Time"). On est alors envahi d'un certain malaise lorsqu'apparaît Kris Novoselic, le crâne chauve, la barbe grise, l'air hagard, comme toujours perdu depuis le départ de Cobain. Voilà le géant sommé de taquiner de la basse, soumis à ce musicien qui n'a joint que tardivement le vaisseau Nirvana, et qui se trouve désormais à la barre, gouvernant le destin de ses rescapés. Tout cela pour donner un "I Should Have Known" qui s'efforce de surjouer l'hommage à l'ami disparu, tout en pesanteur dramatique, voix étranglée déclamant des paroles cathartiques et grondements de riffs solennels. On frissonne en se demandant ce qu'aurait pensé Kurt de ce panégyrique à la facture si convenue, lui qui fuyait les rengaines standardisées, lui qui se méfiait des émotions faciles. Dave Grohl est-il hanté par le spectre de l'ange blond, ou bien l'enterre-t-il ici pour de bon  ?

Ni pire ni meilleur que se prédécesseurs, Wasting Light entérine cet était de fait. L'autre bouffe les pissenlits par la racine, lui est bien vivant. L'icône déchue a redonné au rock son parfum incandescent, son âme damnée ; son ancien compagnon de jeu fait le boulot à sa manière, perpétuant cette musique en compensant ses limites artistiques par un activisme forcené. Dave Grohl gardera toujours le regard rivé vers l'avant, même quand il fait mine de reluquer le rétroviseur. Pour le reste, que les morts enterrent les morts. Il n'y a pas de cynisme froid dans cette aventure. Il sait mieux que personne tout ce qu'il doit à Kurt Cobain, ne serait-ce la facilité avec laquelle il a pu mettre ses Foo Fighters sur orbite, et sans doute considère-t-il son rôle de légataire du monstrueux héritage de Nirvana avec la meilleure conscience du monde, toujours désireux de bien faire. Mais le poids des années et l'ampleur de sa discographie ne cessent de hurler à quel point il s'inscrit davantage dans le sillon de la scène alternative moussée par les majors à la suite de l'effervescence grunge que les marginaux défendus par l'ange d'Aberdeen, ceux qui donnaient depuis les années 80 un réel sens, aussi bien économique qu'artistique, au terme alternatif. Le rock que pratique le camarade Grohl a plus à voir avec Stone Temple Pilots que Mudhoney ; plutôt, mettons, Buckcherry que Butthole Surfers. Et ce quoiqu'en pense le lascar, quand il invite par exemple Bob Mould à trousser quelques couplets sur un "Dear Rosemary" dont on s'épuisera à se figurer quel genre d'hommage il peut bien rendre à Hüsker Dü. De même on se demande s'il cherche encore à poser une nouvelle pierre sur l'édifice rock avec les Them Crooked Vultures, ou s'il ne s'accorde pas tout simplement un petit caprice, confortablement calé entre un Josh Homme bouffi d'orgueil et un John Paul Jones ravi d'exhiber son excentrique collection de basses, reconduisant la lourdeur satisfaite, maligne mais stérile, qui fut l'apanage de tant de supergroupes depuis au moins Blind Faith.


Oui, il y a de quoi sourire devant les efforts que Dave Grohl déploie pour se convaincre, et le reste du monde avec, qu'il se renouvelle à chaque fois, qu'il repousse ses limites. Sans doute croit-il en toute bonne foi que l'album qu'il a enregistré chez lui à la roots est une anomalie dans le paysage contemporain, qu'il l'affilie de fait à la tribu des excentriques, des vieux combattants. Reste que le bonhomme fait le job. Il ne réinvente pas la roue, il perpétue une tradition, celle qui constitue à la fois le ventre mou et la colonne vertébrale du binaire américain, celle de l'efficacité et du professionnalisme éprouvé. Une tradition à laquelle nous ne comprenons pas grand chose en France, nous qui avons ouvert nos Zéniths aux Pixies, nous qui avons promu Iggy Pop chevalier des Arts et des Lettres, nous dont les rock critics examinent avec componction les moindres side projects de Mike Patton, nous pour qui les termes college radio ou modern charts restent désespérément étrangers, nous qui nous nous méfions de l'efficacité pour lui préférer le culte de l'innovation, le mythe de l'évolution permanente. Amène quelque chose de nouveau ou tais-toi, grommelons-nous quand nos cousins d'Outre-Atlantique savent avant tout apprécier le travail bien fait, sans chercher plus que ce qu'il peut offrir.

Dave Grohl s'est toujours désespéré de cette France qui se refuse à ses Foo Fighters, qui rechigne à leur offrir un Bercy rempli quand ils bourrent les stades partout ailleurs. C'est qu'il ne se rend pas compte que n'avons jamais su que faire de ces rockeurs-entertainers, juste désireux de nous faire passer un bon moment, qui apprécient le bonheur simple d'une guitare qui ronronne et d'une batterie qui bastonne, sans chercher à chambouler de si insubmersibles fondations. La France reste rétive aux Foo Fighters (ou plutôt lui présentera des Zéniths garnis et ravis de les accueillir si le frontman daignait revoir ses ambitions à la baisse), tout comme elle est restée (malheureusement) frileuse face à Tom Petty, tout comme elle a loupé Weezer, Fountains Of Wayne, Ash et Feeder, ambassadeurs de la power-pop américaine en pleine ère brit-pop, elle pour qui Creed, Jimmy Eat World, American Hi-Fi, Sugar Ray, Nickelback ou Hoobastank ni signifient pas grand chose en dehors de quelques ballades parues ici ou là. Ici on demandera toujours quelque chose de plus aux singles linéaires de ce rock mainstream et sans aspérité, parfois au risque de lui préférer l'esbroufe arty au savoir-faire assuré de cet artisanat séculier. Nos enfants découvriront "Time Like These" ou "The Pretender" sur la radio K-DST de Grand Theft Auto 15, et ils arboreront devant l'exotisme de ce rock décomplexé le même sourire que le nôtre, lorsqu'à leur âge nous découvrions Foghat, Heart ou Boston lors d'une virée sur l'autoroute de San Andreas. C'est à cette cohorte de combos anonymes, oubliés des chapitres de l'histoire du rock parce qu'ils se contrefoutaient de lui amener quelque chose d'inédit, juste ravis de le servir comme il se doit, que Dave Grohl doit sa filiation. Ses Foo Fighters ne sont qu'un ravaudage moderne des antiques travaux de Foreigner, Styx, Ram Jam, Journey, Cheap Trick, Bad Compagny, ou Toto pour être vraiment méchant, et non des émules de Sonic Youth ou de Fugazi. La chose est entendue.

These are my famous last words


Ce constat, le barbu cogneur le martèle aujourd'hui avec Sound City, prenant cette fois-ci la casquette de réalisateur pour livrer un documentaire consacré au légendaire studio de Van Nuys où Neil Young, Fleetwood Mac, Nirvana, Rage Against The Machine et autres Queens Of The Stone Age enregistrèrent leurs chef d'oeuvres. Le propos est un peu confus. Si la naissance et la spécificité du studio sont bien mises en contexte, le métrage s'appesantit trop sur ses premières années d'existence, accélérant le pas dès que l'on franchit les années 80. Réquisitionnés, Josh Homme, Trent Reznor ou Rick Rubin ont à peine le temps d'aligner deux phrases, les années 90 se résumant principalement à l'épisode Nevermind, qui relança la renommée de Sound City mais ne put empêcher son déclin progressif, condamné par l'avènement des technologies numériques. Voilà le sujet principal de ce documentaire, qui travaille Dave Grohl depuis Wasting Light. Tel un Frédéric Beigbeder paniqué par l'arrivée des Ipads, le voici à nouveau défenseur de ce bon vieil enregistrement à l'ancienne, celui qui fleure bon l'authenticité et la sueur. Il tente bien de se dédouaner en se reposant sur la figure de Trent Reznor, à qui le numérique a redonné un élan de créativité, mais l'essentiel se focalise sur les trajectoires des membres de Fleetwood Mac, Barry Manilow ou Rick Springfield (encore des noms qui ne nous disent pas grand chose ici), renégats d'une époque dorée définitivement révolue. Là encore l'entreprise nous laisse perplexe, tant le métrage s'éparpille entre l'évolution de Sound City et de ses acteurs, contée de façon parcellaire, et son apologie de l'analogique, qui n'est jamais mis en perspective. Pourquoi ne pas rappeler qu'il existe encore des studios de ce genre (Toe Rag à Londres par exemple) et que de fortes têtes comme Jack White préservent avec ténacité ce type d'artisanat (Third Man Records) ? Au lieu de cela, Grohl préfère nous faire tirer des larmes en déroulant la litanie du personnel dévoué des lieux, mort ou au chômage après sa fermeture, tout en s'empressant de récupérer la console de mixage pour garnir son studio 606, avide de transplanter un peu d'authenticité et de gloire surannée dans son propre terrain de jeu (mais la formidable acoustique des lieux ne contribuait-elle pas au moins autant à sa renommée que sa console réalisée sur mesure ?). Là encore le documentaire se mue en trailer promotionnel dans sa dernière partie, où l'on a la furieuse impression de se fader une réclame pour sa B.O., alléchant le spectateur en exhibant son casting de luxe.

Comme à la vision de Back & Forth, un même sentiment de malaise nous envahit devant le spectacle de ces musiciens aguerris, pratiquant leur art en charentaises, s'autocongratulant à coup de "amazing", "it's magical", "that's rad, man !" McCartney vient s'encanailler auprès de ses convives éberlués, babillant un ersatz d'"Helter Skelter". Ailleurs Josh Homme et Trent Reznor alignent un "Mantra" en pilotage automatique pour rendre service à leur pote. On est en revanche ravi de retrouver un Chris Goss si rare derrière le micro, parfaitement servi par la section rythmique de Rage Against The Machine. Tout cela respire l'ambiance chaleureuse, pas vraiment le dépassement de soi. On a envie de prendre Dave Grohl par le colback et de le secouer : mais tu ne te rends compte de rien  ? Tu ne comprends pas que tout l'équipement vintage du monde ne te rendra pas soudainement inspiré ? Qu'un kilomètre de bandes et une console de légende ne transforment pas le plomb en or ?


Sans doute se défera-t-il de notre étreinte et s'en sortira-t-il par une pirouette et un grand sourire. Et remportera la mise au final. Comme toujours. Les rock critics se demanderont longtemps pourquoi un batteur si exceptionnel s'est entêté avec un tel acharnement à porter à bout de bras ses si anodins Foo Fighters. Le bonhomme n'en a cure, lui qui vit depuis plus de vingt ans un rêve de gamin éveillé, accrochant à son imposant cv, chaque mois que dieu fait, des collaborations plus ou moins fructueuses avec les figures majeures du rock anglo-saxon, gloires des décennies passées comme valeurs sûres du paysage contemporain. Mercenaire zélé, frontman consciencieux, Dave Grohl reste surtout un artisan dévoué, un activiste enthousiaste, un passionné jamais blasé. Nous ne sommes jamais dupes de la camelote qu'il nous refourgue, mais il reste un point de repère, un emblème qui nous rappelle le plaisir brut que peut procurer le rock, celui qui nous avait cueilli adolescent. Qu'importe si l'ivresse n'est pas toujours de mise. On peut le louer ou l'ignorer, le célébrer comme le mépriser, le type fait indubitablement partie du décor, et tous les aigris du monde ne sont pas près de déloger ce grossium à la santé de fer. Qu'on se le dise, like it or not, SuperDave nous enterrera tous.

Maxime

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