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Critique d'album

Alice in Chains


Alice in Chains


(07/11/1995 - Columbia - Grunge - Genre : Rock)
Produit par Toby Wright, Alice in Chains

1- Grind / 2- Brush Away / 3- Sludge Factory / 4- Heaven Beside You / 5- Head Creeps / 6- Again / 7- Shame in You / 8- God Am / 9- So Close / 10- Nothin' Song / 11- Frogs / 12- Over Now
Note de 4.5/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
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Maxime, le 23/09/2005
( mots)

La plupart des disques rock qui s’aventurent dans les recoins sombres de nos âmes torturées nous proposent d’exorciser nos démons, de vaincre nos peurs, d’annihiler nos chagrins. Ces galettes nous vendent de la thérapie par le riff, et on est prié de bien vouloir s’allonger sur le divan, fut-il recouvert d’immondices. Il n’y a pas une seule chanson de Korn dans laquelle le verbe pain ne soit accolé à l’expression go away. Ça n’est pas le cas de ce disque. Nos souffrances, il ne nous enjoint pas de les combattre mais de s’y draper. De s’y lover. Non par goût douteux du morbide (quoique...) mais parce que les souffrances font partie de nous, nous définissent, nous collent à la peau. En fait, nous sommes pétris de douleur et le nier reviendrait à se méconnaître totalement. Nous sommes, tels le chien à trois pattes de la pochette, des êtres mal foutus, tordus, imparfaits, implorant de nos yeux verdâtres le droit d’être aimés et de vivre en ce monde.

Kurt Cobain, irrité par cette maudite étiquette grunge qui jetait son groupe dans le même panier que des formations qu’il vomissait, a toujours manifesté son aversion face à Alice In Chains. Si le monsieur avait daigné vivre un peu plus longtemps, peut-être aurait-il revu son jugement, au vu de cet ultime et somptueux album du gang de Seattle. Le calque entre Cobain et Layne Staley fonctionne d’ailleurs plutôt bien : même parcours, même démons, même addiction à la dope. Seulement, là où le leader de Nirvana coupait son désespoir avec la furie du punk, Staley, lui, choisit l’option décadence, mariant les guitares saturées à la froideur lucide de Joy Division.

Si cet album éponyme tient tellement une place à part à la fois dans la discographie du groupe et par rapport à la scène rock de l’époque, c’est qu’on avait rarement entendu aussi distinctement au point qu’on croirait presque les toucher, la dégradation, le monstrueux, la déchéance comme élevés au rang de catégories esthétiques. Trempant ses guitares dans un bain d’acide, Jerry Cantrell entrelace des riffs malades et gluants, éclaboussant de leur noirceur poisseuse les textes de Staley. Les ambiances sont toutes sombres, mais la finesse du songwriting fait apparaître des nuances : ici du gris criard, du bleu sombre, du vert glauque. Le timbre si particulier du dérangé chanteur, comme percé par mille lames de rasoir, déclame en Lautréamont illuminé la fin absolue de l’humanité, le déclin des utopies.

Des chansons hantées et malsaines, oui. Mais des chansons magnifiques. Du "Grind" liminaire, véritable douche d’acide sulfurique au "Over Now" final, formidable ode presque apaisée, c’est une heure de voyage au tréfonds des égouts que l’on nous propose. Les titres, tarabiscotés, aussi structurés que la colonne vertébrale d’un tétraplégique, voyagent entre ballade fantomatique (le très justement culte "Heaven Beside You"), Joy Division métallisé ("Shame in You", "Again") ou chute libre dans un puit sans fond ("Nothin’ Song", "Frogs"). Plusieurs écoutes sont nécessaires, afin que les yeux et les oreilles s’habituent à la noirceur, mais, une fois pris par la musique, pas sûr qu’on veille ressortir à la lumière du jour.

Dernier album d’une formation qui allait ensuite dépérir, notamment à cause des addictions de son leader, ce disque marque d’une pierre noire les années 90 comme ayant atteint le point de non-retour dans le nihilisme et la décadence. Si In Utero fut le coup de feu fatal qui abattit le grunge, Alice in Chains en fut son sublime râle d’agonie. Le groupe se reforme cette année, en dépit de la mort de son chanteur. Ressusciter les démons, bonne idée ?

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