Atomic Rooster
Death Walks Behind You
Produit par Atomic Rooster
1- Death Walks Behind You / 2- Vug / 3- Tomorrow Night / 4- 7 Streets / 5- Sleeping For Years / 6- I Can't Take No More / 7- Nobody Else / 8- Gershatzer
Avec son premier album, Atomic Rooster s’était imposé comme un héraut du rock progressif naissant. Il parvenait à produire des titres accessibles, énergiques, avec des influences soul, tout en maintenant une exigence dans les compositions, les rythmes, et la structure instrumentale où les claviers dominent. Mais la formation est très éphémère : Carl Palmer part rapidement pour fonder un trio qu’on ne présente pas, et le chanteur Nick Graham quitte le navire. Heureusement, le groupe se relève immédiatement avec l’arrivée du très bon chanteur John Du Cann, ex-Andromeda, qui est également un bon guitariste avec une touche personnelle indentifiable. A la batterie, Paul Hammond prend la suite de Palmer avec classe.
Ce second album est surprenant. D’une part, il est très différent du premier, notamment parce que la guitare électrique fait son entrée et prend une place conséquente : Atomic Rooster fait une transition claire vers le hard-rock. D’autre part, on retrouve des caractéristiques mélodiques et rythmiques qui rappellent son prédécesseur alors que le groupe est totalement remanié : cela prouve l’influence importante de Vincent Crane sur ce qui est, en définitive, SON enfant. Comme il navigue entre deux styles musicaux, l’album représente aussi deux facettes du groupe.
"Tomorrow Night" résume le tournant heavy : un titre efficace qui joue sur l’entrée progressive des instruments en introduction et se construit autour d’un riff remarquable et d’un rythme entraînant. Le solo de claviers s’inscrit dans le genre de ceux des pontes du style, Deep Purple en tête. Ce fut le grand succès de l’album, mais l’énergique "Sleeping for Years" n’a pas à rougir, et "I Can’t Take no More" groove dès les premières notes (ELO aurait-il emprunté quelques notes au titre sur "Don’t Bring Me Down" ?). Sur le terrain du hard-rock associant claviers et guitares, Atomic Rooster se démarque par son style et s’affirme comme une référence.
Pourtant, Atomic Rooster demeure un groupe de rock progressif. Sans parler de l’alambiqué et expérimental "Gershatzer" (qui peut évoquer ELP par moment), c’est le premier morceau, "Death Walks Behind You", qui nous le rappelle avec force. Ténébreux, angoissant, dense mais magnifiquement construit, il illustre les capacités du groupe à intégrer la nouvelle dimension électrique à sa musique. On est aisément emporté dans la montée en puissance et dans l’obscurité du morceau grâce à des mélodies et riffs dantesques. Il est vrai que l’album est relativement sombre, dimension renforcée par la pochette empruntée à William Blake (une mode dans les 1970’s, allez voir la pochette du second Gilgamesh).
Dans un contexte où les deux genres émergeants sont le hard et le prog’, il est évident que certains groupes se lancent dans une hybridation souvent appelée heavy-progressive. Death Walks Behind You en est un très bel exemple. Ainsi, "7 Streets" est une autre exploration (géniale, un titre méconnu mais mémorable) de cette fusion, et l’instrumental "VUG" croise le jazz avec le riff de "La Grange".
Death Walks Behind You est une pièce maîtresse de l’histoire du rock et une véritable réussite, certes davantage sur le plan artistique que commercial. Au carrefour du rock progressif et de hard-rock, sans jamais tomber dans une superposition bancale, il invite à reconsidérer les catégorisations, très utiles, mais toujours caricaturales.
A écouter : "Tomorrow Night", "Death Walks Behind You"