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Critique d'album

John Frusciante


The Empyrean


(20/01/2009 - Record Collection - Guitariste des Red Hots ! - Genre : Rock)
Produit par John Frusciante

1- Before the beginning / 2- Song to the Siren / 3- Unreachable / 4- God / 5- Dark/Light / 6- Heaven / 7- Enough of me / 8- Central / 9- One More of me / 10- After the ending
Note de 5/5
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Note de 5.0/5 pour cet album
"Le Boss de fin de la discographie conventionnelle de Frusciante : épique et grandiose"
Maxime L, le 22/09/2020
( mots)

Enfin, le dernier épisode qui clôt la rétrospective sur Frusciante entamée en janvier dernier et l'album Niandra Lades and Usually just a t-shirt.


Un aboutissement, une sorte de graal ou de Boss de fin, avec des vieux démons oubliés, enterrés profondément et surtout définitivement. Voilà ce que peux représenter The Empyrean, aux yeux des amateurs de John Frusciante. Un dixième disque solo qui vient conclure une discographie "conventionelle" de la plus belle des façons. Alors oui, il y aura d'autres productions ensuite, mais axées quasi intégralement sur de l'électronique et de l'acid-house.


The Empyrean sort en janvier 2009 et occupe une place importante dans l'oeuvre du guitariste américain. Une fois n'est pas coutume, Frusciante prend son temps pour enregistrer et produire l'album, lui qui a nous avait habitué à une cadence toute autre.


Et la première chose qui surprend, dès les premières mesures du premier titre, c'est la différence de "son" par rapport à ses efforts précédents. Exit les productions faites à la maison ; nous avons affaire ici à un album enregistré avec bien davantage de moyens. Et l'impression se confirmera tout au long du disque : la production y est importante, patiente, soignée, léchée et prodigieuse.


The Empyrean s'ouvre avec le bien nommé "Before the beginning" et qui d'emblée, assomme l'auditeur avec un titre digne des plus grandes ouvertures d'oeuvres musicales.


Long de plus de 9 minutes, totalement instrumental, il semble être l'illustration sonore parfaite pour le visuel de la pochette, à la fois angélique et mélancolique. "Before the beginning" se fait tour à tour léger, puissant, aérien et aquatique. Et s'il emprunte parfois dans sa construction à la guitare du génial Eddie Hazel de Funkadelic sur Maggot's brain (titre inaugural splendide de l'album du même nom), osons le dire tout haut, on pense également à David Gilmour et certaines de ses pièces progressives ("Shine on You Crazy Diamond", autre chanson inaugurale mythique).


Des lignes de guitares, des arabesques finalement assez différentes de ce qu'il a l'habitude de proposer, mais cela n'est heureusement toujours pas un simple disque de guitariste et Frusciante ne tombe jamais dans le piège d'en faire trop et n'est à aucun moment dans la surenchère.


Cette introduction est un véritable uppercut sonore et visuel pour peu qu'on ait un peu d'imagination, et Frusciante, brouillant de nouveau astucieusement les pistes, enchaîne avec une cover (chose inédite sur ses albums solo) de Tim Buckley, "Song to the Siren", titre folk sixties très repris (par Bryan Ferry notamment) et revisitée ici dans la lignée du premier morceau, à savoir avec la même cohérence sur la prod et l'atmosphère. Des nappes doucereuses de claviers aquatiques, un petit écho dans la voix, un chant des sirènes tout à fait crédible, comme un sas de décompression entre la gifle inaugurale et "Unreachable", second grand passage du disque.


The Empyrean est un concept-album, ce qui explique dans un premier temps les thèmes récurrents et l'homogénéité dans les différentes ambiances proposées, et qui est à la fois une histoire musicale et vocale, et qui doit selon Frusciante "être écouté tard dans la nuit, dans un salon plongé dans le noir".


Et pour l'avoir testé dans ces conditions, le bougre a raison, et on ne peut qu'être admiratif du travail sur la production mais bien évidemment aussi sur l'interprétation de Frusciante, qui retrouve au passage son fidèle protégé Josh Klinghoffer (pour rappel futur ex Red Hot Chili Peppers) qui s'occupera de toutes les percussions, de choeurs et de certaines parties de claviers. C'est d'ailleurs lui qu'on retrouve sur la pochette, allongé, semi-enterré et relié par une sorte de liane à John Frusciante, sorte d'ange déchu entre noyade et lévitation.


Et si l'appellation de concept-album peut parfois rebuter dans la compréhension de l'histoire, ici la musique se suffit à elle-même (du moment où l'on écoute les pistes dans l'ordre évidemment). Et si The Empyrean ne contient pas de singles à proprement parler, "Unreachable" n'aurait pas dépareillé comme tête de gondole (abstraction faite de sa durée de plus de 6 minutes et de son absence de refrain..) Une ligne de basse pantagruélique (de la part de Flea, présent sur 4 titres), de l'orgue savamment placé, un énorme travail sur les harmonisations de voix (quel progrès une fois de plus pour Frusciante sur son chant), un solo de guitare qui semble joué sous l'eau (et qui permet cette liaison constante avec l'ambiance du début) et une explosion céleste en guise de fin font de ce morceau un des plus puissants jamais écrits par Frusciante.


Gageons que le parfaitement nommé "Heaven" aurait également les épaules pour faire office de single parfait, quasi mystique, véritable hostie musicale (à écouter au casque par pitié). Les lignes de guitares groovent, la voix en falsetto maitrisée de Frusciante tel un archange christique, sur une assise rythmique remarquable. Tout s'imbrique parfaitement, les effets, les claviers, les violons et cette sensation presque palpable d'assister en direct à la construction d'un puzzle sonore aérien, onirique et qui constitue peut-être le climax de The Empyrean.


Qu'il semble loin le temps des albums enregistrés "à la maison" (Curtains, créé en quasi prise live depuis son salon) ; un temps non-négligeable à été passé en studio par John Frusciante, se muant en une sorte de Brian Eno à la recherche du moindre effet sur les parties vocales et/ou instrumentales. Et si le résultat peut parfois être déroutant, ça n'est jamais créé dans un but démonstratif. Que ce soit les expérimentations vocales en formes de collages sur "Dark/light", compo à tiroirs, entre boites à rythme lo-fi et chant en falsetto, ou sur "One More of Me", c'est à chaque fois dans la ligne directrice de l'oeuvre. Plus aucune trace de l'aspect "bricolage" (et qui soyons honnêtes, faisait aussi le charme de sa musique), mais beaucoup de dentelle, de retouches, de travail de mixage sur les instruments. A noter également l'intervention d'un quatuor à cordes, pour donner encore plus d'ampleur à des chansons comme "One more of Me" ou "Central".


Comme souvent avec Frusciante, zéro promotion sur l'album. Et pourtant tout le monde ne peut pas se targuer d'afficher au casting un ex-Smiths, en la personne du légendaire et trop rare Johnny Marr, qui fait tourner ses fabuleuses guitares sur 2 titres, "Enough of Me", mais surtout "Central", ultime grand moment du disque. Pièce épique de 7 minutes, qui commence par un piano virevoltant, une ligne de guitare floue mais qui se rapproche dangereusement jusqu'à l'entrée de la batterie qui semble presque signifier la fin du monde.


"Central" est un ovni, un de plus dans la discographie de Frusciante, où on parvient une fois encore à discerner chaque strate musicale , parfaitement en place (délectez vous de ce break batterie-piano imparable à 1/3 du morceau) et qui laisse installer un refrain qui tempère l'angoisse du moment, mais qui saura s'effacer devant une seconde partie proprement dantesque, nappée de clairs-obscurs sur fond de solo de guitare dévastateur. Le genre de chanson qui laisse l'auditeur groggy, exsangue, complètement absourdi par la foudre musicale qui vient de tomber entre ses deux oreilles.


"After the ending" et son chant à la Tom Waits vient nous réconforter, nous border, en laissant poindre cette thématique entendue pendant près de 50 minutes, et qui comme un fil rouge, vient refermer le livre The Empyrean.


Une oeuvre qui vient clôturer 10 disques et 15 ans de musique riche, variée, introspective, parfois inégale et dispersée, mais absolument passionnante. Les années noires sont derrière lui, pour de bon, il est un musicien qui n'a plus rien à prouver et ça n'est sans doute pas un hasard si c'est son dernier disque conventionnel. Et s'il n'est pas forcément le meilleur album, il est à coup sûr le plus abouti.

Commentaires
Greg, le 03/12/2022 à 17:27
Merci pour cet excellent article qui plonge au centre de cet unique album. Pour moi un travail de dingue, de grand artiste. Frusciante, un peintre devant la toile, goûtant l'onctuosité des sons, travaillant plusieurs ambiances, tantôt cosy, un brin lounge Roccoco, aseptisé, métallique... Car cet album recèle surtout pour moi une inventivité sans limite, abyssal parfois, de matières et d'effets sonores cherchées et ressenties très sensiblement. Je finirai par donner mon avis sur dark/light qui est une chanson phare au même titre que l'intro je trouve. D'ailleurs elles sont apparentées à mon avis dans cet album, sorte de reflet infini d'un monde superficiel, narcissique, fragile, spirituelle et empirique à la fois. Comme sur un déclin. La boîte à rythmes qui aplatit comme une crêpe le plan spectral de l'ensemble de la première partie nous focalise d'un coup sur une scène musicale à plusieurs plans, très illustrés, passant d'une atmosphère a une autre avec brio ! Grand artiste, grande maîtrise ! Ensuite ligne de basse de flea anthologique pour moi, mélodies vocales envoûtantes. Sorte de transe répétitive, mélancolique, une foule vocale qui se couronne par un travail immersif, très barré sur les delays de fin de phrases. Un morceau un brin angoissant, sorte de transe psyché. Gros caractère cet album qui hausse sans sourciller l'artiste au niveau d'un pink Floyd, led zep... Avec en bonus : de l'humilité ! Rare, très rare ces artistes aux références illimitées, à la créativité culturelle qui dépasse largement la forme au profit du fond.
MaximeL, le 20/10/2020 à 08:43
Merci beaucoup Jimmy pour avoir lu toutes les chroniques sur John Frusciante. Je ne suis pas spécialiste d'électro (ni même un amateur d'ailleurs) et Dark/Light est un des titres qui a le moins retenu mon attention sur The Empyrean, mais vos arguments sont bons ! J'attends avec impatience le jour où il nous refera un album "conventionnel". Mais en attendant, vous pouvez poser une oreille sur "I don't feel well" l'album tout récent de Pluralone, qui n'est autre que le projet de Josh Klinghoffer.
Jimmy, le 16/10/2020 à 23:55
Sacré travail que d'avoir épluché tous ces albums ! Un grand Merci pour ce voyage musical. Ce fut avec beaucoup d'enthousiasme (et d'impatience) que je lisais critique après critique vos analyses, et découvrais en même temps les albums de Frusciante. Sauf pour cet album-ci que j'affectionne tout particulièrement depuis sa sortie. Alors j'aurais donc pensé avoir beaucoup à dire sur celui-ci... mais finalement tout vient d'être magnifiquement fait ici ! Je ne trouve pratiquement rien à ajouter de constructif à votre analyse... Mais bon, vu que je suis là à ne rien faire aussi tard, je me lance pour un petit mot. Alors bien que je sois compétemment d'accord sur les temps forts de l'album qui sont ici présentés, j'aimerai revenir sur un titre moins puissant que les autres mais qui m'avait bien interpellé déjà tout jeune, c'est Dark/Light. Et notamment sa deuxième partie qui consiste en une unique boucle de ligne de basse et de coeurs pendant quand même 5 min ! Ce qui n'est pas rien. Même si selon moi la boîte à rythme ne rend pas vraiment honneur au morceau, cette boucle est vraiment accrocheuse et je ne vois jamais les 5min passer. C'est toujours un plaisir de me laisser balloter inlassablement par cette basse comme par les vagues faisant tanguer mon embarcation... Après c'est peut-être moi qui fait une fixation sur les morceaux comportant des boucles bien foutues (j'entends par là celles qui ne paraissent pas se répéter, celles qui n'ont pas de fin marquée) rarement réalisées avec des instruments (les boucles, c'est souvent davantage le kif de la musique électro). Je voulais donc le souligner (et si jamais quelqu'un passant par là connait d'autres titres de ce genre, je suis éternellement preneur, mais je m'égare !..). Après on va pas se mentir, les guitares saturées et aquatiques de Frusciante et sa voix avec tout ce que ça véhicule restent l'attrait principal de l'album, Mais Dark/Light reste une "parenthèse contemplative" fort agréable pour ma part. Merci Maxime pour cette année de critiques !
Kefran, le 23/09/2020 à 12:33
@MaximeL : Oui effectivement, j'ai jeté une oreille à la période "Trickfinger"... je n'irai pas plus loin. En tout cas, si vous avez d'autres pépites relativement méconnues rock/folk de ce niveau, je suis preneur !
MaximeL, le 23/09/2020 à 09:09
Merci beaucoup Kefran pour la fidélité à ces chroniques. J'avoue avoir presque un petit pincement au coeur d'en avoir fini avec John Frusciante. Il a sorti d'autres albums évidemment, mais très peu intéressants pour moi.
Kefran, le 22/09/2020 à 13:27
La boucle est bouclée ! J’ai pris beaucoup de plaisir à suivre vos différentes chroniques entamées il y’a plusieurs mois et découvrir les albums en même temps! Cet album a eu une accroche immédiate sur moi avec le titre instrumental « before the beginning », je ne sais pas forcément l’expliquer. Il s’agit d’un album que j’écoute régulièrement (au même titre que le superbe « The will to Death ») depuis le confinement. Merci et bonne continuation !